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Serbie

Les commanditaires présumés du meurtre de Djindjic abattus

La Serbie est peut-être en train de se débarrasser des derniers fantômes du régime de Slobodan Milosevic. Dans la soirée de jeudi, la police a abattu deux des commanditaires présumés du meurtre de Zoran Djindjic et les restes d’Ivan Stambolic, l’ancien Président de la République, «disparu» depuis le 25 août 2000, viennent d’être retrouvés.
De notre correspondant dans les Balkans

Jeudi, la police a localisé Dusan Spasojevic, dit Shiptar, et Mile Lukovic, dit Kum, près de la petite ville de Barajevo, à une vingtaine de kilomètres au sud de Belgrade. Les deux hommes auraient opposé une forte résistance armée et ont été abattus par l’unité anti-terroriste de la police. Ils étaient considérés comme les principaux chefs du clan de Zemun, un gang mafieux vers lequel se dirigent tous les soupçons depuis l’assassinat du Premier ministre Djindjic, le 12 mars dernier. Spasojevic et Lukovic étaient officiellement soupçonnés d’avoir commandité et organisé le meurtre. Lundi, la police avait déjà arrêté l’auteur présumé des coups de feu mortels, Zvezdan Jovanovic. Ce dernier appartenait à l’Unité des opérations spéciales (JS0) de la police serbe, dont les hommes sont connus sous le nom de Bérets rouges, et qui a été dissoute mardi. L’ancien commandant de la JSO, Milorad Lukovic dit Legija, qui serait également un affidé du clan de Zemun, est par contre toujours en fuite.

Depuis l’ordre de dissolution des Bérets rouges, le calme règne dans la principale base de cette unité, situé dans la petite ville de Kula, au nord de la Serbie. De nombreux Bérets rouges ont déjà rendu leurs armes, et il est clair que l’unité n’a plus les moyens de tenter une contre-offensive contre les autorités de Belgrade.

Les risques de coup d’État, qui justifiaient l’état d’urgence proclamé immédiatement après le meurtre de Zoran Djindjic, semblent donc totalement dissipés. Le gouvernement entend cependant profiter de cet état d’urgence pour poursuivre l’immense opération de «nettoyage» commencée depuis le 12 mars. Près de 3 000 personnes auraient été interpellées et un tiers d’entre elles sont toujours détenues. Les arrestations ont frappé le affiliés du clan de Zemun, mais aussi ceux d’autres structures criminelles à travers tout le pays. Une quinzaine de Bérets rouges seraient également toujours détenus.

Dernière péripétie criminelle du régime

Les interrogatoires menés par la police ont également permis de retrouver le corps d’Ivan Stambolic, l’ancien Président de la République, enlevé le 25 août 2000, alors qu’il faisait son jogging dans une rue de Belgrade. Les restes d’Ivan Stambolic ont été retrouvés dans le massif montagneux de la Fruska Gora, au nord de Belgrade.

Depuis sa disparition, quelques semaines avant la chute du régime de Milosevic, les amis et les proches d’Ivan Stambolic menaient campagne pour obtenir la vérité sur son sort. L’avocat de la famille, Nikola Barovic, avait toujours répété que cette élimination politique avait été décidée sur ordre de Slobodan Milosevic et exécutée par les forces spéciales de la police. Le ministre de l’Intérieur, Dusan Mihailovic, s’est rallié à cette thèse, et les autorités de Belgrade souhaitent entendre Slobodan Milosevic sur cette affaire, ainsi que la femme de l’ancien maître de Belgrade, Mira Markovic, qui a disparu de son domicile de Belgrade et semble avoir pris la fuite. Milica Gajic, la belle-fille des époux Milosevic, a également été arrêtée jeudi à Pozarevac, mais la police n’a pas fourni d’informations sur les motifs de cette arrestation.

L’affaire Stambolic était considérée comme la dernière péripétie criminelle du régime de Milosevic. Les autorités de Belgrade paraissent décider à solder les comptes de ce lourd passé et d’autres arrestations devraient encore suivre. Vendredi, des officiels reconnaissaient ainsi à mi-mots que la Serbie se trouve probablement à un moment «idéal» pour essayer d’arrêter les inculpés du Tribunal de La Haye qui se cachent toujours dans le pays. Les jours de liberté de l’ancien chef des Serbes Radovan Karadzic et du général Ratko Mladic sont ainsi peut-être comptés. Encore faut-il que les autorités continuent de faire preuve de la même détermination. Pour l’instant, la population les soutient et les critiques contre les risques que l’état d’urgence fait courir pour les libertés publiques passent au second plan face aux résultats obtenus jusqu’à présent.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 28/03/2003