Argentine
Un accord limité conclu avec le FMI
Il a fallu un an de négociations dominées par la méfiance et ponctuées de ruptures pour que le gouvernement du président Eduardo Duhalde et le Fonds monétaire international s’entendent sur un programme de huit mois n’impliquant pas l’octroi de nouveaux crédits.
De notre correspondant à Buenos Aires
Dit «de transition» parce qu’il ne couvre qu’une période de huit mois, contre deux ans en règle générale, l’accord auquel sont parvenus le Fonds monétaire international (FMI) et l’Argentine le 16 janvier ouvre la voie à la signature d’un programme «stand-by» qui permettra de rééchelonner quelque 11 milliards de dollars de dettes: 6,6 milliards, dus au Fonds, après approbation formelle de l’accord par le conseil d’administration de l’institution, qui se réunit le 23, plus 4,4 milliards, à payer à la Banque mondiale (BM) et à la Banque inter-américaine de développement (BID), ensuite. Il n’implique pas, ainsi qu’on l’avait déjà annoncé, l’octroi de nouveaux crédits.
Limité dans le temps et dans ses ambitions, cet accord apportera néanmoins une bouffée d’oxygène au gouvernement du président Eduardo Duhalde, lui évitant de se trouver en défaut avec les organismes multilatéraux un an après la cessation de paiements à l’égard des créanciers privés, tout en lui permettant de préserver ses réserves de change (près de 10 milliards de dollars). De ce fait, le risque d’un effondrement du peso face au dollar -et donc d’une relance de l’inflation– paraît écartée.
Et si l’Argentine respecte les engagements souscrits dans la lettre d’intention signée avec le FMI, notamment en matière budgétaire, avec un excédent primaire de 2,7 % du PIB, la reprise de l’activité que l’on observe depuis le milieu de l’an dernier pourrait déboucher sur un retour effectif de la croissance cette année. A cet égard, la lettre d’intention table sur un objectif de 3 %, mais des instituts privés vont jusqu’à prévoir un taux de 5 % (après, il est vrai, plus de quatre ans de récession).
Calendrier politique incertain
L’Argentine n’est pas tirée d’affaire pour autant. Si cet accord intérimaire permet à Eduardo Duhalde d’envisager avec une relative sérénité la fin de son mandat, il laisse à son successeur la plupart des problèmes de fond qui sont à l’origine de la crise argentine. Le nouveau président devant prendre ses fonctions le 25 mai prochain, il n’aura que trois mois pour s’entendre avec le FMI sur un programme économique à plus long terme, impliquant des réformes de structure en contrepartie, cette fois-ci, d’apports d’argent frais. Et la situation pourrait se compliquer plus encore si la Cour suprême n’acceptait pas l’avancement de l’élection à avril-mai et demandait le respect du calendrier originel, avec un scrutin en octobre et une passation en décembre. Or un tel scénario est tout sauf improbable.
Ce manque de prévisibilité de la politique argentine, ainsi qu’une certaine pusillanimité de dirigeants plus soucieux de survivre au jour le jour que d’affronter une tempête sans précédent, ont été des reproches permanents du FMI durant la négociation de l’accord. A contrario, l’équipe au pouvoir à Buenos Aires n’a cessé de dénoncer les revirements incessants, voire la mauvaise foi, du staff du Fonds. Ce climat lourd d’arrière-pensées explique pour une grande part qu’il ait fallu près d’un an de conversations ponctuées de ruptures pour un si maigre résultat.
De fait, les premiers contacts, en janvier 2001, se sont établis sur la base d’un gigantesque malentendu. Le ministre argentin de l’Economie de l’époque, Jorge Remes Lenicov était convaincu qu’il suffisait d’abandonner la parité peso-dollar, ainsi que le demandait le Fonds, pour être aidé par ce dernier. A peine avait-il dévalué qu’il annonçait des crédits de l’ordre de 25 milliards de dollars: de quoi soutenir la monnaie nationale et relancer l’activité. Mais rien n’est venu, la direction du FMI, à commencer par le directeur général Horst Köhler et son adjointe Anne Krueger entendant au contraire mettre en quarantaine un pays coupable de s’être déclaré unilatéralement en cessation de paiement une semaine plus tôt.
C’est tout le mérite de Roberto Lavagna, qui succède à Remes fin mai que de réorienter la négociation sur des base beaucoup plus réalistes, en renonçant rapidement à demander des nouveaux crédits. Après avoir songé à un accord de rééchelonnement de dix-huit mois à compter de juillet 2002, puis limité à l’année 2003, il a dû se contenter de huit mois. Non sans avoir tiré sur la corde en refusant de payer une échéance à la Banque mondiale mi-novembre, puis à la BID mercredi 15, en l’attente d’un décision favorable du FMI. Celui-ci a fini par céder, également pressé par le G 7, vingt-quatre heures avant que l’Argentine n’utilise sa dernière cartouche, en se déclarant en défaut avec le Fonds lui-même.
