Reconstruction de l''Irak
Jay Garner a débuté sa difficile mission
Arrivé lundi à Bagdad par avion militaire de Koweït, le général à la retraite Jay Garner doit prendre en charge la gestion civile du pays pendant une période transitoire dont la durée n’a toujours pas été précisée. Première mission de taille qui attend ce proche du secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, la restauration des services de base comme la distribution d’eau ou d’électricité. Dans la capitale irakienne, nombreux sont en effet ceux qui se plaignent que la vie n’ait toujours pas repris son cours, près de deux semaines après la chute de Bagdad. Mais le véritable enjeu auquel devra faire face Jay Garner sera de tirer les plans du futur Etat Irakien. C’est dans ce contexte qu’il s’est rendu mardi dans le Kurdistan Irakien où il a eu des entretiens avec les deux leaders kurdes Jalal Talabani et Massoud Barzani.
L’arrivée dans la capitale irakienne de l’administrateur civil américain s’est faite plutôt dans la discrétion. Douze jours après la chute de Bagdad, Jay Garner a conscience des difficultés qu’ils va devoir affronter et surtout des attentes des Irakiens de plus en plus excédés de la situation à laquelle ils doivent faire face tous les jours. A Bagdad, l’électricité n’a en effet toujours pas été entièrement rétablie, l’approvisionnement en eau potable reste très limité et moins de la moitié des 33 hôpitaux de la capitale irakienne fonctionnent normalement. C’est fort de ce constat que Jay Garner a entrepris la visite de plusieurs lieux symboliques de la capitale irakienne. Il s’est ainsi rendu à l’hôpital Yarmouk, très endommagé par les bombardements américains et les pillages qui ont suivi la chute du régime de Saddam Hussein. Il est ensuite allé dans une usine de traitement d’eau désertée avant d’aller visiter la centrale électrique de Bagdad-sud, l’une des trois qui alimentent la capitale privée d’électricité depuis maintenant dix-huit jours. Hasard du calendrier ? L’électricité a commencé à réapparaître hier dans certains quartiers de la ville.
Partout où il s’est rendu, le général Garner a insisté sur la nécessaire collaboration avec les Irakiens pour reconstruire le pays. «Nous vous aiderons aussi longtemps que vous voudrez et je vous assure qu’un jour votre hôpital sera le meilleur du Moyen Orient», a-t-il notamment déclaré au personnel de l’hôpital Yarmouk en invitant les médecins et les infirmières à rester auprès des malades. A la centrale électrique il a très diplomatiquement vanté «l’incroyable compétence des ingénieurs irakiens» dont la plupart ont repris le travail. Il s’est en outre engagé à ce que le pays fonctionne normalement «dans les trois à six mois». En visitant des installations civiles endommagées par les combats et les pillages, Jay Garner a sans doute voulu mettre en avant sa mission de restauration des infrastructures de bases de l’Irak. Mais concernant le volet politique de sa tâche, à savoir la mise en place d’un futur Etat irakien, l’administrateur civil est resté très discret, se contentant d’énoncer des banalités sur le droit des Irakiens à s’autogérer eux-même.
«Notre but, a-t-il notamment insisté, est d’amorcer un processus qui permettra au peuple irakien d’élire ses propres dirigeants. Personne ne sort du lot. Nous n’avons nommé ou reconnu personne». Jay Garner faisait allusion à la multiplication ces derniers jours de leaders locaux auto-proclamés. Le plus emblématique d’entre eux est Mohamed Mohsen al-Zoubeïdi, un proche du poulain des faucons du Pentagone Ahmed Chalabi, qui s’est intronisé gouverneur de Bagdad. Plutôt discret sur cette auto-désignation, les Américains n’ont réagi que lorsque le nouveau gouverneur a annoncé l’envoi à Vienne d’une délégation pour participer à une réunion de l’OPEP, l’organisation des pays producteurs de pétrole.
Premiers entretiens politiques
Jay Garner, qui sera appuyé dans sa mission par quelque 450 experts militaires, diplomates et juristes, n’a pour l’instant donné aucune indication sur le transfert du pouvoir aux Irakiens. Il n’a pas non plus voulu confirmer que sa mission prendrait fin dans trois mois comme l’a affirmé la presse américaine. Il s’est contenté d’affirmer qu’il n’était qu’un «facilitateur» de la coalition et que son travail consistait à «établir un nouvel environnement où les Irakiens pourront installer un nouveau gouvernement». La tâche s’annonce difficile pour l’administrateur civil qui doit faire face à une hostilité politique grandissante à la présence américaine en Irak. Car mis à part Ahmed Chalabi, qui dirige le Congrès national irakien et qui affirme que les Américains sont les bienvenus jusqu’à la tenue d’élections libres dans deux ans, la plupart des formations politiques s’opposent à toute présence étrangère.
L’ASRII, l’Assemblée suprême de la révolution islamique en Irak, principale formation d’opposition chiite, a d’ores et déjà annoncé qu’elle ne coopérerait pas avec une administration américaine et qu’elle boycotterait toute rencontre avec Jay Garner. La plupart des leaders religieux chiites ont en outre appelé à un départ immédiat des troupes de la coalition, qualifiées de forces d’occupation. Même les Kurdes, pourtant alliés de la coalition américano-britannique pour renverser le régime de Saddam Hussein, conteste tout rôle politique aux Américains. Le leader de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), Jalal Talabani, a en effet déclaré qu’il «n’accepterait pas qu’un étranger dirige un gouvernement irakien». «Le nouveau gouvernement devra être un gouvernement irakien intérimaire de coalition qui devra prendre en charge l’organisation d’élections libre», a-t-il précisé.
