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Côte d''Ivoire

Une économie sinistrée par la crise politico-militaire

L’économie de la région de la région ouest-africaine des zones UEMOA (Union économique et monétaire de l’Afrique de l’ouest) et de la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) est déstabilisée par la crise. Toutes les prévisions de croissances sont perturbées et évoluent en dents de scie. Quelques secteurs d’activité tirent bénéfice de la crise, dans les pays voisins. Mais en Côte d’Ivoire même, si les chiffres ne sont pas encore publiés, toutes les observations objectives indiquent néanmoins un blocage, voire une paralysie de certaines activités économiques.
L’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) regroupant les pays et bailleurs de fonds avait organisé à Accra au Ghana, en mai 2002, une réunion d’information sur les politiques d’intégration en Afrique de l’Ouest. Mais les orientations définies n’ont pu prendre l’envol escompté. La pièce maîtresse du dispositif, la Côte d’Ivoire, ayant sombré dans la guerre civile. Une nouvelle réunion est prévue, courant 2004 pour réorganiser des dynamiques internes à la région et qui échapperaient aux vicissitudes des politiques intérieures des pays membres de la CEDEAO ou de l’UEMOA. Mais avant cela une conférence internationale sur l’investissement et le commerce devrait se tenir à Dakar en mars-avril 2003. La Banque africaine de développement à l’issue de sa réunion de la mi-décembre 2002 à Accra, envisage elle aussi, l’étude d’orientations nouvelles dès février prochain. Elle affirme son souhait de maintenir son siège social à Abidjan, mais constate néanmoins les difficultés qu’elle rencontre pour la tenue des assemblées générales du groupe dans le pays hôte. Pour des raisons de sécurité, le Ghana offre pour l’instant des possibilités de relocalisation temporaire de certains personnels.

Les indicateurs des banques et institutions de financement, affichent des tendances positives et des seuils de réalisations qui répondent aux objectifs. Mais ces mêmes institutions manquent de recul nécessaire pour apprécier la rentabilité des investissements. Les seuls indicateurs restent, pour l’instant en Côte d’Ivoire, la chute des activités économiques et commerciales. Des exemples précis sont pris pour apprécier les données. La coupure du pays en deux zones distinctes a eu une incidence directe sur les réserves bancaires en zone contrôlée par le rébellion. Les banques ne sont plus approvisionnées et les systèmes de fonctionnement sont contrariés par la guerre. Les commerçants ne déposent plus leurs fonds en banques, qui de toute façon ne pourraient pas faire des placements rémunérateurs. Les pays limitrophes, le Burkina Faso et le Mali, connaissent un regain de transactions financières, mal maîtrisées du reste, parce que les dispositifs locaux ne prévoient une gestion saine d’une situation extrême. Cette situation fait le lit du secteur informel à la frontière des deux pays, et qui échappe à l’économie de tous les pays concernés. Mais ces activités profitent de manière indirecte au Mali et Burkina Faso qui enregistrent une consommation accrue de leurs productions, dans les zones frontalières. Les activités du secteur informel ne profitent pas au Ghana du fait de la différence de monnaie entre ce pays et la Côte d’ivoire.

Le contournement des axes traditionnels ne règle pas tout

Les régions du nord de la Côte d’Ivoire occupée par la rébellion semblent plus touchées par les pénuries en biens de consommation. Le contournement de certaines routes, même s’il révèle la promptitude de réaction des commerçants, n’efface pas la précarité des solutions trouvées. Le marché du bétail par exemple, en provenance du Mali, du Burkina Faso et du Niger, s’effondre parce que la Côte d’Ivoire, région sud sous contrôle gouvernemental, n’absorbe plus les quantités habituelles. Il en est de même pour la production d’oignon dont le Niger est le principal fournisseur. A Abidjan et dans les grandes villes du sud les marchés n’enregistre pas pour l’instant de ruptures d’approvisionnement, mais les prix commencent par connaître une hausse graduelle, pendant que le Niger cherche d’autres débouchés pour écouler son trop-plein. Les grossistes vont «liquider» leurs stocks qui pourraient revenir sur le marché ivoirien par des voies détournées. Du fait de l’effondrement des cours, le consommateur ivoirien ne sera pas forcément perdant. Dès le mois de février, après la période de négociation de vente d’oignons, les indicateurs reflèteront les tendances réelles du marché. Un autre produit, la cola, perturbe les équilibres régionaux. L’approvisionnement en Côte d’Ivoire n’étant plus possible, les négociants se rabattent sur le Ghana et le Nigeria, autres gros producteurs de la région.

Sur le plan national, la production intérieure ivoirienne connaît aussi d’énormes difficultés d’écoulement des stocks. Il s’agit essentiellement des produits agroalimentaires que la Côte d’Ivoire exporte vers ses voisins : huiles, bananes, ananas, avocat, sucre. A ces produits alimentaires s’ajoutent également les produits industriels sous les marques Nescafé, Nestlé, Dinor (huile alimentaire), les savons et cosmétiques, la farine de blé, qui ne parviennent plus au marché des pays sahéliens. C’est pourquoi les institutions régionales envisagent sérieusement la réactivation de certains entrepôts et corridors d’approvisionnement des pays enclavés plus affectés par la crise ivoirienne que les pays bénéficiant d’une façade maritime. Cette même logique de survie alimente aujourd’hui les réflexions des mouvement rebelles qui veulent installer dans les zones occupées des systèmes propres de gestion et donc d’autonomie relative, pour éviter le chaos que leur prédisent les autorités d’Abidjan. En tout cas, quelles que soient les solutions de maîtrise de la situation, envisagées par les uns et les autres, l’économie de la Côte d’Ivoire est aujourd’hui déstructurée et perturbe tous les plans de développement régional.


Repères

Superficie : 332 640 km2
Population : 16,9 millions d’habitants
Capitale : Yamoussoukro
PIB par habitant : 420 700F CFA
Taux de croissance du PIB en 2001 : -0,9%
Prévision de croissance PIB en 2002 : 3%
Inflation en octobre 2002 : +0 ;6%
Sources : IZF




par Didier  Samson

Article publié le 03/01/2003