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Côte d''Ivoire

Gbagbo absent du sommet France-Afrique

Le président ivoirien Laurent Gbagbo ne participera pas au sommet France-Afrique qui se tiendra à Paris du 20 au 21 février prochain «en raison de la situation de guerre que traverse le pays». Alors que le MPCI de Guillaume Soro poursuit son «offensive diplomatique» en Afrique de l’Ouest, et les deux autres mouvements rebelles ont pratiquement déjà lancé une nouvelle offensive militaire dans le Grand Ouest.
Contrairement à ce qui avait été annoncé la semaine dernière par Guy Penne, sénateur des Français de l’étranger, le président ivoirien ne se rendra pas à Paris, jeudi et vendredi prochains, pour assister au 22ème sommet France-Afrique. Son absence a été confirmée officiellement lundi après-midi par Toussaint Alain, conseiller du président ivoirien, qui a précisé que la délégation ivoirienne sera représentée au sommet «par le nouveau Premier ministre de réconciliation nationale Seydou Diarra et par l’actuel ministre des Affaires étrangères, Abou Drahamane Sangaré». Le tout nouveau Premier ministre Seydou Diarra tente toujours de constituer un gouvernement de réconciliation nationale qui, en vertu des accords de Marcoussis, devrait réunir toutes les parties, y compris les rebelles.

Dimanche, le ministre français des Affaires étrangères Dominique de Villepin avait déclaré que la France attendait la venue à Paris du président Gbagbo: «nous voulons croire que le président Gbagbo pourra venir à ce sommet France-Afrique, nous souhaitons qu’il vienne, en portant une solution car en politique, comme en diplomatie, la volonté, c’est la clé». Pour le ministre français «rien aujourd’hui n’empêche le président Gbagbo, tous les partis et le Premier ministre de constituer un gouvernement d’union nationale. La France a pris ses responsabilités, nous attendons que les Ivoiriens prennent les leurs», et permettent à la Côte d’Ivoire de «sortir de la crise».

Fakoly: «je voudrais réclamer l’indépendance de la Côte d’Ivoire»

Cette prise de position de Dominique de Villepin intervient après une semaine de «profil bas» de la part du gouvernement français, qui avait visiblement préféré ne plus intervenir directement ou indirectement dans la crise ivoirienne, au lendemain du sommet des chefs d’Etat de l’avenue Kléber (à Paris). A trois jours du sommet France-Afrique, il semble bien que le président Jacques Chirac compte réengager la France en Afrique, à commencer par le pays le plus important en Afrique occidentale.

Le signe le plus manifeste de ce réengagement est constitué par le déploiement de plus de 3 000 militaires français en Côte d’Ivoire, où, officiellement, ils doivent «sécuriser» la ligne de cessez-le-feu séparant les rebelles des loyalistes, en attendant le déploiement des «casques blancs» de la CEDEAO, mais aussi assurer la sécurité des ressortissants français et étrangers. Cette intervention est parfois critiquée, du côté d’Abidjan comme de Bouaké, et, vendredi dernier, le rastaman ivoirien Tiken Jah Fakoly, lors de la cérémonie des Victoires de Paris a directement interpellé la France depuis la scène du Zénith de Paris: «Je voudrais profiter de l’occasion pour faire une petite critique. Elle concerne une chose: quand on se réveille en Afrique, quand on voit des bases françaises de l’armée après 40 ans d’indépendance, j’avoue qu’on a mal. Je voudrais réclamer l’indépendance de la Côte d’Ivoire». De son côté la France de Jacques Chirac et de Dominique de Villepin récuse l’idée d’une ingérence, et fait valoir que cette intervention vise uniquement «à empêcher un bain de sang».

De leur côté les rebelles ont confirmé ce week-end leurs divisions quant à la stratégie à suivre, en attendant la formation du gouvernement. D’un côté le MPCI - qui contrôle le Nord du pays - a largement atténué lundi la portée de l’ultimatum lancé le 9 février dernier et arrivé à échéance dans la nuit de dimanche à lundi: «Nous avons suspendu l’ultimatum pendant la tournée dans des capitales ouest-africaines qu’est en train de faire le secrétaire général Guillaume Soro, a déclaré le colonel Michel Gueu, avant d’ajouter: tout le monde doit rester à l’écoute. A tout moment ça peut rebondir». Des propos confirmés aussitôt par l’adjudant Tuo Fozié, qui a estimé que la menace lancée par le MPCI n’était pas un «véritable ultimatum». Plusieurs responsables du MPCI ont exclu en fait l’éventualité d’une offensive militaire à court terme, préférant continuer «l’offensive diplomatique» en cours.

Il en va tout autrement des deux autres mouvements rebelles, le MPIGO et le MJP, qui contrôlent en partie l’Ouest du pays. Ceux-ci n’ont pas pris part aux discussions d’Accra (Ghana) sur la formation du gouvernement, et ne cachent pas leur intention de reprendre l’offensive militaire et de «descendre à Abidjan et à San Pedro». Alors que de nouveaux combats étaient signalés ce lundi dans l’Ouest, non loin de la frontière libérienne.



par Elio  Comarin

Article publié le 17/02/2003