Irak
Veto, mode d’emploi
Loin d’être une exception et contrairement à ce que pourraient laisser comprendre les débats autour de la crise irakienne, le veto fait partie de la vie ordinaire de l’ONU puisqu’il a été utilisé plus de 250 fois depuis la création de l’organisation internationale en 1946. Les membres permanents du Conseil de sécurité y ont eu recours lors de crises internationales ou parfois tout simplement pour protéger leurs intérêts. Les inquiétudes sont certes nombreuses sur l’avenir des Nations unies après un éventuel veto de la France à une nouvelle résolution ouvrant la voie à une intervention militaire en Irak. Mais de nombreux analystes estiment que l’organisation devrait se relever de cette nouvelle crise.
Curieusement et contre toute attente, le terme veto n’existe pas dans la charte des Nations unies. Et pour qu’une résolution soit adoptée il est juste précisé que neuf des quinze membres du Conseil de sécurité doivent voter pour et aucun des cinq membres permanents ne doit s’y opposer. Ce droit de bloquer une décision en votant non a souvent été critiqué, de nombreux pays estimant qu’il discréditait les Nations unies. Et de fait l’Union soviétique, qui à elle seule totalise près de la moitié des votes négatifs au Conseil de sécurité, l’a souvent utilisé uniquement pour protester contre le refus américain d’accueillir les républiques soviétiques au sein des Nations unies. Premier représentant de l’URSS à l’ONU, Andreï Gromyko a même été surnommé «Monsieur Niet». Depuis l’éclatement de l’Union soviétique en 1991, la Russie n’a toutefois utilisé un vote négatif que deux fois, l’un pour bloquer une résolution critiquant le refus des Serbes de Bosnie d’autoriser l’accès du Haut commissariat des Nations unies à Bihac et l’autre pour empêcher le financement d’une mission de l’ONU à Chypre.
Avec 76 votes négatifs au Conseil de sécurité, les Etats-Unis sont le deuxième pays à avoir largement utilisé ce que certains qualifient d’arme diplomatique absolue. Mais curieusement le premier veto américain date de 1970, soit 24 ans après la création de l’ONU. Il visait à soutenir le vote négatif de Londres sur la Rhodésie (actuellement Zimbabwe). Depuis, Washington a souvent utilisé son droit de veto de façon solitaire, principalement pour empêcher des résolutions condamnant ou contraignant l’Etat d’Israël. Sept des neuf derniers vetos brandis au Conseil de sécurité l’ont ainsi été par les Etats-Unis afin de bloquer six résolutions condamnant le gouvernement israélien. En décembre dernier, les Etats-Unis avait notamment empêché un texte dénonçant l’Etat hébreu après la mort dans les territoires occupés palestiniens de plusieurs employés de l’ONU tués par l’armée israélienne. Cette résolution avait pourtant fait l’unanimité au Conseil de sécurité, hormis les Etats-Unis.
La Grande-Bretagne qui totalise 32 votes négatifs n’a utilisé que 9 fois son veto en solitaire, essentiellement en ce qui concerne la situation dans l’ancienne Rhodésie. Londres a souvent voté en concertation avec Washington et mis à part l’épisode de la crise de Suez de 1956 lorsque Français et Britanniques ont opposé leur veto à une résolution condamnant leur expédition militaire, la diplomatie britannique s’est pratiquement toujours alignée sur les positions américaines.
Pékin s’abstient souvent mais s’oppose rarement
Si la France s’oppose à une nouvelle résolution sur l’Irak, elle utilisera son veto pour la dix-neuvième fois. Paris, qui prône le consensus, n’a que rarement opposé en solitaire un vote négatif à une proposition du Conseil de sécurité. Elle l’a fait à deux reprises, en 1947 pour bloquer une résolution australo-chinoise sur l’Indonésie et en 1976 pour s’opposer aux revendications comoriennes sur Mayotte. Les vetos français ont donc pour la plupart été partagés avec les Américains ou les Britanniques. La menace de Paris de voter contre une résolution ouvrant la voie à la guerre aura-t-elle des conséquences sur l’avenir des Nations unies ? Ceux qui tentent d’obtenir un consensus au Conseil de sécurité sur la crise irakienne l’affirment. D’autres estiment au contraire que l’organisation internationale survivra à ces tensions, relevant notamment que la guerre en Irak, au-delà du vote français, a divisé d’ores et déjà l’ONU dans son ensemble.
