Drogue
Le retour de l’opium afghan
L’Afghanistan est redevenu en 2003 le principal producteur de pavot et le point de départ des trafics d’héroïne et d’opium vers l’Europe. Dans ce contexte, la France a invité les ministres de cinquante-cinq pays d’Asie centrale, du Caucase, des Balkans et d’Europe concernés par ce phénomène à se réunir à Paris, le 21 et le 22 mai, pour essayer de coordonner leurs actions dans la lutte contre le trafic de drogue dont les conséquences en terme de criminalité et de santé sont énormes.
La production d’opium est passée, en Afghanistan, de 185 tonnes en 2001 à 3 400 tonnes en 2002. Il y aurait ainsi plus de 70 000 hectares de terre plantés de pavot dans le pays à l’heure actuelle et l’Afghanistan est redevenu en quelques mois le premier producteur mondial. Près de 80% de l’héroïne consommée dans le monde est ainsi fabriquée grâce à l’opium afghan. Il s’agit là d’une conséquence directe de la chute du régime des Taliban qui avaient engagé une opération de nettoyage et avaient fait chuter la production d’opium de près de 90 % en 2001.
Après l’intervention militaire menée par les Américains et la mise en place d’un gouvernement local dirigé par Hamid Karzaï, les paysans ont rapidement repris une culture très rentable sans qu’aucun contrôle ne soit exercé sur cette activité illicite. On estime maintenant que 500 000 d’entre eux vivent des revenus du pavot dont le rendement est dix fois supérieur à celui de n’importe quelle autre production légale. Entre 3 et 6 millions d’Afghans en profitent aussi indirectement sur une population totale d’environ 16 millions de personnes. Et c’est bien là que se trouve une grande partie du problème. Dans un pays où règne désordre et insécurité, où le niveau de vie est extrêmement bas, comment convaincre des paysans réduits à la famine qu’ils ne doivent pas planter la seule culture qui leur rapporte un revenu correct et leur permet de nourrir leur famille. Peu importe de leur point de vue qu’ils alimentent les trafics de drogue internationaux qui partent d’Afghanistan.
Trouver des revenus de substitution
Dans ce contexte, la Grande-Bretagne a été chargée par les Nations unies d’aider les autorités afghanes à trouver les moyens d’éradiquer la culture du pavot dans le pays en proposant des revenus de substitution. Mais pour repartir sur des bases saines, il faudra de nombreuses années. Dans l’intervalle, les trafics qui partent d’Afghanistan risquent de perdurer. Et c’est dans ce cadre que la France a proposé, l’année dernière, lors du G8 de Whistler au Canada d’accueillir une conférence sur «les routes de la drogue» de l’Asie centrale à l’Europe et d’inviter tous les pays concernés à y participer.
Cette réunion se tient donc mercredi et jeudi à Paris, à la veille de la conférence des ministres des Affaires étrangères des pays du G8 auxquels seront présentées les conclusions obtenues. Tous les pays d’Asie centrale, des Balkans, du Caucase, d’Europe, qui ont été conviés ont répondu présents à l’exception du Turkménistan qui refuse «toute coopération internationale» sur cette question. Les ministres doivent dresser un état des lieux et envisager les moyens à mettre en œuvre pour obtenir une meilleure coordination en matière de lutte contre les trafics qui empruntent deux principaux itinéraires à partir de l’Afghanistan. Le premier passe par l’Iran, la Turquie et les Balkans et le deuxième par l’Asie centrale, la Russie et les pays Baltes.
Pour le moment, 90% des exportations d’opium et d’héroïne traversent les mailles des filets mis en place par les différentes polices. En Iran, par exemple, où transite la plus grande partie de la drogue en provenance d’Afghanistan, les autorités n’ont réussi à saisir en un an que 130 tonnes d’opium et d’héroïne malgré des efforts importants. Ce trafic est extrêmement juteux et la corruption qui lui est lié est donc proportionnelle aux profits potentiels. Elle touche tous les niveaux de la société: des douaniers aux policiers, des porteurs aux hauts fonctionnaires. Les groupes criminels organisés, en Russie, Albanie, Turquie notamment, n’hésitent pas à payer pour obtenir la bienveillance de tous les intermédiaires qui leur sont nécessaires et peuvent ainsi agir dans une quasi-impunité sur des «routes» qu’ils ont acheté. D’autre part, il semble que l’argent généré par la drogue participe à alimenter le financement du terrorisme international.
