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Epidémie

Pékin rompt enfin le silence sur le SRAS

Accusées d’avoir de façon délibérée caché la réalité sur le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), les autorités chinoises ont avoué dimanche que l’épidémie touchait quelque 1 807 personnes à travers le pays, dont 339 à Pékin. Depuis le début de l’épidémie, 79 personnes sont mortes en Chine après avoir contracté le virus du SRAS. L’Organisation mondiale de la santé s’est félicitée de la nouvelle attitude des responsables chinois, tout en souhaitant que cet effort de transparence soit étendu à l’ensemble du pays, particulièrement dans les régions pauvres ou rurales où les infrastructures médicales sont souvent très déficientes. L’évaluation à la hausse du nombre de personnes infectées à Pékin a entraîné le limogeage de leur fonction au sein du Parti communiste chinois du ministre de la Santé et du maire de la capitale.
Pour la première depuis le début de l’épidémie du SRAS, dont le foyer pourrait se situer dans la province chinoise du Guangdong, les autorités de Pékin reconnaissent n’avoir pas été à la hauteur pour répondre à la propagation de cette nouvelle maladie. «Après l’apparition du SRAS, le ministère de la Santé n’a pas établi à temps de système unifié pour collecter, compiler et rapporter les données sur l’épidémie», a notamment déclaré le vice-ministre de la Santé, Gao Qiang. Selon un bilan en date du 18 avril, quelque 1 807 personnes sont infectées par le virus contre 1 530 dans un précédent bilan. La province du Guangdong, dans le sud du pays, reste la plus touchée avec 1 304 cas avérés. Officiellement 79 personnes sont mortes à travers le pays après avoir contracté le virus. Ces chiffres sont toutefois certainement largement sous-évalués puisqu’ils ne prennent pas en compte de nombreuses régions pauvres et rurales où les infrastructures sanitaires sont très déficientes.

Après avoir maintenu le silence sur le nombre de personnes infectées par le virus dans la capitale, les autorités chinoises ont avoué dimanche que près de 350 cas avérés de pneumopathie atypiques et 402 cas suspects avaient été recensés à Pékin. Le bilan ne faisait jusqu’alors état que de 37 personnes infectées. Le nombre de décès est en outre passé de 4 –chiffre inchangé pendant deux semaines– à 18. L’annonce de ces nouveaux chiffres, visiblement exigés au plus haut niveau de l’Etat, a été suivie par des sanctions politiques. Le ministre de la Santé ainsi que le maire de la capitale ont été immédiatement limogés de leur fonction au sein du PCC, le parti communiste chinois. La décision a été prise par le comité central du parti et devrait être suivie par la démission des deux hommes de leur poste au sein du gouvernement et à la direction de la mairie.

Les Chinois privés de «semaine en or»

Ce nouveau bilan, qui reste toutefois peu élevé à l’échelle nationale compte tenu des révélations sur la situation à Pékin, a été salué par l’Organisation mondiale de la Santé, très critique ces dernières semaines vis-à-vis des autorités chinoises accusées de minimiser l’ampleur de l’épidémie. «On nous a dit que de nouveaux chiffres seraient désormais rapportés quotidiennement», s’est notamment félicité un représentant de l’OMS. Mais si un examen de la situation des hôpitaux de la capitale a permis d’avoir une meilleure idée de la situation réelle, ce n’est pas le cas dans le reste du pays et dans certaines régions pauvres et rurales. Les chiffres des provinces chinoises n’ont en effet pas été revus à la hausse de façon significative. «Nous allons devoir attendre pour voir comment cela va se passer ailleurs», a reconnu le responsable de l’organisation internationale en soulignant qu’il était «inquiétant pour tout le monde que l’OMS n’ait pas encore visité de régions rurales».

Après avoir été minimisée, l’épidémie de pneumopathie atypique est désormais prise très au sérieux en Chine. Les autorités viennent d’annuler «la semaine en or» qui correspond aux congés annuels octroyés du 1er au 7 mai à l’occasion de la fête du travail. «Le but de cette mesure, a expliqué le vice-ministre de la Santé, est de prévenir des déplacements de population qui pourraient contribuer à la diffusion de la pneumopathie atypique». Durant cette période, des dizaines de millions de Chinois voyagent à travers le pays. Les étudiants en profitent pour retourner chez eux, les travailleurs émigrés pour revenir dans leurs villages et la nouvelle classe moyenne pour faire du tourisme. «Il ne s’agit pas d’interdire tout voyage, a précisé le vice-ministre, mais de s’opposer à tout déplacement massif de populations». Le ministère de l’Education a récemment publié un communiqué demandant aux étudiants de ne pas quitter leur campus.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 20/04/2003