Union européenne
L’Europe étale ses divisions
Si la France, l’Allemagne et la Commission européenne minimisent la portée de la lettre de huit dirigeants européens soutenant la politique américaine, les parlementaires de l’Union ont massivement rejeté la perspective d’une guerre en Irak.
Dominique de Villepin a eu beau, devant les sénateurs, refuser d’«opposer une Europe contre une autre» et affirmer que la lettre des huit dirigeants européens soutenant la politique de George W. Bush était «une contribution au débat», la publication par le Times de Londres et d’autres journaux européens est bien ce pour quoi elle apparaît : une rebuffade d’une partie de l’Union européenne, actuelle et future, devant les tentatives de Paris et Berlin de donner le «la» en matière de politique étrangère.
La démonstration de solidarité franco-allemande de la semaine dernière à l’occasion des commémoration du Traité de l’Élysée s’était accompagnée de déclarations hostiles à la politique américaine qui ont vivement indisposé plusieurs gouvernements européens qui ne veulent pas voir la solidarité atlantique être rompue en ces temps de crise. C’est à l’évidence le cas du Britannique Tony Blair, mais également de l’Italien Silvio Berlusconi ou du Danois Anders Fogh Rasmussen. Voilà pour la «vieille Europe», pour reprendre les termes du secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld. Quant aux nouveaux membres de l’Union européenne qui doivent la rejoindre en 2004, anciens satellites de l’Union soviétique, ils manifestent leur reconnaissance envers Washington de les avoir libérés de la domination soviétique par un pro-américanisme sans équivalent en Europe de l’Ouest.
Opposition des parlementaires et de l’opinion
George W. Bush ne s’y est pas trompé, qui a exprimé sa reconnaissance aux «Huit» et qui reçoit cette fin de semaine plusieurs dirigeants européens signataires de la lettre : José Maria Aznar, Silvio Berlusconi, et surtout, ce vendredi, Tony Blair pour ce qui s’apparente à un conseil de guerre. A Bruxelles, où le commissaire européen aux relations extérieures Chris Patten dit ne pas avoir été informé de ce projet, on prend ses distance et l’on rappelle que lundi, les ministre des Affaires étrangères des Quinze ont approuvé un texte affirmant que «la guerre n’est pas inévitable et tout doit être entrepris afin d’éviter un conflit armé». A Athènes, le Premier ministre Costas Simpitis, dont le pays préside actuellement l’Union, déplore une démarche «qui ne contribue pas à une approche commune» sur le dossier irakien.
Tonalité plus surprenante à Budapest où le Premier ministre Péter Medgessy, pourtant signataire de la lettre, assure qu’elle n’est pas dirigée contre le couple franco-allemand et indique que l’initiative en revient à Blair et Aznar. A Madrid, justement, des sources citées par l’AFP assurent que le véritable initiateur de la demarche n’est ni le chef du gouvernement britannique, ni son homologue espagnol, mais le Wall Street Journal, un quotidien américain proche des «faucons» de Washington. De là à penser que cette lettre commune n’a pas été pour le président américain une bien grande surprise, il n’y a qu’un pas que beaucoup, ce jeudi, n’hésitaient pas à franchir.
Coïncidence de date ou réplique ultra-rapide ? Ce même jeudi, le Parlement européen a adopté par 287 voix pour contre 209 une résolution dénonçant «toute action militaire unilatérale» en Irak et estimant qu’une «frappe préventive contreviendrait au droit international». Simultanément, l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui comprend les pays européens non membres de l’Union européenne a estimé, par 146 voix contre 7 que «le recours à la force ne serait pas justifié dans les circonstances actuelles».
Ce hiatus entre les gouvernements européens signataires de la lettre des «Huit» (sur 25 membres actuels ou futurs de l'UE) et leur opinion publique est encore plus manifeste à la lecture des sondages qui, selon les pays concernés, s’avère hostile à une intervention militaire hors du cadre de l’ONU dans des proportions variant de 60 à 80 % des personnes interrogées.
A écouter également :
Richard Corbett, député travailliste britannique et député européen au micro de Valérie Lehoux
(30/01/2003, 3 min 30)
La démonstration de solidarité franco-allemande de la semaine dernière à l’occasion des commémoration du Traité de l’Élysée s’était accompagnée de déclarations hostiles à la politique américaine qui ont vivement indisposé plusieurs gouvernements européens qui ne veulent pas voir la solidarité atlantique être rompue en ces temps de crise. C’est à l’évidence le cas du Britannique Tony Blair, mais également de l’Italien Silvio Berlusconi ou du Danois Anders Fogh Rasmussen. Voilà pour la «vieille Europe», pour reprendre les termes du secrétaire américain à la Défense Donald Rumsfeld. Quant aux nouveaux membres de l’Union européenne qui doivent la rejoindre en 2004, anciens satellites de l’Union soviétique, ils manifestent leur reconnaissance envers Washington de les avoir libérés de la domination soviétique par un pro-américanisme sans équivalent en Europe de l’Ouest.
Opposition des parlementaires et de l’opinion
George W. Bush ne s’y est pas trompé, qui a exprimé sa reconnaissance aux «Huit» et qui reçoit cette fin de semaine plusieurs dirigeants européens signataires de la lettre : José Maria Aznar, Silvio Berlusconi, et surtout, ce vendredi, Tony Blair pour ce qui s’apparente à un conseil de guerre. A Bruxelles, où le commissaire européen aux relations extérieures Chris Patten dit ne pas avoir été informé de ce projet, on prend ses distance et l’on rappelle que lundi, les ministre des Affaires étrangères des Quinze ont approuvé un texte affirmant que «la guerre n’est pas inévitable et tout doit être entrepris afin d’éviter un conflit armé». A Athènes, le Premier ministre Costas Simpitis, dont le pays préside actuellement l’Union, déplore une démarche «qui ne contribue pas à une approche commune» sur le dossier irakien.
Tonalité plus surprenante à Budapest où le Premier ministre Péter Medgessy, pourtant signataire de la lettre, assure qu’elle n’est pas dirigée contre le couple franco-allemand et indique que l’initiative en revient à Blair et Aznar. A Madrid, justement, des sources citées par l’AFP assurent que le véritable initiateur de la demarche n’est ni le chef du gouvernement britannique, ni son homologue espagnol, mais le Wall Street Journal, un quotidien américain proche des «faucons» de Washington. De là à penser que cette lettre commune n’a pas été pour le président américain une bien grande surprise, il n’y a qu’un pas que beaucoup, ce jeudi, n’hésitaient pas à franchir.
Coïncidence de date ou réplique ultra-rapide ? Ce même jeudi, le Parlement européen a adopté par 287 voix pour contre 209 une résolution dénonçant «toute action militaire unilatérale» en Irak et estimant qu’une «frappe préventive contreviendrait au droit international». Simultanément, l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui comprend les pays européens non membres de l’Union européenne a estimé, par 146 voix contre 7 que «le recours à la force ne serait pas justifié dans les circonstances actuelles».
Ce hiatus entre les gouvernements européens signataires de la lettre des «Huit» (sur 25 membres actuels ou futurs de l'UE) et leur opinion publique est encore plus manifeste à la lecture des sondages qui, selon les pays concernés, s’avère hostile à une intervention militaire hors du cadre de l’ONU dans des proportions variant de 60 à 80 % des personnes interrogées.
A écouter également :
Richard Corbett, député travailliste britannique et député européen au micro de Valérie Lehoux
(30/01/2003, 3 min 30)
par Olivier Da Lage
Article publié le 30/01/2003