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Proche-Orient

Trêve : le Hamas fait durer le suspense

Les négociations de cessez-le-feu entre le Hamas et l’Autorité palestinienne ont pris fin samedi. Désormais, le mouvement islamiste délibère. Il devrait répondre dans les prochains jours aux demandes pressantes du Premier ministre Mahmoud Abbas de déposer les armes. Usé par les coups de boutoir de l’armée israélienne, le Hamas sait aussi que la population palestinienne est de plus en plus lasse de l’Intifada armé et des raids «de représailles» qu’elle engendre. Menacé par ailleurs d’une mise au ban généralisée de la communauté internationale, il laisse entendre depuis quelques semaines qu’il serait prêt à une trêve pour peu que l’armée israélienne cesse les assassinats ciblés de militants et ses incursions en zone autonome. De la solidité des garanties qui seront offertes au Hamas, dépend en partie la réponse que ses leaders donneront à Mahmoud Abbas. Entretien exclusif avec le cheikh Ahmed Yassine, le fondateur du mouvement et son guide spirituel.
De notre envoyé spécial à Gaza

RFI : L’assassinat ce samedi à Hébron d’Abdullah Qawasmeh, l’un des leaders du Hamas en Cisjordanie remet-il en cause les pourparlers en cours sur le cessez-le-feu ?

Cheikh Ahmed Yassine :
L’assassinat d’Abdulllah Qawasmeh montre que l’ennemi sioniste ne veut pas d’apaisement. Car la paix est une menace pour lui. Elle signifie tout simplement la mort du sionisme. Ceci dit, les pourparlers avec l’Autorité palestinienne sont finis. Désormais nous débattons au sein du mouvement et entre factions. Nous nous concentrons sur l’unité du peuple palestinien. Nous ferons savoir notre position dans quelques jours.

RFI : A quelles conditions le Hamas serait-il prêt à déclarer une trêve ?

AY :
Nous ferons savoir nos conditions lorsque nous dévoilerons notre position.

RFI : Par le passé, le Hamas a plus d’une fois tenté d’arriver à un cessez-le feu avec Israël. Toutes ces tentatives ont échoué. La situation est-elle plus propice aujourd’hui à la conclusion d’un tel accord ?

AY :
Ce sont les Israéliens qui ont fait échouer ces efforts. Peut être l’ennemi sioniste est-il davantage prêt aujourd’hui à remplir nos conditions ? S’il relâchait nos prisonniers et s’engageait à mettre fin à l’occupation, ce serait un feu vert pour l’apaisement.

RFI : Et après ? Quel est le but du Hamas : la création d’un État palestinien ou la destruction de l’État d’Israël ?

AY :
Tout d’abord, il faut rappeler que les sionistes nous ont agressés, qu’ils ont volé notre terre et violé ses lieux saints. Ils ont fait de nous des sans abris : aujourd’hui 6 millions de Palestiniens sont réfugiés (l’ONU ne reconnaît que 4 millions de Palestiniens comme réfugiés, ndlr) et 3 millions vivent sous occupation. Ce peuple veut être libre mais Israël est un État discriminateur. Les juifs veulent cette terre uniquement pour eux. Notre but est de la libérer afin d’y créer un État palestinien où musulmans, chrétiens et juifs pourront coexister.

RFI : Si la trêve échoue, craignez-vous le déclenchement d’une guerre civile entre l’Autorité palestinienne et les groupes armés ?

AY :
Nous sommes opposés à toute confrontation armée interne. Nos armes visent l’ennemi, pas l’Autorité. Ceci dit, si l’Autorité palestinienne, sous la pression israélienne et américaine, nous force à rendre nos armes ou bien à arrêter les attaques, alors nous refuserons.

RFI : En définitive, êtes-vous optimiste ? Pensez-vous qu’une trêve sera déclarée ?

AY :
Je n’ai jamais fait confiance à l’ennemi sioniste. Il a toujours rompu ses engagements. Mais je veux pouvoir montrer au monde la réalité de ce qui se passe ici. Ce que nous faisons et ce que Israël fait. De façon à pouvoir dire au président Bush : «regardez, qui est le véritable ennemi de la paix» ?



par Benjamin  Barthe

Article publié le 23/06/2003