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Guerre en Irak

Attentats suicide : nouveau cauchemar pour la coalition

Depuis le début de l’offensive américano-britannique en Irak, il y a douze jours, de nombreux responsables religieux ont appelé les Irakiens mais aussi les musulmans du monde entier au jihad pour empêcher l’occupation d’une terre musulmane. Samedi, un premier attentat suicide a provoqué la mort de quatre soldats américains, marquant une nouvelle menace pour les troupes au sol de la coalition déjà mises en difficulté par l’armée et les milices irakiennes. Les autorités de Bagdad, qui estiment que «c’est une façon de défendre l’Irak contre les envahisseurs», ont annoncé d’autres attaques suicide.
Les commandements américain et britannique ont beau minimiser l’impact de l’attentat suicide perpétré samedi près de Najaf, dans le centre de l’Irak, cette attaque constitue sans aucun doute une nouvelle menace pour les troupes au sol de la coalition qui depuis le début de l’offensive terrestre se heurtent à une forte résistance des Irakiens. Selon un soldat américain présent sur place lors de cet attentat, un taxi s’est approché d’un barrage routier et le conducteur a fait un signe de la main montrant qu’il avait besoin d’aide. Cinq militaires américains se sont alors approchés du véhicule, deux dirigeant le canon de leur fusil vers l’arrière de la voiture, deux vers l’avant, le dernier s’approchant du chauffeur. L’homme a alors activé sa charge, provoquant la mort de quatre soldats. Cette attaque suicide a aussitôt été condamnée par les responsables militaires américains qui y ont dénoncé «de pures méthodes terroristes». Selon le général Tommy Franks, qui commande les opérations en Irak, «il n’est pas étonnant qu’un régime à l’agonie entreprenne de telles actions». Tenant à minimiser l’impact d’une telle opération kamikaze sur les efforts de guerre de la coalition, il a en outre affirmé que les troupes américaines «allaient exercer une vigilance supplémentaire» face à cette nouvelle menace.

D’autres responsables militaires américains et britanniques ont indiqué dimanche qu’ils effectueraient de «petits ajustements» à leur mode opératoire en Irak. Selon eux, il appartiendra désormais aux officiers sur le terrain de déterminer les mesures à prendre pour améliorer la sécurité des soldats. Ils ont notamment évoqué des mesures «de bon sens» citant par exemple le fait de faire arrêter les voitures à distance et d’en faire descendre les occupants avant d’en approcher. Dans la région de Bassorah, où les forces britanniques se heurtent depuis une dizaine de jours à une forte résistance irakienne, les soldats ne cachent pas leur crainte que les miliciens qui défendent cette ville sainte du chiisme n’utilisent eux aussi la tactique de l’attentat suicide. Face à cette menace, les militaires britanniques ont multiplié les contrôles. Chaque automobile et chaque personne est ainsi observée avec attention avant d’être minutieusement enregistrée. Chaque suspect est conduit les mains sur la tête jusqu’à un des chars d’assaut qui encerclent la ville pour y être interrogé. Et sur les routes qui partent de Bassorah, divers obstacles ont été placés pour obliger les véhicules à ralentir.

Ces nouvelles mesures ne seront toutefois pas sans conséquence. Si elles sont avant tout destinées à protéger les forces au sol, elles risquent en effet d’approfondir le fossé qui sépare déjà les troupes de la coalition de la population irakienne et donc de nuire à la campagne de libération qu’Américains et Britanniques se sont engagés à mener en Irak.

Bagdad promet de nouveaux attentats kamikaze

Rejetant l’accusation de terrorisme, les autorités irakiennes ont estimé que les attentats suicide sont «une des façons de défendre l’Irak contre les envahisseurs». L’auteur de l’attaque de samedi a été présenté comme un simple sous-officier de l’armée irakienne qui a voulu «donner une leçon aux troupes américaines à l’exemple des combattants palestiniens de la liberté». Selon la télévision d’Etat, Saddam Hussein a ordonné l’attribution à titre posthume du grade de colonel à l’auteur de l’attentat ainsi que la prestigieuse médaille de Oum al-Maarik, la mère de toutes les batailles en arabe, nom donnée par les Irakiens à la guerre du Golfe de 1991. Commentant cet attentat suicide, le vice-président irakien, Taha Yassine Ramadan, a refusé de dire si l’officier avait reçu ou non l’ordre de ses supérieurs de mener l’opération. «Quiconque mène une opération de martyr n’a pas besoin d’ordre», a-t-il affirmé. «Il n’y a rien de légitime ou de non légitime pour se défendre et nous aurons recours à tous les moyens capables de tuer l’ennemi qui cherche à occuper notre terre», a-t-il également assuré exhortant «le peuple irakien et les peuples de la nation arabe à être à la hauteur de cette bataille et à poursuivre l’ennemi jusqu’à chez lui». «Si les Américains et les Britanniques veulent éviter cela, ils n’ont qu’à plier bagage et regagner leur pays et qu’on en finisse», a-t-il conclu.

Poursuivant dans cette même rhétorique, le vice-Premier ministre, Tarek Aziz, a annoncé d’autres attaques suicide contre les forces américano-britanniques. «Quand vous combattez l’envahisseur avec tous les moyens à votre disposition, vous n’êtes pas un terroriste, vous êtes un héros», a-t-il souligné. Le porte-parole de l’armée irakienne, le général Hazem al-Rawi, a pour sa part affirmé que quelque 4 000 volontaires venus des autres pays arabes étaient prêts à suivre l’exemple du militaire irakien. Selon lui, ce sont «des candidats au martyre qui ont juré de ne jamais rentrer dans leur pays et demandé à être inhumés en terre irakienne». Et de fait, l’appel au jihad lancé par de nombreux dignitaires religieux en Irak et ailleurs dans le monde musulman semble avoir été entendu. La télévision al-Jazira a ainsi montré des images de volontaires syriens arrivés dans la ville de Mossoul, dans le nord irakien, pour combattre les forces de la coalition américano-britannique. La chaîne qatarienne affirme que ces candidats aux attentats suicide sont arrivés en territoire irakien sans passer par les points de passages frontaliers. Une envoyée spéciale de la télévision France 2 avait pour sa part affirmé la semaine dernière avoir croisé en Syrie des volontaires marocains et algériens venus combattre en Irak. (Ecoutez le reportage à Alger d’Amar ben Salem).

Epargné depuis le début de la guerre, Israël a connu un nouvel attentat suicide dimanche dans la ville de Netanya, dans le nord du pays. Cette attaque, qui a fait une trentaine de blessés et un mort –le kamikaze–, a été revendiquée par le Jihad islamique. Elle a aussitôt été «dédiée au peuple irakien». L’organisation terroriste a en outre annoncé avoir dépêché une première vague de kamikazes à Bagdad pour aider les Irakiens à combattre les Anglo-américains. (Correspondance de Dominique Roch à Jérusalem)



par Mounia  Daoudi

Article publié le 31/03/2003