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Union européenne

Les Quinze donnent une dernière chance à l’Irak

A Bruxelles, les quinze chefs d’État admettent le recours à la force en dernier ressort, mais veulent donner du temps aux inspecteurs.
Ravalement de façade davantage qu’un accord profond, sans doute, mais sur le papier du moins, l’unité européenne est sauve. Les deux camps en présence peuvent retrouver dans la déclaration commune publiée à l’issue du sommet de quoi satisfaire leur amour-propre : Britanniques, Espagnols, Danois et Italiens ont réussi à insérer un passage affirmant que le régime irakien sera «seul responsable des conséquences s’il continue à se jouer de ce que veut la communauté internationale et ne saisit pas cette dernière chance» pour désarmer. L’usage de la force est expressément mentionné, mais comme «dernier recours».

Voilà de quoi combler Français, Allemands et Belges qui sont parvenu à faire figurer dans la déclaration des Quinze la phrase : «la guerre n’est pas inévitable», chère à Jacques Chirac et Gerhardt Schröder et à faire réaffirmer la primauté du Conseil de sécurité de l’ONU : «Nous tenons à ce que les Nations unies demeurent au centre de l’ordre international. Nous reconnaissons que c’est au Conseil de sécurité qu’il incombe au premier chef de traiter du désarmement de l’Irak». Ce n’est pas tout à fait ce que voulaient les Britanniques qui, tout en exprimant sans ambiguïté leur préférence pour une action dans le cadre de l’ONU, n’ont jamais exclu qu’une intervention militaire puisse se produire en dehors en cas de «veto déraisonnable». De la France, par exemple.

Le plaidoyer de Kofi Annan pour l’ONU

Il n’en demeure pas moins que l’accord intervenu à Bruxelles était loin d’être acquis lorsque la présidence grecque a convoqué ce sommet extraordinaire. Plusieurs facteurs expliquent cette évolution :

- Le rapport plutôt positif d’Hans Blix et Mohammed El-Baradeï dzevant le Conseil de sécurité.
- Le déroulement de la séance du Conseil de sécurité du 14 février qui a démontré qu’il existait en son sein une forte majorité en faveur de la poursuite des inspections.
- Les manifestations contre la guerre de samedi 15, particulièrement impressionnantes dans les capitales des pays soutenant la position américaine, à savoir l’Espagne, la Grande Bretagne et l’Italie.

Par ailleurs, l’invitation au sommet européen de Kofi Annan, qui, devant les Quinze, a plaidé pour le rôle de l’ONU, soulignant que jusqu’à ce jour, le Conseil de sécurité n’avait pas décidé d’interrompre les inspections ni n’avait constaté de «violation patente» de la part de l’Irak, a fortement pesé sur les indécis, et ébranlé la stratégie des plus résolus comme le Britannique Tony Blair. Enfin, l’absence des dix pays candidats à l’adhésion, dont la position résolument pro-américaine a mis en colère la France et l’Allemagne, a affaibli la position de Londres et de Madrid, d’autant qu’on dit l’Italien Berlusconi ébranlé par la manifestation monstre de Rome samedi dernier.

Jacques Chirac a d’ailleurs eu des mots fort peu diplomatiques à l’encontre des pays de l’Est candidats à l’adhésion, membres du Groupe de Vilnius, estimant qu’«ils avaient manqué une bonne occasion de se taire» et qu’ils se sont montrés «pas très bien élevés» menaçant à demi-mot de retarder l’admission de pays comme la Bulgarie ou la Roumanie.

A Londres, ce mardi matin, la presse estime dans son ensemble que Tony Blair est «virtuellement isolé» en Europe (Mirror) et que Chirac l’a attiré dans une embuscade (Daily Mail) tandis que le Guardian estime que Paris «a anéanti les mince espoirs que l’Europe serait capable de faire la soudure entre ceux qui soutiennent la rhétorique américaine et ceux qui demandent plus de temps pour les inspections». C’est pourtant l’exercice périlleux auquel le communiqué commun a tenté de se livrer.

Ecouter également :

Noël Mamère, député Vert
Invité de Pierre Ganz, 18/02/2003, 8mn 10



par Olivier  Da Lage

Article publié le 18/02/2003