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Congo démocratique

Vers la première expérience de la démocratie

Depuis la chute du régime du Maréchal Mobutu, la République démocratique du Congo, l’ex-Zaïre, a éclaté en plusieurs zones contrôlées par des rébellions soutenues par des pays étrangers. Ce conflit, le plus important qu’ait connu le pays depuis son indépendance en 1960, a fait plus de 2,5 millions de morts. C’est une rébellion partie de l’est du pays en 1997 qui a conduit à la fin du Zaïre de Mobutu en quelque huit mois de marche sur la capitale, Kinshasa. Mais rapidement la rébellion organisée autour de l’AFDL (Alliance des forces démocratiques de libération), dirigée par Laurent-Désiré Kabila, devenue loyaliste, s’oppose à d’autres mouvements rebelles en plongeant le pays dans un chaos sans précédent. La convoitise des ressources minières considérables l’ex-Zaïre a aussi poussé nombre de pays voisins à soutenir les nouveaux rebelles et en entretenant une certaine partition du pays. La signature à Sun City, en Afrique du sud d’un accord de paix entre les belligérants, le 2 avril 2003 inaugure une période de transition de deux ou trois ans qui devrait déboucher sur les premières élections libres du pays.
Laurent-Désiré Kabila avait pris la tête d’une rébellion partie de l’est du Zaïre et qui a eu raison du régime du maréchal Mobutu en 1997. L’inexistence de l’Etat et l’immensité du pays ont favorisé une conquête rapide du pouvoir. Dès la prise du pouvoir à Kinshasa, le pays est rebaptisé «République démocratique du Congo» et Laurent-Désiré Kabila, le nouveau président, procède à l’intégration des combattants congolais de l’AFDL à l’armée nationale, les FAC (Forces armées congolaises). Les autres, Rwandais et Ougandais essentiellement, maintenus dans les instances de la République rendaient compte au gouvernement du Rwanda. Mais très rapidement les alliés d’hier sont devenus encombrants. Le président Laurent-Désiré les renvoient dans leur pays respectif et dénonce les contrats miniers signés en faveur du Rwanda et les concessions forestières dans le nord-est du Congo au profit de l’Ouganda.

En contrepartie de leurs soutiens financier et logistique à la rébellion de Laurent-Désiré Kabila, le président de l’Ouganda, Yoweri Museveni et celui du Rwanda Paul Kagame, ont obtenu des contrats juteux sur les fabuleuses richesses du géant voisin. L’exploitation du Coltan par exemple, minerai précieux et indispensable dans les téléphones portables et les microprocesseurs, est confiée à la Société minière des Grands lacs (Somigl) qui fait transiter le produit par le Rwanda avant de l’exporter vers l’Europe et les Etats-Unis. Aucun droit de douane n’est perçu par le Congo. De nombreux autres minerais, tels que l’or, le diamant, ou l’étain empruntent les mêmes filières d’exportation savamment contrôlées par Kampala et Kigali. «L’ingratitude» du président Laurent-Désiré Kabila qui refuse de continuer d’honorer ses engagements attire la foudre de ses anciens alliés qui, à leur tour, entretiennent des mouvements rebelles chargés de renverser le pouvoir installé à Kinshasa. Rwandais et Ougandais s’appuient sur des militaires Banyamulenge, Tutsis congolais d’origine rwandaise pour lancer la rébellion contre le régime de Kabila. C’est le début de la guerre civile en 1998.

