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Irak

La «nomenklatura» aux abois

Depuis le début des frappes américano-britanniques, l´inquiétude est montée d´un cran au sein des proches et de la nomenklatura du régime. Cette inquiétude est largement entretenue par les spéculations autour du sort de Saddam Hussein qui n’est apparu à la télévision que deux fois depuis le début de l’offensive des forces de la coalition.
De notre correspondant à Amman

En coulisse, ce n´est pas encore la débandade mais les premiers signes de panique sont apparus, affirme un ancien responsable de la direction nationale (pan-arabe) du parti Baas qui est rentré jeudi de Bagdad. «Les familles des hiérarques sont actuellement réfugiées dans des fermes en dehors de Bagdad, lieu habituel où elles se cachent dans les périodes de crises, explique-t-il. Les femmes des responsables sont terriblement angoissées sur la suite des événements. Elles ne dorment plus la nuit et font des cauchemars. Dans la journée, elles se parlent longuement ou se rencontrent».

Les demis-frères de Saddam Hussein –Barzan, Sabaoui, Watban– et le ministre de la Défense, Sultan Hachem, ont été placés en résidence surveillée. Ce dernier, qui n´est pas un Tikriti mais appartient à la tribu Al-Tay, peut néanmoins participer à certaines réunions.

«Tarek Aziz, affirme notre témoin, a été victime d´un petit incident cardiaque la semaine dernière qui l´a contraint à passer une journée à l’hôpital. Son médecin lui a conseillé du repos pendant 15 jours. Il ne peut accepter l´idée de partir en exil, même si au fond de lui-même, il préférerait terminer sa vie à Paris ou à Bruxelles». Tarek Aziz, 66 ans, un chrétien originaire de Mossoul dans le nord, est le seul des compagnons de la vieille garde de Saddam Hussein à ne pas être intégré dans le système de défense militaire du pays. Certains diplomates le voient comme «prisonnier du système». A l´instar des hauts dignitaires irakiens, il vit avec sa femme Violette, retranché dans une villa hyper-surveillée de Jadriyeh, un quartier huppé de la capitale irakienne.

Où se cache Saddam ?

Le prestigieux quotidien le Washington Post, citant des sources de la CIA, écrit que le président irakien aurait été présent avec ses deux fils, Oudaï et Qoussaï, dans l´un des sites bombardés par l´armée américaine. Mais impossible de confirmer si «le leader irakien a été tué, blessé ou a pu prendre la fuite», affirme le Post. Autant dire que le mystère reste entier sur le sort de Saddam Hussein.

Son apparition télévisuelle juste après le début des frappes américaines a suscité beaucoup d´interrogations. Ses lunettes ont intrigué, car il en porte rarement lorsqu´il apparaît en public. Tassé sur son siège, il semblait engoncé dans son uniforme du parti Baas. Les commentateurs ont spéculé sur sa santé moral et physique. Certains ont cru détecter des signes de bouffissures au visage.

Le maître de Bagdad reste toujours aussi insaisissable et énigmatique. Un médecin français, qui soigne des membres du clan affirme «avoir vu une fois un sosie du président dans l´un des palais». Bien avant d´être dans le collimateur des Etats-Unis, Saddam était obsédé par sa sécurité personnelle. Lors de l´opération «Tempête du désert» de 1991, il s´est déguisé avec une tenue bédouine, s´invitant chez l´habitant pour passer la nuit et repartant au petit matin.

Pour se cacher dans Bagdad, Saddam Hussein dispose de nombreux repaires secrets. Le sous-sol de la capitale irakienne est truffé de galeries souterraines et de postes de commandement, qui avaient été utilisés pendant la guerre Iran-Irak entre 1980 et 1988. Il sait que ces palais et les sites officiels seront les cibles des bombardements américano-britanniques. Jamais à court d´imagination, le raïs a très certainement imaginé une nouvelle tactique de dissimulation.



par Christian  Chesnot

Article publié le 23/03/2003