Paradoxalement et malgré son poids politique et démographique, la Chine n’a usé de son droit de veto que très modérément, cinq fois en un demi-siècle. Entre 1946 et 1971, Taïwan qui occupait le siège de la Chine a ainsi utilisé un vote négatif pour empêcher l’admission à l’ONU de la Mongolie. En 1972, Pékin l’a utilisé pour les mêmes raisons mais contre le Bangladesh. La Chine s’est rangée la même année et pour la seule fois aux côtés de l’Union soviétique pour bloquer une résolution sur le Moyen-Orient. Les deux autres vetos chinois ont été opposés moins pour des raisons politiques que pour des raisons de frais de fonctionnement des Nations unies. Ils ont servi en 1997 à bloquer l’envoi d’une mission d’observation de cessez-le-feu au Guatemala et en 1999 à limiter le mandat d’une mission de l’ONU en Macédoine.
Avec 76 votes négatifs au Conseil de sécurité, les Etats-Unis sont le deuxième pays à avoir largement utilisé ce que certains qualifient d’arme diplomatique absolue. Mais curieusement le premier veto américain date de 1970, soit 24 ans après la création de l’ONU. Il visait à soutenir le vote négatif de Londres sur la Rhodésie (actuellement Zimbabwe). Depuis, Washington a souvent utilisé son droit de veto de façon solitaire, principalement pour empêcher des résolutions condamnant ou contraignant l’Etat d’Israël. Sept des neuf derniers vetos brandis au Conseil de sécurité l’ont ainsi été par les Etats-Unis afin de bloquer six résolutions condamnant le gouvernement israélien. En décembre dernier, les Etats-Unis avait notamment empêché un texte dénonçant l’Etat hébreu après la mort dans les territoires occupés palestiniens de plusieurs employés de l’ONU tués par l’armée israélienne. Cette résolution avait pourtant fait l’unanimité au Conseil de sécurité, hormis les Etats-Unis.
La Grande-Bretagne qui totalise 32 votes négatifs n’a utilisé que 9 fois son veto en solitaire, essentiellement en ce qui concerne la situation dans l’ancienne Rhodésie. Londres a souvent voté en concertation avec Washington et mis à part l’épisode de la crise de Suez de 1956 lorsque Français et Britanniques ont opposé leur veto à une résolution condamnant leur expédition militaire, la diplomatie britannique s’est pratiquement toujours alignée sur les positions américaines.
Pékin s’abstient souvent mais s’oppose rarement
Si la France s’oppose à une nouvelle résolution sur l’Irak, elle utilisera son veto pour la dix-neuvième fois. Paris, qui prône le consensus, n’a que rarement opposé en solitaire un vote négatif à une proposition du Conseil de sécurité. Elle l’a fait à deux reprises, en 1947 pour bloquer une résolution australo-chinoise sur l’Indonésie et en 1976 pour s’opposer aux revendications comoriennes sur Mayotte. Les vetos français ont donc pour la plupart été partagés avec les Américains ou les Britanniques. La menace de Paris de voter contre une résolution ouvrant la voie à la guerre aura-t-elle des conséquences sur l’avenir des Nations unies ? Ceux qui tentent d’obtenir un consensus au Conseil de sécurité sur la crise irakienne l’affirment. D’autres estiment au contraire que l’organisation internationale survivra à ces tensions, relevant notamment que la guerre en Irak, au-delà du vote français, a divisé d’ores et déjà l’ONU dans son ensemble.
Paradoxalement et malgré son poids politique et démographique, la Chine n’a usé de son droit de veto que très modérément, cinq fois en un demi-siècle. Entre 1946 et 1971, Taïwan qui occupait le siège de la Chine a ainsi utilisé un vote négatif pour empêcher l’admission à l’ONU de la Mongolie. En 1972, Pékin l’a utilisé pour les mêmes raisons mais contre le Bangladesh. La Chine s’est rangée la même année et pour la seule fois aux côtés de l’Union soviétique pour bloquer une résolution sur le Moyen-Orient. Les deux autres vetos chinois ont été opposés moins pour des raisons politiques que pour des raisons de frais de fonctionnement des Nations unies. Ils ont servi en 1997 à bloquer l’envoi d’une mission d’observation de cessez-le-feu au Guatemala et en 1999 à limiter le mandat d’une mission de l’ONU en Macédoine.
par Mounia Daoudi
Article publié le 13/03/2003