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Irak

Washington dresse des plans pour l’après-Saddam

L’intensification des préparatifs militaires américains ne semble désormais laisser plus de doute sur l’imminence d’une guerre contre l’Irak. L’administration Bush qui devrait dans les semaines à venir disposer de quelque 100 000 hommes dans le Golfe met également la dernière main aux plans destinés à administrer le pays une fois éliminé Saddam Hussein. Ces plans, révélés par le quotidien New York Times, évoquent notamment le stationnement de l’armée américaine en Irak pendant au moins dix-huit mois ainsi que la désignation par l’ONU d’un administrateur civil chargé de diriger l’économie et de reconstruire le pays. Les experts en désarmement qui ont intensifié leurs inspections, ont par ailleurs été violemment pris à partie par Saddam Hussein qui les a accusés d’espionnage au profit des Américains.
George Bush a certes à plusieurs reprises exprimé sa répugnance pour la notion de «reconstruction d’une nation» qui impliquerait de fait une occupation de l’Irak. Mais à mesure que les préparatifs d’une guerre contre le régime de Saddam Hussein s’intensifient, une présence militaire américaine de plusieurs mois semble désormais acquise. C’est en tous cas ce que croit savoir le quotidien New York Times qui vient de révéler les plans de l’administration Bush pour l’après-Saddam. Pour Washington en effet «garder l’Irak dans son intégralité» est une priorité et dans cette optique l’occupation militaire du pays est donc nécessaire pour au moins dix-huit mois. Et pour éviter d’être taxés de néocolonialisme, les Etats-Unis envisageraient la présence d’un administrateur civil qui pourrait être désigné par les Nations unies. Ce dernier serait chargé de diriger l’économie du pays, de reconstruire ses écoles et ses institutions politiques et administrerait les programmes d’aide débloqués par la communauté internationale. En proposant cette alternative, Washington semble vouloir écarter l’exemple du général Douglas MacArthur qui au lendemain de la Seconde Guerre mondiale régna avec les pleins pouvoirs six ans durant sur le Japon. Mais avant que l’autorité de cet administrateur civil ne soit réellement assise, il ne fait toutefois à peu près aucun doute, estiment de nombreux analystes, que la direction de l’Irak sera confiée, dans les premiers mois, à un général américain.

Washington proposerait en outre d’organiser des procès pour juger devant des tribunaux militaires les dirigeants les plus importants d’Irak tandis que les fonctionnaires qui auraient aidé à abattre le régime de Saddam Hussein pourraient bénéficier d’indulgence. Un message clair destiné à encourager un éventuel soulèvement intérieur et qui s'apparente plus à de la propagande. Concernant les champs de pétrole irakiens, l’administration américaine affirme officiellement qu’ils sont «le patrimoine du peuple irakien» et qu’ils doivent servir à la reconstruction du pays. L’une des premières mesures que devrait prendre Washington avant même la chute du régime irakien sera d’ailleurs d’en prendre le contrôle afin d’éviter officiellement que l’armée irakienne ne détruise l’industrie pétrolière du pays. Mais si les Etats-Unis affirment que la manne pétrolière servira à encourager la construction d’un régime démocratique en Irak, elle se garde bien toutefois de préciser qui du général américain ou de l’administration civile en aura la tutelle.

Saddam Hussein hausse le tonSaddam Hussein hausse le ton

La fuite, semble-t-il orchestrée, de ces plans américains pour l’après-Saddam semble plus que jamais confirmer l’imminence d’une offensive militaire. Elle intervient en effet alors que la mobilisation militaire s’intensifie, l’armée américaine réunissant actuellement dans le Golfe des forces terrestres qui pourraient dépasser les 100 000 hommes en vue d’une éventuelle invasion. Le Pentagone a ainsi annoncé lundi sa première mobilisation majeure de réservistes touchant près de 20 000 soldats. Un groupe d’assaut amphibie avec 2200 Marines et un navire-hôpital de 1000 lits ont en outre quitté les Etats-Unis pour la région tandis que le plus gros porte-avions américain, l’Abraham Lincoln, a interrompu son voyage de retour pour regagner l’Australie où il doit se tenir prêt à appareiller pour le Golfe. La Grande-Bretagne, alliée indéfectible de Washington, a de son côté annoncé la mobilisation d’un premier contingent de 1500 réservistes dans le cadre des préparatifs militaires en vue d’une guerre contre l’Irak. Elle a en outre dépêché un groupe naval, composé de son plus gros porte-avions, dans la région du Golfe.

Alors qu’il s’était jusqu'à présent gardé d’émettre une quelconque critique sur le travail des experts en désarment, le président irakien a soudainement violemment dénoncé le travail de la mission onusienne. Saddam Hussein a en effet affirmé que les inspecteurs, chargés d’établir si l’Irak possède ou non des armes de destruction massive, se livraient à «un pur travail de renseignement». «Les équipes d’inspection vont voir les unités de l’armée et posent des questions qui n'ont rien à voir avec les armes de destruction massive. Ils vont dans des usines, interrogent les ouvriers et demandent des listes de savants qui n'ont aucune relation avec les armes de destruction massive», a-t-il ainsi affirmé devant des officiers irakiens. Ces déclarations tranchent avec son précédent discours dans lequel il avait exprimé il y a dix jours à peine sa confiance dans le Conseil de sécurité et salué le travail des inspecteurs.

Mais ces critiques ne signifient toutefois pas un changement d’attitude sur le terrain de Bagdad puisque les autorités irakiennes ne semblent pas vouloir réduire ou cesser leur coopération avec les experts en désarmement. Les visites de sites se sont en effet poursuivies mardi comme à l'accoutumée. Les inspecteurs ont même utilisé pour la première fois depuis leur arrivée il y a six semaines des hélicoptères pour se rendre sur les sites. Ils l’ont fait avec l'accord des autorités irakiennes et en coordination avec elles.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 07/01/2003