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Francophonie

Afrique : des Etats généraux pour relancer le français

Quel français enseigner ? Dans quelle école, avec quels enseignants ? Comment concilier le français et les langues nationales en Afrique ? A Libreville, au Gabon, du 17 au 20 mars 2003, les premiers Etats généraux de l’enseignement du français en Afrique subsaharienne francophone vont essayer de répondre à ces questions et proposer des solutions.
De notre envoyé spécial à Libreville

Sur les hauteurs de Libreville, la capitale gabonaise, le Palais des Congrès de la Cité de la démocratie a pris des allures de ruche francophone. Au cœur d’une vaste étendue de verdure équatoriale, quelque 600 participants venus de tout le continent africain sont réunis pour se pencher sur le présent et l’avenir du français en Afrique : instituteurs, professeurs, linguistes, décideurs, professionnels de la communication et de l’édition, élèves et parents d’élèves.

Durant quatre jours, de tables rondes en forums, d’ateliers débats en conférences, l’enseignement du français en Afrique francophone sera ausculté, passé au crible, examiné sous toutes les coutures en vue d’établir un diagnostic et un traitement.
Le français est-il malade ? Est-il menacé par l’anglais ? Par les langues régionales ? Son enseignement est-il adapté aux réalités africaines ? A la diversité culturelle dont la Francophonie s’est fait le chantre ? Faut-il changer les méthodes de son apprentissage ? A l’issue des travaux, le constat et les propositions seront consignés dans un Livre blanc.

«Les langues sont mortelles»

Organisés par l’Agence internationale de la Francophonie (AIF) avec la Fédération internationale des professeurs de français (FIPF) et l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), ce grand rendez-vous culminera le 20 mars avec la Journée internationale de la Francophonie et avec la venue à Libreville d’Abdou Diouf, le secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), dont ce sera la première grande intervention depuis qu’il a succédé à Boutros Boutros Ghali à l’automne dernier lors du sommet de Beyrouth.

Parallèlement à ces Etats généraux se tiendra une réunion des ministres de l’Education des seize pays d’Afrique subsaharienne francophone (où le français est langue officielle et langue d’enseignement : Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Congo, Côte d’Ivoire, Gabon, Guinée, Mali, Niger, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Tchad et Togo). Cet afflux de personnalités révèle l’importance accordée à l’événement par l’ensemble des acteurs de la Francophonie.

Il faut dire, et l’immense majorité des délégués présents à Libreville en sont d’accord, que loin d’être une simple question linguistique, même importante, l’acquisition de la langue conditionne non seulement la maîtrise de toutes les disciplines, mais aussi le développement et la démocratie. Voire la possibilité de maîtriser les excès de la mondialisation. «On ne peut plus dissocier les problématiques de l’éducation et du développement, a déclaré Roger Dehaybe, administrateur général de l’AIF, sous des applaudissements nourris. Que signifient des élections dites démocratiques dans un pays qui compte plus de 50% d’analphabètes ?»

Il n’est pas question, toutefois, de considérer le français comme une langue qui s’imposerait, de façon uniforme et selon des schémas préétablis, à toutes les cultures. Rappelant, quoique sans emphase, que «les langues sont mortelles», le Premier ministre gabonais Jean-François Ntoutoume Emane a insisté sur la «nécessité de veiller à ce que l’enseignement de la langue française, ce formidable instrument de communication, se fasse en accord avec les différentes réalités socio-linguistiques». C’est pourquoi la réflexion sur l’Afrique entamée à Libreville se poursuivra pour les autres régions de l’espace francophone : Moyen-Orient, Afrique du Nord, Europe centrale et orientale, Océan Indien.



par Philippe  Quillerier-Lesieur

Article publié le 18/03/2003