Irak
Consensus minimal sur l’humanitaire
L’Onu refait surface dans l’urgence humanitaire et dans la perspective de l’après-guerre. L’Europe des Quinze aussi qui tente de remiser ses divisions en se «tournant vers l’avenir». La Turquie ouvre son espace aérien aux Etats-Unis mais décide d’intervenir militairement sans eux en Irak. Un développement inquiétant mais pas inattendu pour Washington qui poursuit ses campagnes militaire et diplomatique, mais aussi financière avec notamment le gel des avoirs financiers du régime de Saddam Hussein.
Les premiers soldats britanniques, des fusiliers-marins, sont officiellement au combat sur le champ de bataille irakien comme l’a solennellement annoncé le Premier ministre Tony Blair jeudi soir pour «chasser du pouvoir Saddam Hussein et débarrasser l’Irak de ses armes de destructions massives». Malgré ses divisions sur la question et sur la méthode, le Conseil européen a adopté jeudi soir à Bruxelles un texte commun sur l’Irak en contournant les sujets qui fâchent et en remettant la balle dans le camp de l’Onu. «Le déclenchement du conflit nous place devant une situation nouvelle», écrivent les Quinze. Il s’agit désormais de relever les «défis communs» à venir. En la matière, l’UE réaffirme son attachement à «l’intégrité territoriale, à la souveraineté, à la stabilité politique et au désarmement intégral et effectif de l’Irak» ainsi qu’au respect des minorités. Et partisans ou adversaires de la guerre, les Quinze veulent «contribuer efficacement à créer des conditions qui permettront à tous les Irakiens de vivre dans la liberté et la prospérité sous l’autorité d’un gouvernement représentatif».
Le Français Jacques Chirac et le Britannique Tony Blair partagent l’idée que «les Nations unies doivent continuer à jouer un rôle essentiel pendant et après la crise actuelle». Ils demandent de concert que le Conseil de sécurité donne à l’Onu «un mandat ferme» pour mettre en œuvre sa «capacité de coordination de l’assistance aux Etats sortant de conflits». Ils appuient la volonté onusienne d’une relance du programme «pétrole contre nourriture» qui assurait la survie de 60% des Irakiens avant d’être suspendu le 17 mars, au départ des équipes de l’Onu. Depuis, les organismes humanitaires prophétisent une catastrophe et jeudi, le secrétaire général Kofi Annan a demandé au Conseil de sécurité le feu vert pour sa relance, même si, écrit-il, la responsabilité humanitaire des 26 millions d’Irakiens incombe en premier lieu à «l’autorité exerçant le contrôle effectif du pays», à savoir les éventuels tombeurs américains de Saddam Hussein. En attendant, le bureau de l’Onu pour les affaires humanitaires prépare un appel à une aide d’urgence de plus d’un milliard de dollars en faveur de l’Irak.
L’hypothèque turque
Le retour de l’Onu par le portillon humanitaire prélude de ses futures responsabilités, lorsque viendra l’heure d’administrer et de reconstruire l’Irak. L’idée d’une tutelle onusienne paraît écartée. En revanche, le multilatéralisme de l’Onu a tout pour plaire des deux côtés de l’Atlantique quand il s’agira de légitimer et de financer un nouvel Irak. Pour sa part, Washington a déjà entrepris d’alimenter un fonds grâce à des pouvoirs spéciaux pour saisir 1,74 milliards de dollars d’avoirs irakiens aux Etats-Unis, selon le secrétaire américain au Trésor, John Snow. «Une offensive financière contre le régime de Saddam Hussein», complétée jeudi par un appel international à «trouver, geler et rendre l’argent irakien au peuple irakien et à son avenir», faute de quoi les Etats-Unis se réservent «le droit de prendre des mesures de rétorsion…y compris l’interdiction de l’accès au système financier international» ce qui n’a pas empêché un niet immédiat Moscou.
Parallèlement à cette diplomatie du portefeuille, Washington se réclame d’une coalition militaire «plus vaste» que celle de la guerre de 1991. Les Etats-Unis citent 33 pays soutenant l’invasion de l’Irak. Parmi eux, aucun pays arabe, contrairement à 1991, et surtout, aujourd’hui, seuls la Grande-Bretagne et l’Australie ont des combattants sur le champ de bataille au côté des Etats-Unis. Dix pays ont envoyés des équipes médicales ou spécialisées dans la décontamination. Les autres ont officialisé leur soutien diplomatique à l’opération militaire américaine et pour quelques-uns accordé le droit d’utilisation de bases militaires ou un droit de survol de leur territoire. La Turquie est le dernier en date.