C’est dans ce contexte que Jay Garner a entrepris mardi une tournée au Kurdistan au cours de laquelle il a rencontré les deux dirigeants kurdes Jalal Talabani (UPK) et Massoud Barzani du Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Les deux hommes ont profité de l’occasion pour rappeler leur adhésion à un Irak fédéral où le Kurdistan continuerait de bénéficier d’une large autonomie, à l’instar de celle qui est la sienne depuis la fin de la guerre du Golfe de 1991. Cette rencontre est la première du genre entre l’administrateur américain chargé de la reconstruction et des responsables politiques irakiens à l’intérieur du pays.
Partout où il s’est rendu, le général Garner a insisté sur la nécessaire collaboration avec les Irakiens pour reconstruire le pays. «Nous vous aiderons aussi longtemps que vous voudrez et je vous assure qu’un jour votre hôpital sera le meilleur du Moyen Orient», a-t-il notamment déclaré au personnel de l’hôpital Yarmouk en invitant les médecins et les infirmières à rester auprès des malades. A la centrale électrique il a très diplomatiquement vanté «l’incroyable compétence des ingénieurs irakiens» dont la plupart ont repris le travail. Il s’est en outre engagé à ce que le pays fonctionne normalement «dans les trois à six mois». En visitant des installations civiles endommagées par les combats et les pillages, Jay Garner a sans doute voulu mettre en avant sa mission de restauration des infrastructures de bases de l’Irak. Mais concernant le volet politique de sa tâche, à savoir la mise en place d’un futur Etat irakien, l’administrateur civil est resté très discret, se contentant d’énoncer des banalités sur le droit des Irakiens à s’autogérer eux-même.
«Notre but, a-t-il notamment insisté, est d’amorcer un processus qui permettra au peuple irakien d’élire ses propres dirigeants. Personne ne sort du lot. Nous n’avons nommé ou reconnu personne». Jay Garner faisait allusion à la multiplication ces derniers jours de leaders locaux auto-proclamés. Le plus emblématique d’entre eux est Mohamed Mohsen al-Zoubeïdi, un proche du poulain des faucons du Pentagone Ahmed Chalabi, qui s’est intronisé gouverneur de Bagdad. Plutôt discret sur cette auto-désignation, les Américains n’ont réagi que lorsque le nouveau gouverneur a annoncé l’envoi à Vienne d’une délégation pour participer à une réunion de l’OPEP, l’organisation des pays producteurs de pétrole.
Premiers entretiens politiques
Jay Garner, qui sera appuyé dans sa mission par quelque 450 experts militaires, diplomates et juristes, n’a pour l’instant donné aucune indication sur le transfert du pouvoir aux Irakiens. Il n’a pas non plus voulu confirmer que sa mission prendrait fin dans trois mois comme l’a affirmé la presse américaine. Il s’est contenté d’affirmer qu’il n’était qu’un «facilitateur» de la coalition et que son travail consistait à «établir un nouvel environnement où les Irakiens pourront installer un nouveau gouvernement». La tâche s’annonce difficile pour l’administrateur civil qui doit faire face à une hostilité politique grandissante à la présence américaine en Irak. Car mis à part Ahmed Chalabi, qui dirige le Congrès national irakien et qui affirme que les Américains sont les bienvenus jusqu’à la tenue d’élections libres dans deux ans, la plupart des formations politiques s’opposent à toute présence étrangère.
L’ASRII, l’Assemblée suprême de la révolution islamique en Irak, principale formation d’opposition chiite, a d’ores et déjà annoncé qu’elle ne coopérerait pas avec une administration américaine et qu’elle boycotterait toute rencontre avec Jay Garner. La plupart des leaders religieux chiites ont en outre appelé à un départ immédiat des troupes de la coalition, qualifiées de forces d’occupation. Même les Kurdes, pourtant alliés de la coalition américano-britannique pour renverser le régime de Saddam Hussein, conteste tout rôle politique aux Américains. Le leader de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), Jalal Talabani, a en effet déclaré qu’il «n’accepterait pas qu’un étranger dirige un gouvernement irakien». «Le nouveau gouvernement devra être un gouvernement irakien intérimaire de coalition qui devra prendre en charge l’organisation d’élections libre», a-t-il précisé.
C’est dans ce contexte que Jay Garner a entrepris mardi une tournée au Kurdistan au cours de laquelle il a rencontré les deux dirigeants kurdes Jalal Talabani (UPK) et Massoud Barzani du Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Les deux hommes ont profité de l’occasion pour rappeler leur adhésion à un Irak fédéral où le Kurdistan continuerait de bénéficier d’une large autonomie, à l’instar de celle qui est la sienne depuis la fin de la guerre du Golfe de 1991. Cette rencontre est la première du genre entre l’administrateur américain chargé de la reconstruction et des responsables politiques irakiens à l’intérieur du pays.
par Mounia Daoudi
Article publié le 22/04/2003