Politique française
Connivences entre politiques et journalistes ?
Dans son dernier ouvrage intitulé Bien entendu… c’est off et sous-titré Ce que les journalistes politiques ne racontent jamais, paru aux éditions Albin Michel, le journaliste politique Daniel Carton dénonce le système de connivences qui existe, selon lui, entre le monde politique et journalistique.
Dans cet ouvrage qui mêle tour à tour autobiographie, souvenirs, désillusions d’un métier dans lequel il s’est lancé «la fleur au fusil», Daniel Carton, ancien journaliste à la Voix du Nord, à La Croix, au Monde et au Nouvel Observateur, règle ses comptes avec les journalistes politiques dont il fut pourtant l’un des membres pendant de nombreuses années. «Un petit monde frappé de sclérose en plaques qui donne des leçons mais n’en tire jamais aucune», confesse-t-il, en préambule.
Visiblement déçu par les médias français et le journalisme de révérence qui y affère, il estime que la politique et la presse ont développé des «liaisons incestueuses», entretenues par des déjeuners, des dîners en ville, des invitations diverses et variées (place d’Opéra, places de théâtre… etc) ou les universités d’été des partis politiques, ces «ateliers de formation au copinage». Beaucoup de journalistes sont devenus des relais complaisants, voire serviles du pouvoir, écrit-il. Une complicité qui conduit, selon l’auteur, à une pratique dévoyée du «off» - à l’origine une confidence employée par les politiques mais ne devant pas être rapportée -, jusque dans la vie privée des hommes politiques, qualifiée cette fois-ci de «super-off».
Le tutoiement facile
Daniel Carton dénonce avec férocité mais aussi avec amertume les médias actuels qui ne sont plus capables ou ne veulent plus faire de l’investigation : «Le journaliste est devenu un travailleur de l’information. Avant, un bon journaliste était celui qu’on ne voyait jamais à la rédaction. Aujourd’hui, celui qui est absent de son poste de travail devient presque suspect», regrette-t-il. Bien décidé à partir en guerre contre des procédés journalistiques qu’il récuse mais qui sont pourtant entrés dans les mœurs, il distille des propos peu flatteurs pour une corporation dont il fit partie. Il déplore le tutoiement quasi institutionnalisé entre politiques et journalistes qui rend, selon lui, l’objectivité de ces derniers encore plus difficile que si le vouvoiement était de mise.
Mis à part une rancœur tenace affichée à l’égard de ses anciens confrères ou du moins pour leurs pratiques, Daniel Carton cite quelques exemples de leur dévoiement. Ainsi, il évoque Mazarine, secret de Polichinelle, «l’un des morceaux de choix des dîners en ville». «Que Mitterrand ait eu une jolie fille en dehors des liens sacrés du mariage n’intéressait personne ! A partir du moment où l’on sut que la petite fille et sa maman étaient logées dans un palais annexe de la République (…) était-il permis de se taire ?», s’interroge-t-il. Ou encore, «on n’a pas demandé davantage à Giscard, lors des dernières élections européennes de 1999. Une Mazarine pouvait-elle cacher un Mazarin ? Certains font courir l’histoire mais aucun n’a moufté», affirme-t-il. Dans la même veine, il s’insurge, au début de l’ouvrage, du sort qui lui a été réservé, lorsqu’il était au Nouvel Observateur, quand il a sorti une information sur Michel Rocard. Ce dernier aurait rencontré Jacques Chirac pour entrer dans le gouvernement Jospin en 1997. Une information qui sera publiée mais aussitôt démentie par l’hebdomadaire dont le directeur, Jean Daniel, est un proche de l’ancien Premier ministre socialiste. Une situation qui lui laissera un goût amer.
Jusqu’à aujourd’hui, personne n’avait encore jamais dévoilé ces liens qui unissent le monde politique et leurs représentants aux médias et à la presse parisienne en particulier. Cependant, une question subsiste : Pourquoi Daniel Carton a-t-il attendu de quitter son métier pour écrire ce livre ?
Ecouter également :
Daniel Carton au micro de Geneviève Goëtzinger (Livre politique du 19/01/2003, 4'48)
Visiblement déçu par les médias français et le journalisme de révérence qui y affère, il estime que la politique et la presse ont développé des «liaisons incestueuses», entretenues par des déjeuners, des dîners en ville, des invitations diverses et variées (place d’Opéra, places de théâtre… etc) ou les universités d’été des partis politiques, ces «ateliers de formation au copinage». Beaucoup de journalistes sont devenus des relais complaisants, voire serviles du pouvoir, écrit-il. Une complicité qui conduit, selon l’auteur, à une pratique dévoyée du «off» - à l’origine une confidence employée par les politiques mais ne devant pas être rapportée -, jusque dans la vie privée des hommes politiques, qualifiée cette fois-ci de «super-off».
Le tutoiement facile
Daniel Carton dénonce avec férocité mais aussi avec amertume les médias actuels qui ne sont plus capables ou ne veulent plus faire de l’investigation : «Le journaliste est devenu un travailleur de l’information. Avant, un bon journaliste était celui qu’on ne voyait jamais à la rédaction. Aujourd’hui, celui qui est absent de son poste de travail devient presque suspect», regrette-t-il. Bien décidé à partir en guerre contre des procédés journalistiques qu’il récuse mais qui sont pourtant entrés dans les mœurs, il distille des propos peu flatteurs pour une corporation dont il fit partie. Il déplore le tutoiement quasi institutionnalisé entre politiques et journalistes qui rend, selon lui, l’objectivité de ces derniers encore plus difficile que si le vouvoiement était de mise.
Mis à part une rancœur tenace affichée à l’égard de ses anciens confrères ou du moins pour leurs pratiques, Daniel Carton cite quelques exemples de leur dévoiement. Ainsi, il évoque Mazarine, secret de Polichinelle, «l’un des morceaux de choix des dîners en ville». «Que Mitterrand ait eu une jolie fille en dehors des liens sacrés du mariage n’intéressait personne ! A partir du moment où l’on sut que la petite fille et sa maman étaient logées dans un palais annexe de la République (…) était-il permis de se taire ?», s’interroge-t-il. Ou encore, «on n’a pas demandé davantage à Giscard, lors des dernières élections européennes de 1999. Une Mazarine pouvait-elle cacher un Mazarin ? Certains font courir l’histoire mais aucun n’a moufté», affirme-t-il. Dans la même veine, il s’insurge, au début de l’ouvrage, du sort qui lui a été réservé, lorsqu’il était au Nouvel Observateur, quand il a sorti une information sur Michel Rocard. Ce dernier aurait rencontré Jacques Chirac pour entrer dans le gouvernement Jospin en 1997. Une information qui sera publiée mais aussitôt démentie par l’hebdomadaire dont le directeur, Jean Daniel, est un proche de l’ancien Premier ministre socialiste. Une situation qui lui laissera un goût amer.
Jusqu’à aujourd’hui, personne n’avait encore jamais dévoilé ces liens qui unissent le monde politique et leurs représentants aux médias et à la presse parisienne en particulier. Cependant, une question subsiste : Pourquoi Daniel Carton a-t-il attendu de quitter son métier pour écrire ce livre ?
Ecouter également :
Daniel Carton au micro de Geneviève Goëtzinger (Livre politique du 19/01/2003, 4'48)
par Clarisse Vernhes
Article publié le 05/02/2003