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Liberia

Le Lurd à l’assaut de Charles Taylor

Le Lurd, (Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie), mouvement rebelle qui se bat contre Charles Taylor depuis septembre 1998, remporte des victoires, ces derniers temps. En deux semaines les rebelles ont ouvert trois principaux fronts de combats, dont l’un à seulement 18 km du centre de la capitale.
De notre correspondant à Monrovia

Le 25 février, des éléments du Lurd ont attaqué un lycée dans le quartier Brewerville, à 18 km du centre de Monrovia. En moins de 30 minutes, la panique a gagné toute la ville. Dans la soirée, le vice-président, sur les antennes des radios et de télévisions, a confirmé que les rebelles étaient, pour la première fois, parvenus aux portes de la capitale. Les forces régulières se sont battues toute la journée et toute la nuit, avant de réussir à les repousser.

Le chef de l’Etat lui-même s’est rendu sur les lieux pour galvaniser les soldats, accompagné d’une équipe de journalistes locaux et internationaux. C’est dans le camp des personnes déplacées que les rebelles se sont rendus tout d’abord. Ils s’y sont livré aux exactions qui sont désormais de mise dans les combats au Liberia, viols, prises d’otages et la mort de civils. Les rebelles, avant de se retirer, ont enlevé 2000 déplacés, majoritairement des femmes, des jeunes filles et des jeunes garçons.
Le président Taylor a affirmé qu’en vertu de l’article 5 de l’ONU, il a le droit d’importer des armes. «Je n’ai pas besoin d’attendre un feu vert du conseil de sécurité. Je dis aujourd’hui ouvertement au monde entier, que j’importerai des armes pour défendre l’intégrité territoriale de ma nation».

Le chef de l’Etat libérien sort rarement ces temps-ci. Il s’est cantonné dans sa résidence privée où il reçoit ses ministres. Alors qu’il avait coutume de rassurer la population civile quand les rebelles se montraient menaçants, cette fois il a laissé cette tâche au vice-président et au ministre de la Défense. La plus grande appréhension règne au sein de la population civile de Monrovia qui n’a plus d’autres options qu’attendre l’arrivée des rebelles.

Lassitude des forces gouvernementales

Ceux-ci ont pris le contrôle, en février, de toute la frontière qui sépare le Liberia de la Sierra Leone. Depuis, ils ont reçu du renfort non seulement en matériels, mais aussi et surtout en hommes. Les miliciens kamarjor sierra-leonnais qui combattaient avec les forces régulières de ce pays contre les rebelles du RUF, ont traversé la frontière en grand nombre pour aider les rebelles libériens. En mars, les forces du Lurd se sont emparées de la deuxième plus grande ville du pays, Gbarnga. Cette ville est non seulement la capitale du centre, mais aussi un grand carrefour vers la Guinée et la Côte d’Ivoire. Le chef de l’Etat y détient 10 000 hectares de riz et 100 000 hectares de café et de cacao ainsi qu’une résidence. Le gouvernement dit avoir repris une bonne partie de la ville, information pour le moment non confirmée. Les rebelles ont d’ailleurs pris une autre ville stratégique à l’est du pays, Zwedru, ville natale du feu président Samuel Doe. Au total, trois principaux fronts de combats ont été ouverts en deux semaines.

Le Lurd est un mouvement composé d’éléments qui ont pris part à la guerre civile de 1990-1997. Une guerre à l’issue de laquelle les élections ont été
Remportées par Charles Taylor. Le Lurd a été constitué par les anciens combattants de l’Ulimo et du LPC, deux factions qui étaient opposées au NPFL de Charles Taylor.
Les rebelles du Lurd souffraient d’un sérieux handicap, leurs effectifs très faibles. C’est avec seulement 3000 hommes qu’ils comptaient prendre Monrovia. Au fur et a mesure qu’ils avançaient, le nombre diminuait parce qu’il fallait laisser quelques éléments dans les villes conquises pour en assurer le contrôle. Partout où ils passent la population civile ne se rallie pas.
Leurs succès ne sont pas seulement justifiés par l’augmentation récente de leurs effectifs en raison des apports extérieurs. On constate aussi une grande lassitude parmi les forces gouvernementales. Certains officiers déclarent même ouvertement qu’ils en ont assez. La mobilisation n’est plus à son mieux autour de Charles Taylor.



Article publié le 29/03/2003