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Zimbabwe

Menace de boycott pendant la coupe du monde de cricket

L’Australie entend boycotter les rencontres de la prochaine coupe du monde de cricket qui doivent avoir lieu au Zimbabwe. Le débat laisse les Sud-africains indifférents mais provoque la polémique en Grande-Bretagne.
De notre correspondante en Afrique du Sud

L’Australie a appelé au boycott pur et simple des matches qui seront organisés au Zimbabwe, pendant la prochaine coupe du monde de cricket. En Grande-Bretagne, les débats font rage autour d’une compétition qui sera organisée du 9 février au 23 mars 2003 en Afrique du Sud, principalement, mais aussi dans le pays de Robert Mugabe. Au total, six matches sont prévus entre Harare et Bulawayo, les deux plus grandes villes zimbabwéennes. Outre la Grande-Bretagne et l’Australie, les équipes d’Inde, de Namibie, du Pakistan et des Pays-Bas figurent au programme.

L’Australie et la Grande-Bretagne ont obtenu la suspension du Zimbabwe du Commonwealth pour un an, en raison des violences politiques qui ont marqué la réélection contestée, en mars 2002, de Robert Mugabe. Aujourd’hui, Londres et Melbourne estiment que participer aux matches zimbabwéens de la coupe du monde de cricket reviendrait à une approbation tacite de Robert Mugabe. «Un homme qui n’a pas seulement volé une élection, a affirmé le Premier ministre australien John Howard, mais dont les politiques ont affamé la moitié de la population».

En Grande-Bretagne, l’Office de cricket d’Angleterre et du pays de Galles (ECB) a provoqué la colère de la classe politique, conservateurs et travaillistes confondus, après avoir accepté de jouer un match prévu le 13 février au Zimbabwe. «Une décision déplorable et choquante», a lancé Claire Short, ministre britannique du Développement international, le 28 décembre. «Notre équipe prévoit d’aller au Zimbabwe et de jouer comme si tout était normal», a-t-elle ajouté.

«Ce n’est pas aux jeunes joueurs de prendre une décision sur le Zimbabwe»

Tony Blair, le Premier ministre, a déclaré dimanche «l’opposition» de son gouvernement à un voyage de l’équipe britannique de cricket au Zimbabwe, sans se prononcer sur un éventuel boycott. «Quoi qu’il en soit, à la lumière d’une situation politique et humanitaire qui se détériore dans ce pays, les ministres ont dit clairement que si la décision leur incombait, l’Angleterre ne devrait pas jouer au Zimbabwe».

Sur le plan légal, le verdict incombe, selon Tony Blair, à l’ECB, un organe sportif indépendant. Réponse irritée de Nasser Hussain, le capitaine de l’équipe britannique: «On ne peut pas attendre de jeunes gars qui tournent autour du monde de prendre une décision morale sur le Zimbabwe». Et de demander une concertation formelle entre le gouvernement et l’ECB, pour une décision assumée par tous.

Tim Lamb, le PDG de l’ECB, résiste pour sa part aux pressions politiques en faveur d’un boycott. «Je ne crois pas que jouer au Zimbabwe reviendrait à approuver Robert Mugabe», a-t-il affirmé, tout en insistant sur les conséquences financières d’un telle décision. Le Royaume-Uni encourt en effet une lourde amende du Conseil international du cricket (ICC), s’il ne joue pas les matches prévus au Zimbabwe. La facture pourrait s’élever jusqu’à 16 millions de dollars, a prévenu Malcom Gray, le président de l’ICC, qui estime lui aussi que les instances sportives ne sont pas habilitées à prendre des décisions politiques. A la demande de John Howard, le Premier ministre australien, de revenir sur l’organisation de matches au Zimbabwe, Malcom Speed, le directeur général de l’ICC, a répondu que les seuls critères de sélection en vigueur portent sur la «sécurité» dans les pays d’accueils. Il ne voit pas de «dilemme moral», dans la mesure où ces critères ont été jugés satisfaisants au Zimbabwe.

Alors qu’elle laisse indifférente l’Afrique du Sud, plongée dans ses grandes vacances d’été austral, la polémique s’est immédiatement politisée au Zimbabwe. «Si les joueurs britanniques viennent jouer quand même, nous les condamnerons», a tonné le 30 décembre Morgan Tsvangirai, le leader du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), le principal parti d’opposition.

L’ambassade du Zimbabwe à Londres, elle, a protesté contre «la politique du deux poids, deux mesures» pratiquée à l’encontre du Zimbabwe par Tony Blair, ennemi public numéro un du régime de Robert Mugabe. A Londres, le suspens continuera jusqu’à la réunion, la semaine prochaine, des responsables nationaux du cricket avec les ministres en charge des Affaires étrangères et de la Culture.



par Sabine  Cessou

Article publié le 06/01/2003