On note aussi aujourd’hui l’apparition de certains effets pervers du développement de ces trafics. Sur les «routes de la drogue», tous les pays deviennent petit à petit consommateurs. Le commerce ne se fait plus simplement en direction des pays riches d’Europe occidentale. Tous les Etats dans lesquels transitent les substances illicites voient se développer une consommation galopante d’autant plus rapide que souvent, les trafiquants paient leurs intermédiaires en les fournissant en doses. Il y aurait ainsi plus d’un million d’usagers en Iran, deux millions en Russie et 300 000 en Asie centrale. Pire, en même temps que le nombre de personnes dépendantes augmentent, la propagation des maladies transmissibles, au premier rang desquelles figure le sida, devient de plus en plus rapide. La drogue est décidément un fléau à plusieurs facettes.
Après l’intervention militaire menée par les Américains et la mise en place d’un gouvernement local dirigé par Hamid Karzaï, les paysans ont rapidement repris une culture très rentable sans qu’aucun contrôle ne soit exercé sur cette activité illicite. On estime maintenant que 500 000 d’entre eux vivent des revenus du pavot dont le rendement est dix fois supérieur à celui de n’importe quelle autre production légale. Entre 3 et 6 millions d’Afghans en profitent aussi indirectement sur une population totale d’environ 16 millions de personnes. Et c’est bien là que se trouve une grande partie du problème. Dans un pays où règne désordre et insécurité, où le niveau de vie est extrêmement bas, comment convaincre des paysans réduits à la famine qu’ils ne doivent pas planter la seule culture qui leur rapporte un revenu correct et leur permet de nourrir leur famille. Peu importe de leur point de vue qu’ils alimentent les trafics de drogue internationaux qui partent d’Afghanistan.
Trouver des revenus de substitution
Dans ce contexte, la Grande-Bretagne a été chargée par les Nations unies d’aider les autorités afghanes à trouver les moyens d’éradiquer la culture du pavot dans le pays en proposant des revenus de substitution. Mais pour repartir sur des bases saines, il faudra de nombreuses années. Dans l’intervalle, les trafics qui partent d’Afghanistan risquent de perdurer. Et c’est dans ce cadre que la France a proposé, l’année dernière, lors du G8 de Whistler au Canada d’accueillir une conférence sur «les routes de la drogue» de l’Asie centrale à l’Europe et d’inviter tous les pays concernés à y participer.
Cette réunion se tient donc mercredi et jeudi à Paris, à la veille de la conférence des ministres des Affaires étrangères des pays du G8 auxquels seront présentées les conclusions obtenues. Tous les pays d’Asie centrale, des Balkans, du Caucase, d’Europe, qui ont été conviés ont répondu présents à l’exception du Turkménistan qui refuse «toute coopération internationale» sur cette question. Les ministres doivent dresser un état des lieux et envisager les moyens à mettre en œuvre pour obtenir une meilleure coordination en matière de lutte contre les trafics qui empruntent deux principaux itinéraires à partir de l’Afghanistan. Le premier passe par l’Iran, la Turquie et les Balkans et le deuxième par l’Asie centrale, la Russie et les pays Baltes.
Pour le moment, 90% des exportations d’opium et d’héroïne traversent les mailles des filets mis en place par les différentes polices. En Iran, par exemple, où transite la plus grande partie de la drogue en provenance d’Afghanistan, les autorités n’ont réussi à saisir en un an que 130 tonnes d’opium et d’héroïne malgré des efforts importants. Ce trafic est extrêmement juteux et la corruption qui lui est lié est donc proportionnelle aux profits potentiels. Elle touche tous les niveaux de la société: des douaniers aux policiers, des porteurs aux hauts fonctionnaires. Les groupes criminels organisés, en Russie, Albanie, Turquie notamment, n’hésitent pas à payer pour obtenir la bienveillance de tous les intermédiaires qui leur sont nécessaires et peuvent ainsi agir dans une quasi-impunité sur des «routes» qu’ils ont acheté. D’autre part, il semble que l’argent généré par la drogue participe à alimenter le financement du terrorisme international.
On note aussi aujourd’hui l’apparition de certains effets pervers du développement de ces trafics. Sur les «routes de la drogue», tous les pays deviennent petit à petit consommateurs. Le commerce ne se fait plus simplement en direction des pays riches d’Europe occidentale. Tous les Etats dans lesquels transitent les substances illicites voient se développer une consommation galopante d’autant plus rapide que souvent, les trafiquants paient leurs intermédiaires en les fournissant en doses. Il y aurait ainsi plus d’un million d’usagers en Iran, deux millions en Russie et 300 000 en Asie centrale. Pire, en même temps que le nombre de personnes dépendantes augmentent, la propagation des maladies transmissibles, au premier rang desquelles figure le sida, devient de plus en plus rapide. La drogue est décidément un fléau à plusieurs facettes.
par Valérie Gas
Article publié le 21/05/2003