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Social

Education : le gouvernement lâche du lest

Les syndicats d’enseignants ont décidé de jouer la carte de la protestation consensuelle dans le conflit qui les oppose au gouvernement concernant la réforme des retraites mais surtout la décentralisation. Pas question de sacrifier l’intérêt des 630 000 candidats au bac en appelant, comme ils avaient menacé de le faire, les profs au boycott des épreuves prévues le 12 juin. Néanmoins le mouvement de protestation n’est pas terminé, et les enseignants sont incités à trouver d’autres moyens pour exprimer leur grogne. Cette preuve de bonne volonté a donné satisfaction au gouvernement qui a fait un certain nombre de concessions pour éviter l’épreuve de force.
La négociation fort mal engagée entre les enseignants et leur ministre Luc Ferry est, semble-t-il, sortie de la phase de crise aiguë. La table ronde qui les a réuni mardi 10 juin, jour de grève nationale contre la réforme des retraites, en présence du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy dont l’intervention semble avoir été fructueuse, a permis de faire «des avancées significatives». Et du coup, de lever la terrible menace de l’appel à la grève du bac tant redoutée par les élèves et leurs familles.

Les principaux syndicats de l’éducation (FSU, UNSA-Education, FAEN, FERC-CGT) sont, en effet, revenus à de meilleurs sentiments en déclarant mardi soir qu’ils étaient opposés à «toute forme» de boycott du bac, qu’il s’agisse de «blocages ou d’actions de nature à nuire au déroulement des examens». Malgré cet engagement solennel en faveur de la préservation des «intérêts des élèves», les organisations syndicales ont appelé leurs membres à faire du 12 juin un «nouveau temps fort d’expression, de grève et de manifestations». Que le gouvernement se le tienne pour dit : la décision de ne pas toucher au bac ne signifie pas que les enseignants renoncent à combattre les réformes proposées. Car les concessions acceptées par Luc Ferry et Nicolas Sarkozy ne donnent pas satisfaction à toutes les revendications exprimées.

Des concessions sur la décentralisation

Le gouvernement a néanmoins cédé sur plusieurs points. Il a annoncé l’abandon, envisagé dans le cadre de la décentralisation, du transfert aux collectivités locales de la gestion d’un certain nombre de personnels non enseignants : médecins scolaires, psychologues, conseillers d’orientation ou assistants du service social. Il a aussi confirmé le déblocage de 80 millions d’euros supplémentaires pour la rentrée 2003. Des fonds qui devraient être alloués aux postes d’assistants d’éducation et à la formation des personnels. Quant à «l’expérimentation» sur l’autonomie des lycées et des collèges, elle est reportée au printemps 2004. Tout comme l’avait été, dès la semaine dernière, le volet particulièrement décrié de la réforme qui concernait l’autonomie des universités.

La bonne volonté du gouvernement n’a pas été aussi loin que l’auraient souhaité les enseignants. Luc Ferry et Jean-Pierre Raffarin n’ont pas voulu abandonner tout simplement la décentralisation qui devrait coûte que coûte s’appliquer à une partie des personnels non enseignants. Près de 100 000 techniciens, ouvriers et personnels de service (TOS) qui assurent l’accueil, la restauration ou l’entretien dans les établissements scolaires devraient donc malgré tout être transférés aux régions. Seul le calendrier de mise en œuvre de ces mesures pourrait être assoupli. «On parle maintenant de transferts effectifs à la rentrée 2005 et non plus à la rentrée 2004», a expliqué Patrick Gonthier, le représentant de l’UNSA-Education. D’autre part, la réforme des retraites, et notamment le problème des fins de carrière et du mode de calcul des annuités, n’ont quasiment pas été abordés dans le cadre de ces négociations.

Dans un contexte social extrêmement tendu, il reste à savoir si la satisfaction relative des représentants syndicaux face aux ouvertures du gouvernement et leur appel à ne pas perturber le déroulement du bac seront entendus par les enseignants les plus irréductibles. D’ailleurs le ministre de l’Education nationale, qui a salué la décision des syndicats de ne pas boycotter les épreuves, n’a pas écarté totalement la possibilité de voir de «petits commandos» passer outre les directives nationales. Certains enseignants ont en effet prévenu qu’ils étaient prêts à tout pour obtenir le retrait de la réforme, même à noter l’ensemble des copies au-dessus de 15 sur 20… Un sabotage qui pour Luc Ferry aurait pour résultat de tourner «le bac en dérision».



par Valérie  Gas

Article publié le 11/06/2003