Congo démocratique
Le grand marchandage
C’est la dernière ligne droite, en principe, pour le dialogue inter-congolais. Un ultime round de négociations s’est ouvert le 25 février à Pretoria, pour finaliser l’accord de paix signé le 17 décembre dernier. Il ne s’agit pas de régler quelques détails, mais d’élaborer une nouvelle Constitution, de nommer un gouvernement d’unité nationale, de planifier l’intégration des forces armées et de décider de mesures de sécurité pour l’installation à Kinshasa des chefs des mouvements rebelles.
Le gouvernement de Kinshasa, les mouvements rebelles, les partis politiques, la société civile et les milices maï-maï: toutes les parties en présence travaillent en comité sur ces différentes questions. Elles devraient remettre le 3 mars prochain leurs rapports aux deux médiateurs, le Sénégalais Moustapha Niasse, envoyé spécial des Nations unies en République démocratique du Congo (RDC), et Sydney Mufamadi, le ministre sud-africain des Collectivités locales. Ces derniers convoqueront une séance plénière le 5 mars, et espèrent donner le coup d’envoi à une période de transition de deux ans. Transition censée mener à des élections, pour mettre une fin à cinq ans d’une guerre qui a fait deux millions et demi de morts.
Les médiateurs nourrissent de bons espoirs. Ils reposent en partie sur la bonne volonté montrée par le président congolais, Joseph Kabila, puisque l’homme fort de Kinshasa s’est déclaré prêt à partager le pouvoir «fin mars, début avril». Quoi qu’il en soit, la tâche s’annonce ardue. De fait, les interlocuteurs congolais ont transformé leur dialogue en véritable marchandage. Le principe est acquis d’une formule de partage du pouvoir baptisée «1+4». Elle devrait voir Joseph Kabila conserver la présidence, aux côtés de quatre vice-présidents issus des différentes forces en présence: un pour le gouvernement, un pour le Mouvement de libération du Congo (MLC), mouvement rebelle soutenu par l’Ouganda, un pour le Ralliement congolais pour la démocratie (RCD), rébellion soutenue par le Rwanda, et un pour l’opposition dite «politique», parce que non armée.
Aujourd’hui, les tractations ne portent pas seulement sur les postes ministériels et les sièges de gouverneur et vice-gouverneur de provinces. Elles vont jusqu’à la direction de chaque société nationale, présupposant un partage bien orchestré du pouvoir, mais aussi la mise en coupe réglée des ressources du pays. Un principe que refuse Joseph Kabila, mais qui ne semble pas poser problème à tous. «Il y aurait un déséquilibre si une seule composante du gouvernement devait avoir le contrôle des entreprises publiques», estime notamment un représentant de la société civile présent à Pretoria.
Casse-tête congolais
Le partage mathématique du pouvoir pose aussi comme principe «la distribution équilibrée» de 36 postes ministériels et de 22 postes de vice-ministre. Après la fameuse formule du «1+4», c’est le «6+3» qui se trouve au cœur des débats. Car, au final, six ministres et trois vice-ministres pourraient être nommés respectivement par le gouvernement de Kinshasa, le MLC, le RCD, l’opposition politique et la société civile, le solde incombant à trois «petits» mouvements armés.
Comme en décembre, c’est le MLC qui pose le plus de conditions, et de problèmes. «Il est impératif, a affirmé son chef Jean-Pierre Bemba à l’ouverture des pourparlers, que nous trouvions des solutions aux questions restées en suspens depuis l’accord de paix de Pretoria». Malgré ces déclarations de bonnes intentions, le MLC dispute à Joseph Kabila les postes-clés de l’Intérieur et des Finances. Il revendique aussi les Infrastructures, les Mines, la Jeunesse et les sports ainsi que la Justice –malgré la responsabilité des crimes atroces, cannibalisme inclus, qui lui a été imputée par les Nations unies.
