Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Côte d''Ivoire

MPCI, MPIGO et MJP rebaptisés Forces nouvelles

Les leaders rebelles du MPCI, du MPIGO et du MJP ne se définissent plus comme des rebelles, mais plutôt comme une coalition des «forces nouvelles» de Côte d'Ivoire. C'est ainsi qu'ils se sont présentés à la presse internationale à Paris, le 28 janvier, pour une ultime conférence de presse avant le retour à Bouaké, le 31 janvier, via Dakar.
Guillaume Soro, secrétaire général du MPCI, et Sidiki Konaté, porte-parole du MPCI, Ben Suck, porte-parole du MJP, Félix Doh, chef des opérations militaires du MPIGO, ont rangé leurs habits de rebelles pour endosser des costumes sombres ou des complets vestons-cravates pour commencer à se préparer à leurs futures nouvelles fonctions. Guillaume Soro, l'ancien leader de mouvement étudiant, est celui dont le discours politique est le plus élaboré. Il a été le principal intervenant lors de la conférence de presse du 28 janvier à Paris.
Il a rendu un hommage appuyé aux autorités françaises qui ont fait, selon lui, un travail honorable. «La France veut sauver la Côte d'Ivoire», ajoute-t-il avant de justifier le bien-fondé de l'accord de Marcoussis.

«Nous avons fait accepter à nos extrémistes le maintien de Laurent Gbagbo à la tête de l'Etat, il lui appartient aussi de convaincre les siens de l'esprit de compromis pour une vraie réconciliation que comporte l'accord de Marcoussis», lance Guillaume Soro en réponse aux différentes manifestations de rejet de l'accord de Marcoussis attribuées aux partisans du président Laurent Gbagbo. Ce document reste pour lui le seul et unique document de travail qui pourrait aider la Côte d'Ivoire à sortir de la crise dans laquelle elle est plongée depuis le 19 septembre 2002. Les ex-rebelles affichent une grande sérénité au sujet de leur retour à Abidjan et de leur
future participation au gouvernement de la République. Ils affirment que la formation du gouvernement a été négociée, le 25 janvier, lors du sommet des chefs d'Etat africains et en présence du secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan et du président français Jacques Chirac. Pour le porte-parole du MJP,
Ben Suck, l'attribution des ministères de l'Intérieur et de la Défense à la rébellion s'est faite dans «un souci de rétablissement de l'ordre et de la sécurité en Côte d'Ivoire».

Les rebelles prennent la communauté internationale à témoin

En revanche, «nous ne sommes pas surpris par la réaction de Laurent Gbagbo à Abidjan, qui évoque l'accord de Marcoussis comme un document de propositions alors que la veille, à Paris, il affirmait devant la communauté internationale que c'était un bon accord», rappelle Guillaume Soro. En effet, la conférence des Chefs d'Etats africains des 25 et 26 janvier à Paris avait entériné l'acceptation par Laurent Gbagbo de la constitution d'un nouveau gouvernement de transition et de réconciliation nationale dirigé par Seydou Diarra. Elle a également décidé la mise en place d'un comité de suivi de l'accord, installé à Abidjan qui «surveillera l'exécution des dispositions prévues par l'accord et aura pouvoir de saisir toutes autorités, nationale, régionale et internationale des cas d'obstruction et de défaillance, afin que des mesures appropriées soient prises», précise le communiqué des chefs d'Etat qui donnent également compétence au comité de suivi de l'accord pour saisir le Conseil de sécurité des Nations unies afin qu'il puisse «tirer les conséquences et prendre les décisions nécessaires».

Le comité de suivi de l'accord de Marcoussis, sera composé d'un représentant spécial à Abidjan du secrétaire général des Nations unies, d'un représentant du secrétaire exécutif de la CEDEAO, d'un représentant de la Commission de l'Union africaine, du pays exerçant la présidence de l'Union européenne, de la Commission de l'Union européenne, du FMI, de la Banque mondiale, des pays membres du G8, de l'Organisation internationale de la francophonie, de l'ambassadeur de France en Côte d'Ivoire, d'un conseiller militaire représentant les pays apportant leur concours à la sécurisation du dispositif
de sortie de crise.

Se fondant sur ces différentes dispositions, les ex-rebelles demandent l'installation rapide de ce comité de suivi de l'accord de Marcoussis qui leur offre la garantie d'une bonne conduite de la transition. Ils s'engagent, par ailleurs, à installer une commission d'enquête sur les crimes économiques
commis depuis une dizaines d'années en Côte d'Ivoire, et à commander un audit de tous les ministères. Ils réclament également la constitution d'une commission d'enquête internationale sur la découverte des charniers et les actions des fameux «escadrons de la mort». Ces actions sont prioritaires et répondent «à l'attente des Ivoiriens», précisent-ils. Guillaume Soro affirme également qu'il est un devoir pour «les forces nouvelles» de tout mettre en
oeuvre pour extirper du vocabulaire politique le mot «ivoirité» qu'il assimile aujourd'hui au nazisme.

Les ex-rebelles affinent aujourd'hui un discours politique essentiellement tourné vers la réconciliation. «Nous avançons à visage découvert, il n'y a aucune force obscure derrière nous. Nous agissons pour l'unité de notre pays», affirment-ils. C'est sans doute pour cela aussi que le sergent Félix Doh du MPIGO accepte de dévoiler sa vraie identité. «C'est pour protéger ma famille restée à Abidjan, au début des opérations, lorsque j'ai pris le maquis que je me suis fais appelé Félix Doh. C'est d'ailleurs ainsi qu'on m'appelle encore dans le maquis, mais mon vrai nom est: Sinclair Ndri Nguessan», précise le chef des opérations militaires du MPIGO.



par Didier  Samson

Article publié le 29/01/2003