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Irak

Colin Powell présente les «preuves» américaines

Le secrétaire d'État américain a présenté devant le Conseil de sécurité les «preuves» recueillies par les services de renseignement américains contre l'Irak.
«Je ne peux pas tout vous dire, mais ce que je peux partager avec vous est profondément troublant», a dit Colin Powell en débutant sa présentation, à l’invitation du président du Conseil de sécurité, l’Allemand Joschka Fischer, dont le pays s’oppose vigoureusement à toute guerre en Irak. A sa demande, l’ambassadeur irakien a également été convié à assister en observateur à la présentation du secrétaire d’État américain.

Colin Powell a commencé sa présentation en faisant écouter aux membres du Conseil la bande son d’une interception d’une communication téléphonique entre un militaire de terrain et le quartier général. Selon cet enregistrement, dont la traduction en anglais défilait sur l’écran, les chefs militaires demandaient aux hommes de terrain de nettoyer un site contenant des «munitions interdites». L’officier demandait ensuite à son interlocuteur de détruire les messages s’y rapportant. Pour Powell, c’est la preuve que «l'Irak avait, au plus haut niveau, une politique d'esquive et de tromperie».

Puis M. Powell a projeté des photos prises par satellites d’installations abritant selon lui des armements chimiques, la preuve en étant les dispositifs de sécurité caractéristiques de ce type d’installation. Ces photos ont été prises, a-t-il précisé, le 10 et le 22 novembre, c’est-à-dire après le retour des inspecteurs. Une autre photographie montre ce qu’il a présenté comme une usine de fabrication de missiles prise deux jours avant l’arrivée des inspecteurs. Une grue mobile stationne à l’extérieur, permettant d’emporter des missiles.

Pour le chef de la diplomatie américaine, les documents les plus compromettants ont été cachés par le régime au domicile des scientifiques irakiens pour que les inspecteurs ne puissent les trouver. Des scientifiques menacés de mort s’ils coopèrent avec les équipes de Hans Blix ou Mohammed El-Baradeï. Les inspecteurs sont en permanence sous la surveillance des services de renseignement irakiens, a-t-il ajouté.

L’Irak, a dit Powell, «s’est placé en situation d’encourir de sérieuses conséquences», le terme diplomatique signifiant l’usage de la force qui figure dans la résolution 1441. Pour lui l’Irak est en «violation patente» de ses obligations et faute de répondre à ce défi en décidant des «sérieuses conséquences» annoncées, l’ONU court le risque de se placer «hors jeu». «L’Irak ne doit pas avoir le bénéfice du doute», a ajouté Colin Powell.

Concernant les armements biologiques, l’Irak disposerait de la capacité de produire massivement le virus de la variole et modifie des réservoirs d’avions afin de les utiliser pour l’épandage d’armes chimiques ou bactériologiques, a poursuivi le secrétaire d’État américain. Les États-Unis évaluent à 100-500 tonnes le stock d’agents chimiques détenus par l’Irak. Pour tester ces armes, Saddam Hussein a utilisé des condamnés à mort comme cobayes humains: 1 600 d’entre eux ont été tués de cette façon.

«Saddam Hussein et son régime n’ont fait aucun effort pour désarmer, comme le lui demandait la communauté internationale». «Il est déterminé à mettre la main sur une bombe nucléaire», a averti Powell. De plus, a-t-il affirmé, l’Irak est lié avec les groupes terroristes, notamment Al Qaïda. Un lieutenant de Ben Laden, Abou Moussab Zarqaoui, qui dirige un réseau spécialisé dans la fabrication et l’utilisation d’explosifs et de poisons, avec des ramifications en Europe, dispose de camps dans le nord-est de l’Irak. Une vingtaine de membres d’Al Qaïda sont basés à Bagdad. L’ambassade d’Irak au Pakistan servait de liaison entre Bagdad et l’organisation d’Oussama Ben Laden.

L’Irak a raté son examen de la dernière chance, a conclu Colin Powell.


Après son intervention qui a duré 90 minutes, chacun des membres du conseil de sécurité avait sept minutes pour s’exprimer. Le ministre chinois des Affaires étrangères Tang Jiaxuan a appelé à donner davantage de temps aux inspecteurs pour éradiquer les armes de destruction massive irakiennes. Igor Ivanov, le ministre russe, a fait une demande identique. En revanche, le Britannique Jack Straw estime que le rapport qui sera présenté le 14 février sera le moment de décision pour le Conseil de sécurité. Pour la France, Dominique de Villepin, n’a pas exclu le recours à la force en dernier recours, mais il estime que l’on n’a pas encore exploré pleinement la voie des inspections dont il a appelé le renforcement.



Article publié le 05/02/2003