Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Congo démocratique

Les apprentis-sorciers toujours à l’œuvre

Les combats se poursuivent et les témoignages d’exactions se multiplient dans l’est du pays. On peut d’ores et déjà redouter des conséquences sur le calendrier politique: l’application de l’accord «historique» de paix n’a pas démarré.
Les informations en provenance de l’est de la RDC font état d'une tension persistante et compromettante pour les objectifs militaire et politique fixés par l'accord de paix du 17 décembre: la fin de la guerre et le respect du calendrier d’installation d’un gouvernement de transition regroupant les principaux acteurs de la crise congolaise.

Dans cette province de l’Ituri, les rebelles du Rassemblement congolais pour la démocratie-National (RCD-N), alliés du Mouvement de libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba, affrontent depuis plusieurs mois deux formations alliées du gouvernement de Kinshasa, le Rassemblement congolais pour la démocratie-Mouvement de libération (RCD-ML) et les miliciens Maï-Maï. Les combats se sont poursuivis au nord de Beni en ce début d’année, malgré un accord de cessez-le-feu conclu le 30 décembre. La situation est alourdie par de très graves accusations d’exactions commises à l’encontre des populations civiles et sur les prisonniers tombés entre les mains des assaillants du RCD-N et du MLC. Outre les viols et les exécutions, les prisonniers des rebelles sont forcés de se livrer à l’anthropophagie. Les pygmées notamment figurent parmi les principales cibles de ce déferlement de violence incontrôlé qui s’est emparé de la région (écoutez le dossier réalisé par Karine Frenck).

Des actes de cannibalisme sous la contrainte avaient été dénoncées dés le 25 décembre par l’évêque de Butembo. Le chef du MLC les avait vigoureusement démenti, niant jusqu’à la présence de ses hommes sur place. Or les accusations sont persistantes et, au cours de ces dernières semaines, des dizaines voire des centaines de milliers de personnes terrorisées, ont fui la zone de combats en direction de Beni pour échapper à la menace des rebelles et leurs témoignages sont accablants.

Des actes ignobles

Pour tenter de couper court aux soupçons, le chef du MLC se dit «choqué» et a déclaré jeudi qu’il avait «diligenté une commission d’enquête dirigée par un officier supérieur pour enquêter sur tout crime de guerre ou crime contre l’humanité commis par les MLC et RCD-N». Il a également affirmé qu’il avait sollicité le concours du représentant du secrétaire général de l’ONU en République démocratique du Congo afin d’obtenir son aide «pour nous donner, dit-il, toute information qui permettrait d’appréhender les auteurs de ces actes ignobles contre la population civile». Une mission d’enquête de l’ONU est attendu sur place. Mais, dans ces conditions, pourra-t-elle travailler?

Pendant que les différents protagonistes s’attachent à élargir leurs fiefs, au prix d’une terrible dégradation de la situation militaire et humanitaire dans l’Est, rien ne laisse entrevoir pour le moment la poursuite du processus politique à Kinshasa. Selon l’accord de paix «historique» signé entre toutes les parties en conflit, le 17 décembre en Afrique du Sud, ce mois de janvier devrait voir émerger un gouvernement composé de toutes les factions et composantes politiques en présence. Or, à ce jour, il n’en est toujours rien.

A l’issue d’un entretien avec le président sud-africain, mercredi, le chef de la diplomatie belge a annoncé la prolongation de la mission de l’envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU en charge du processus de paix en RDC. «M. (Moustapha) Niasse va pouvoir convoquer les différentes parties congolaises pour parachever le processus», a souligné jeudi Louis Michel, lors d’une escale à Kinshasa, avant de s’envoler pour Gbadolite, fief de Jean-Pierre Bemba dans le Nord, pour le rencontrer.



par Georges  Abou

Article publié le 10/01/2003 Dernière mise à jour le 09/01/2003 à 23:00 TU