Ankara a finalement accepté jeudi d’ouvrir son espace aérien à Washington mais pas la liberté de mouvement sur son territoire des soldats américains répartis dans plusieurs bases militaires en Turquie. Et surtout, en même temps, le Parlement turc a décidé l’envoi de soldats turcs au nord de l’Irak. La Turquie veut s’assurer que les Kurdes d’Irak ne saisiront pas l’occasion de la guerre pour proclamer une indépendance qui menacerait de faire tache d’huile sur son propre territoire où vivent 10 millions de Kurdes. Washington a toutes les raisons de craindre un déploiement turc «unilatéral» dans le Nord irakien. Bruxelles aussi. Et les Quinze n’ont pas manqué jeudi de s’inquiéter de la stabilité régionale dans leur déclaration sur l’Irak qui invite «tous les pays de la région à s’abstenir d’action susceptible d’accroître l’instabilité». Enfin, au chapître international de leur texte commun, ils se déclarent «résolus à renforcer la capacité de l’Union européenne» en matière de sécurité commune et ils s’affirment tous «convaincus qu’ils nous faut renforcer le partenariat transatlantique».
Le Français Jacques Chirac et le Britannique Tony Blair partagent l’idée que «les Nations unies doivent continuer à jouer un rôle essentiel pendant et après la crise actuelle». Ils demandent de concert que le Conseil de sécurité donne à l’Onu «un mandat ferme» pour mettre en œuvre sa «capacité de coordination de l’assistance aux Etats sortant de conflits». Ils appuient la volonté onusienne d’une relance du programme «pétrole contre nourriture» qui assurait la survie de 60% des Irakiens avant d’être suspendu le 17 mars, au départ des équipes de l’Onu. Depuis, les organismes humanitaires prophétisent une catastrophe et jeudi, le secrétaire général Kofi Annan a demandé au Conseil de sécurité le feu vert pour sa relance, même si, écrit-il, la responsabilité humanitaire des 26 millions d’Irakiens incombe en premier lieu à «l’autorité exerçant le contrôle effectif du pays», à savoir les éventuels tombeurs américains de Saddam Hussein. En attendant, le bureau de l’Onu pour les affaires humanitaires prépare un appel à une aide d’urgence de plus d’un milliard de dollars en faveur de l’Irak.
L’hypothèque turque
Le retour de l’Onu par le portillon humanitaire prélude de ses futures responsabilités, lorsque viendra l’heure d’administrer et de reconstruire l’Irak. L’idée d’une tutelle onusienne paraît écartée. En revanche, le multilatéralisme de l’Onu a tout pour plaire des deux côtés de l’Atlantique quand il s’agira de légitimer et de financer un nouvel Irak. Pour sa part, Washington a déjà entrepris d’alimenter un fonds grâce à des pouvoirs spéciaux pour saisir 1,74 milliards de dollars d’avoirs irakiens aux Etats-Unis, selon le secrétaire américain au Trésor, John Snow. «Une offensive financière contre le régime de Saddam Hussein», complétée jeudi par un appel international à «trouver, geler et rendre l’argent irakien au peuple irakien et à son avenir», faute de quoi les Etats-Unis se réservent «le droit de prendre des mesures de rétorsion…y compris l’interdiction de l’accès au système financier international» ce qui n’a pas empêché un niet immédiat Moscou.
Parallèlement à cette diplomatie du portefeuille, Washington se réclame d’une coalition militaire «plus vaste» que celle de la guerre de 1991. Les Etats-Unis citent 33 pays soutenant l’invasion de l’Irak. Parmi eux, aucun pays arabe, contrairement à 1991, et surtout, aujourd’hui, seuls la Grande-Bretagne et l’Australie ont des combattants sur le champ de bataille au côté des Etats-Unis. Dix pays ont envoyés des équipes médicales ou spécialisées dans la décontamination. Les autres ont officialisé leur soutien diplomatique à l’opération militaire américaine et pour quelques-uns accordé le droit d’utilisation de bases militaires ou un droit de survol de leur territoire. La Turquie est le dernier en date.
Ankara a finalement accepté jeudi d’ouvrir son espace aérien à Washington mais pas la liberté de mouvement sur son territoire des soldats américains répartis dans plusieurs bases militaires en Turquie. Et surtout, en même temps, le Parlement turc a décidé l’envoi de soldats turcs au nord de l’Irak. La Turquie veut s’assurer que les Kurdes d’Irak ne saisiront pas l’occasion de la guerre pour proclamer une indépendance qui menacerait de faire tache d’huile sur son propre territoire où vivent 10 millions de Kurdes. Washington a toutes les raisons de craindre un déploiement turc «unilatéral» dans le Nord irakien. Bruxelles aussi. Et les Quinze n’ont pas manqué jeudi de s’inquiéter de la stabilité régionale dans leur déclaration sur l’Irak qui invite «tous les pays de la région à s’abstenir d’action susceptible d’accroître l’instabilité». Enfin, au chapître international de leur texte commun, ils se déclarent «résolus à renforcer la capacité de l’Union européenne» en matière de sécurité commune et ils s’affirment tous «convaincus qu’ils nous faut renforcer le partenariat transatlantique».
par Monique Mas
Article publié le 21/03/2003