Dit «de transition» parce qu’il ne couvre qu’une période de huit mois, contre deux ans en règle générale, l’accord auquel sont parvenus le Fonds monétaire international (FMI) et l’Argentine le 16 janvier ouvre la voie à la signature d’un programme «stand-by» qui permettra de rééchelonner quelque 11 milliards de dollars de dettes: 6,6 milliards, dus au Fonds, après approbation formelle de l’accord par le conseil d’administration de l’institution, qui se réunit le 23, plus 4,4 milliards, à payer à la Banque mondiale (BM) et à la Banque inter-américaine de développement (BID), ensuite. Il n’implique pas, ainsi qu’on l’avait déjà annoncé, l’octroi de nouveaux crédits.
Limité dans le temps et dans ses ambitions, cet accord apportera néanmoins une bouffée d’oxygène au gouvernement du président Eduardo Duhalde, lui évitant de se trouver en défaut avec les organismes multilatéraux un an après la cessation de paiements à l’égard des créanciers privés, tout en lui permettant de préserver ses réserves de change (près de 10 milliards de dollars). De ce fait, le risque d’un effondrement du peso face au dollar -et donc d’une relance de l’inflation– paraît écartée.
Et si l’Argentine respecte les engagements souscrits dans la lettre d’intention signée avec le FMI, notamment en matière budgétaire, avec un excédent primaire de 2,7 % du PIB, la reprise de l’activité que l’on observe depuis le milieu de l’an dernier pourrait déboucher sur un retour effectif de la croissance cette année. A cet égard, la lettre d’intention table sur un objectif de 3 %, mais des instituts privés vont jusqu’à prévoir un taux de 5 % (après, il est vrai, plus de quatre ans de récession).
Calendrier politique incertain
L’Argentine n’est pas tirée d’affaire pour autant. Si cet accord intérimaire permet à Eduardo Duhalde d’envisager avec une relative sérénité la fin de son mandat, il laisse à son successeur la plupart des problèmes de fond qui sont à l’origine de la crise argentine. Le nouveau président devant prendre ses fonctions le 25 mai prochain, il n’aura que trois mois pour s’entendre avec le FMI sur un programme économique à plus long terme, impliquant des réformes de structure en contrepartie, cette fois-ci, d’apports d’argent frais. Et la situation pourrait se compliquer plus encore si la Cour suprême n’acceptait pas l’avancement de l’élection à avril-mai et demandait le respect du calendrier originel, avec un scrutin en octobre et une passation en décembre. Or un tel scénario est tout sauf improbable.
Ce manque de prévisibilité de la politique argentine, ainsi qu’une certaine pusillanimité de dirigeants plus soucieux de survivre au jour le jour que d’affronter une tempête sans précédent, ont été des reproches permanents du FMI durant la négociation de l’accord. A contrario, l’équipe au pouvoir à Buenos Aires n’a cessé de dénoncer les revirements incessants, voire la mauvaise foi, du staff du Fonds. Ce climat lourd d’arrière-pensées explique pour une grande part qu’il ait fallu près d’un an de conversations ponctuées de ruptures pour un si maigre résultat.
De fait, les premiers contacts, en janvier 2001, se sont établis sur la base d’un gigantesque malentendu. Le ministre argentin de l’Economie de l’époque, Jorge Remes Lenicov était convaincu qu’il suffisait d’abandonner la parité peso-dollar, ainsi que le demandait le Fonds, pour être aidé par ce dernier. A peine avait-il dévalué qu’il annonçait des crédits de l’ordre de 25 milliards de dollars: de quoi soutenir la monnaie nationale et relancer l’activité. Mais rien n’est venu, la direction du FMI, à commencer par le directeur général Horst Köhler et son adjointe Anne Krueger entendant au contraire mettre en quarantaine un pays coupable de s’être déclaré unilatéralement en cessation de paiement une semaine plus tôt.
C’est tout le mérite de Roberto Lavagna, qui succède à Remes fin mai que de réorienter la négociation sur des base beaucoup plus réalistes, en renonçant rapidement à demander des nouveaux crédits. Après avoir songé à un accord de rééchelonnement de dix-huit mois à compter de juillet 2002, puis limité à l’année 2003, il a dû se contenter de huit mois. Non sans avoir tiré sur la corde en refusant de payer une échéance à la Banque mondiale mi-novembre, puis à la BID mercredi 15, en l’attente d’un décision favorable du FMI. Celui-ci a fini par céder, également pressé par le G 7, vingt-quatre heures avant que l’Argentine n’utilise sa dernière cartouche, en se déclarant en défaut avec le Fonds lui-même.
par Jean-Louis Buchet
Article publié le 18/01/2003