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Le gouvernement tente de calmer les enseignants

Les enseignants ne veulent pas de la réforme que leur propose leur ministre, Luc Ferry. Depuis deux jours, les principales organisations syndicales qui défilent au ministère font, les unes à la suite des autres, part de leur opposition à ce projet et maintiennent la pression en continuant le mouvement de grève engagé en début de semaine. Face à cette détermination, le ministre de l’Education nationale persiste et signe. Alors que d’autres membres de la majorité appellent à un peu plus de souplesse. La prochaine étape doit avoir lieu le 27 mai à l’occasion d’un conseil interministériel sur l’éducation sous la présidence de Jean-Pierre Raffarin.
«Il faut que la réforme se fasse mais le gouvernement n’est pas autiste.» Xavier Darcos, le ministre délégué à l’Enseignement scolaire a voulu montrer que le message que les enseignants assènent à coup de grèves et de manifestations depuis de longs mois a été entendu. Ils refusent les mesures envisagées dans le cadre de la décentralisation et notamment le transfert de la gestion des personnels non-enseignants aux collectivités locales. Ils ne veulent pas non plus de la réforme des retraites proposée par le ministre des Affaires sociales François Fillon.

Dans ce contexte tendu, la position du ministre de l’Education nationale est de plus en plus difficile. Sa détermination à affirmer que la décentralisation, qui cristallise toutes les critiques des enseignants, est incontournable se heurte à la conviction, tout aussi inébranlable, des syndicats de professeurs qu’elle est inacceptable et remet en cause le maintien d’un système scolaire équitable, aussi bien pour les personnels que pour les élèves.

Xavier Darcos a tenté de décrisper le débat en déclarant que le gouvernement était prêt à la discussion et qu’il pouvait y avoir des aménagements de la réforme tant au niveau des modalités d’application que du calendrier. «Nous voulons réformer, nous pensons que c’est nécessaire, nous le faisons dans l’intérêt du pays… Mais si vraiment ça doit créer de telles tensions que l’ensemble des projets du gouvernement soient immobilisés, eh bien évidemment nous donnerons un peu de temps et nous en discuterons».

Raffarin reprend l’initiative

Il est vrai que plusieurs représentants de la majorité présidentielle ont fait état de leur désir de voir le dossier de l’éducation se régler sans aller jusqu’à un nouveau durcissement du mouvement de protestation engagé par les professeurs, qui pourrait aboutir au boycott des examens. Claude Goasguen, le vice-président du groupe UMP à l’Assemblée, a ainsi appelé à «repousser» le projet de loi sur l’autonomie des universités qui est considéré par les enseignants comme une privatisation déguisée. Le député UDF André Santini a quant à lui demandé de remettre «à plat le dossier car les enseignants ont le sentiment que le ciel leur tombe sur la tête de tous les côtés».

C’est vraisemblablement pour aller dans le sens de l’apaisement que la réunion, le 27 mai, d’un conseil interministériel sur l’éducation pour aborder les problèmes soulevés par les enseignants, a été décidée. Denis Bodequin, le secrétaire général de la FERC-CGT, a apprécié l’effort du gouvernement tout en regrettant qu’il arrive tard et en indiquant que les syndicats restaient fermes sur leurs revendications. «Nous verrons bien s’il s’agit de vraies négociations ou d’une parodie. Nous demandons le retrait des mesures sur la décentralisation et les retraites et ne nous contenterons pas de discussions sur des aménagements». François Chérèque, le secrétaire général de la CFDT, a pour sa part dénoncé la méthode du gouvernement qui consiste, en ce qui concerne les enseignants, à mettre «la charrue avant les bœufs» et à «réorganiser le système avant de définir les objectifs pour l’éducation».

Malgré tout, en reprenant lui-même l’initiative et en présidant le conseil interministériel, le Premier ministre répond d’une certaine manière à la pression des organisations syndicales qui se sont plaintes de l’absence de dialogue avec le ministre de l’Education nationale et son ministre délégué. Gérard Aschiéri, le secrétaire général de la FSU a expliqué que ces derniers les avaient «écoutés» mais ne leur avaient jamais «répondu». Et poursuivant son argumentaire, il a ajouté : «Nous ne demandons pas le départ de M. Ferry , ce n’est pas notre problème, mais nous voulons un interlocuteur».

Il n’en demeure pas moins que l’éventualité d’une démission de Luc Ferry a été envisagée par le ministre lui-même, qui a déclaré dans une interview à Paris Match, qu’il la présenterait «la joie au cœur» si cela pouvait «arranger le gouvernement». La balle est dans le camp de Jean-Pierre Raffarin.



par Valérie  Gas

Article publié le 22/05/2003