Le Rassemblement congolais pour la démocratie (RCD) prend la tête de la contestation. Orchestrée par le Rwanda, cette rébellion s’enlise dans des querelles internes et donne naissance à deux autres mouvements : RCD-ML(Mouvement de libération) soutenu par l’Ouganda, et le MLC (Mouvement de libération du Congo). Le conflit s’internationalise et l’Angola et le Zimbabwe volent au secours du pouvoir de Kinshasa. L’intervention de Robert Mugabe du Zimbabwe n’est pas anodine. Son pays s’est engagé financièrement derrière Laurent-Désiré Kabila et espère un retour sur investissement. Ce qu’il obtient par des contrats de fourniture d’armes chinoises à l’armée congolaise, et par une participation à l’exploitation du diamant de Mbuji Mayi. Quant à l’Angola, son soutien au régime Kabila répondait au besoin militaire de neutraliser l’Unita (Union pour l’indépendance totale de l’Angola) de Jonas Savimbi, opposé au pouvoir de Luanda et auquel le régime de Mobutu avait offert des bases arrières dans le sud-est du Congo.

Retrait des troupes étrangères = paix

Sous l’égide de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) les belligérants signent un accord de cessez-le-feu à Lusaka en Zambie en juillet 1999. Cet accord n’a jamais été appliqué. Chaque mouvement a plutôt renforcé ses positions et d’autres scissions sont apparues dans les mouvements rebelles. (voir carte). La guerre s’intensifie pénalisant les populations qui se déplacent par milliers à travers les forêts. Elles sont exposées aux pillages, aux maladies et à des massacres de groupes rivaux. C’est alors que le Conseil de sécurité de l’ONU, approuve l’envoie de 5 500 hommes au Congo pour garantir le cessez-le-feu. Il a aussi ordonné le retrait de toutes les forces étrangères du Congo. Il déploie sur place la Mission des nations unies pour le Congo, la MONUC qui devrait aussi apprécier le retrait de 20 000 soldats rwandais, de 10 000 Ougandais, des Zimbabwéens, des Angolais et des Namibiens.

Mais le 16 janvier 2001, Laurent-Désiré Kabila est assassiné, immédiatement remplacé par son fils, Joseph. Ce dernier se dit favorable à l’accord de Lusaka et relance des discussions avec Paul Kagame dès le 1er février à Washington. Il se dit également favorable à une économie de marché, s’attirant du coup la sympathie des milieux d’affaires occidentaux. Allègement de la dette extérieure, contacts avec les institutions financières internationales donnent au jeune président, 29 ans, une dimension que personne ne lui reconnaissait. Dès le printemps 2001 Joseph Kabila demande à l’ex-président du Botswana, Ketumile Masire de piloter le processus du dialogue intercongolais. Sa mission est assimilée à celle d’un «facilitateur». Il entame des rounds de négociations du 25 février au 19 avril 2002 qui débouchent sur un accord partiel de partage du pouvoir en RDC. Le «1+4» : un président de la République (Joseph Kabila), trois vice-présidents issus des mouvements rebelles (RCD, MLC et RCD-ML), et un vice-président désigné par la société civile et l’opposition non armée.

Les 365 délégués au dialogue inter congolais sont finalement parvenus à signer un accord global de paix, sous la supervision d’un gouvernement de transition pour deux ans, le 17 décembre 2002 à Pretoria en Afrique du sud. Le représentant spécial au Congo du secrétaire général des Nations unies, le Sénégalais Mustapha Niasse a apporté aux délégués congolais l’appui de la communauté internationale qui souhaite un règlement consensuel du conflit. Il a particulièrement insisté, début mars 2003, sur la signature d’un accord militaire qui devrait réorganiser et former la nouvelle armée congolaise. Les délégués congolais n’y sont pas parvenus mais sont convenus d’un partage des responsabilités au sein de l’armée et de la définition des régions militaires.

Le facilitateur au titre de l’Union africaine, Ketumile Masire et le médiateur de l’ONU, Mustapha Niasse ont ensemble jugé que le dialogue inter congolais a porté ses fruits et qu’il était temps de laisser les Congolais régler entre eux les détails de la conduite de la transition. Ils s’attacheront maintenant à mettre sur pied un comité de suivi de l’accord endossé le 2 avril à Sun City, par tous les belligérants et les pays directement ou indirectement impliqués dans le conflit congolais.



par Didier  Samson

Article publié le 05/04/2003