Le mouvement de Jean-Pierre Bemba convoite en outre la présidence de l’Assemblée nationale. Il estime que le président Joseph Kabila, avec l’un des quatre vice-présidents issu de ses propres rangs, verrait déjà la balance pencher en sa faveur. Le MLC aurait par ailleurs exigé, pour l’intégration de l’armée, des quotas «égalitaires» pour chaque force en présence. Pour Moustapha Niasse, le casse-tête congolais ne se limite pas à l’absence de tout autre fondement politique à la transition que le partage du pouvoir et des richesses. Tout peut déraper jusqu’au dernier moment. A chaque réunion précédente du dialogue inter-congolais, les accords ont été obtenus «à l’arraché». Discutés tout au long de la semaine, ils ont systématiquement été remis en question à la dernière minute par l’une des forces en présence.
Les médiateurs nourrissent de bons espoirs. Ils reposent en partie sur la bonne volonté montrée par le président congolais, Joseph Kabila, puisque l’homme fort de Kinshasa s’est déclaré prêt à partager le pouvoir «fin mars, début avril». Quoi qu’il en soit, la tâche s’annonce ardue. De fait, les interlocuteurs congolais ont transformé leur dialogue en véritable marchandage. Le principe est acquis d’une formule de partage du pouvoir baptisée «1+4». Elle devrait voir Joseph Kabila conserver la présidence, aux côtés de quatre vice-présidents issus des différentes forces en présence: un pour le gouvernement, un pour le Mouvement de libération du Congo (MLC), mouvement rebelle soutenu par l’Ouganda, un pour le Ralliement congolais pour la démocratie (RCD), rébellion soutenue par le Rwanda, et un pour l’opposition dite «politique», parce que non armée.
Aujourd’hui, les tractations ne portent pas seulement sur les postes ministériels et les sièges de gouverneur et vice-gouverneur de provinces. Elles vont jusqu’à la direction de chaque société nationale, présupposant un partage bien orchestré du pouvoir, mais aussi la mise en coupe réglée des ressources du pays. Un principe que refuse Joseph Kabila, mais qui ne semble pas poser problème à tous. «Il y aurait un déséquilibre si une seule composante du gouvernement devait avoir le contrôle des entreprises publiques», estime notamment un représentant de la société civile présent à Pretoria.
Casse-tête congolais
Le partage mathématique du pouvoir pose aussi comme principe «la distribution équilibrée» de 36 postes ministériels et de 22 postes de vice-ministre. Après la fameuse formule du «1+4», c’est le «6+3» qui se trouve au cœur des débats. Car, au final, six ministres et trois vice-ministres pourraient être nommés respectivement par le gouvernement de Kinshasa, le MLC, le RCD, l’opposition politique et la société civile, le solde incombant à trois «petits» mouvements armés.
Comme en décembre, c’est le MLC qui pose le plus de conditions, et de problèmes. «Il est impératif, a affirmé son chef Jean-Pierre Bemba à l’ouverture des pourparlers, que nous trouvions des solutions aux questions restées en suspens depuis l’accord de paix de Pretoria». Malgré ces déclarations de bonnes intentions, le MLC dispute à Joseph Kabila les postes-clés de l’Intérieur et des Finances. Il revendique aussi les Infrastructures, les Mines, la Jeunesse et les sports ainsi que la Justice –malgré la responsabilité des crimes atroces, cannibalisme inclus, qui lui a été imputée par les Nations unies.
Le mouvement de Jean-Pierre Bemba convoite en outre la présidence de l’Assemblée nationale. Il estime que le président Joseph Kabila, avec l’un des quatre vice-présidents issu de ses propres rangs, verrait déjà la balance pencher en sa faveur. Le MLC aurait par ailleurs exigé, pour l’intégration de l’armée, des quotas «égalitaires» pour chaque force en présence. Pour Moustapha Niasse, le casse-tête congolais ne se limite pas à l’absence de tout autre fondement politique à la transition que le partage du pouvoir et des richesses. Tout peut déraper jusqu’au dernier moment. A chaque réunion précédente du dialogue inter-congolais, les accords ont été obtenus «à l’arraché». Discutés tout au long de la semaine, ils ont systématiquement été remis en question à la dernière minute par l’une des forces en présence.
par Sabine Cessou
Article publié le 01/03/2003