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Algérie

Air France reprend ses vols sur Alger

Deux Airbus d’Air France ont atterri samedi matin sur l’aéroport Houari Boumediène d’Alger après huit ans et demi d’absence puisque la compagnie avait décidé de suspendre ses vols en 1994 à la suite d’une prise d’otages sanglante sur l’un de ses appareils. Cette reprise des vols, imposée malgré les réticences des syndicats de pilotes, dont certains estiment les conditions de sécurité insuffisantes, semble davantage liée à des enjeux politiques que commerciaux. Elle illustre sans ambiguïté le réchauffement des relations entre Paris et Alger.
Une salve d’applaudissements et quelques youyous ont accompagné l’atterrissage du premier Airbus d’Air France qui s’est posé samedi à 8h45 heure locale –7h45 GMT– sur le tarmac de l’aéroport Houari Boumediène d’Alger en provenance de Paris. L’événement était très attendu et côté algérien, une fois n’est pas coutume, des hôtesses ont accueilli les 157 passagers du vol AF 3538 avec des bouquets de fleurs. Le ministre français des Transports, Gilles de Robien, accompagné du PDG d’Air France, Jean-Cyril Spinetta, et d’une délégation d’industriels, se trouvait à bord de ce vol, le premier depuis huit ans et demi de la compagnie française vers l’Algérie. A sa descente d’avion il a été accueilli par son homologue Abdelmalek Sellal. «La réouverture de cette ligne revêt un caractère symbolique alors même que l’année de l’Algérie est célébrée en France», avait affirmé le ministre français en soulignant que «politiquement, cette décision était le signe annonciateur d’une coopération encore plus étroite, plus riche et plus intense» entre les deux pays.

Et de fait, la reprise des vols d’Air France vers l’Algérie, expliquent de nombreux observateurs, paraît plus dictée par des considérations politiques que commerciales. Un analyste parisien n’hésite d’ailleurs pas à affirmer que la compagnie française «y va à reculons que c’est l’Etat qui l’y pousse». La lune de miel entre Paris et Alger, renforcée par la visite début mars du président Jacques Chirac, risquait en effet d’être sérieusement mise à mal si Air France continuait à bouder l’Algérie, d’autant plus que d’autres compagnies comme Alitalia ou Turkish Airlines ont déjà repris leur vol.

Une prise d’otages sanglante

Le 24 décembre 1994, quatre hommes du Groupe Islamique Armé (GIA) s’étaient emparés d’un Airbus d’Air France à l’aéroport d’Alger. Ils avaient détourné l’avion sur Marseille le 26 et exécuté trois personnes, avant d’être eux-même abattus par un commando de gendarmes français. La compagnie française, suivie par d’autres transporteurs européens, avait alors décidé de suspendre tous ces vols vers l’Algérie. Après des années de tractations qui ont buté sur des problèmes de sécurité, Air France a annoncé le mois dernier la reprise de trois liaisons aériennes quotidiennes sur Alger depuis Paris et Marseille. La compagnie qui exigeait notamment de faire assurer par des agents de sécurité français le contrôle de ses passagers à Alger, y a finalement renoncé, son PDG affirmant qu’«un compromis sur ce point avait été trouvé».

Les syndicats de pilotes d’Air France, qui ont dicté une consigne de refus de vol, ont vivement critiqué la reprise des liaisons sur Alger, estimant notamment «impossible de garantir la sécurité des passagers et des membres d’équipages». Ils ont même accusé la compagnie d’affecter aux vols vers l’Algérie de jeunes co-pilotes en période d’essai et qui ne peuvent donc pas refuser de voler. «On ne peut pas exiger ni même imaginer des mesures plus ambitieuses, plus efficaces que celles qui ont été arrêtées», a pour sa part rétorqué le PDG d’Air France. Selon Jean-Cyril Spinetta, «sur aucune autre escale au monde, il n’y a de mesures de sécurité plus exigeantes que celles qui sont mises en œuvre pour l’escale d’Alger».

Outre un dispositif standard, quoique particulièrement serré, au départ d'Orly, plusieurs mesures spécifiques ont été mises en oeuvre pour sécuriser la liaison. Le cockpit de l'A-321 est ainsi isolé du reste de la cabine par une porte blindée et une caméra de surveillance permet d'identifier quiconque souhaite accéder au poste de pilotage. Plusieurs agents de sécurité en civil seront en outre à bord de l'avion et auront une mission de protection, en vol comme pendant l’escale. Au départ d’Alger, les mesures de sécurités sont encore plus renforcées. Les passagers et leurs bagages à main subiront trois contrôles successifs avant d’accéder à l’avion, le dernier se faisant au bas de la passerelle d’embarquement. Les personnels intervenant dans l’avion seront systématiquement fouillés et la soute comme la cabine seront inspectées par des brigades canines. Que ce soit à Alger, Paris ou Marseille, les bagages seront enfin contrôlés, soit par des chiens spécialement dressés, soit par un appareil détecteur d’explosifs.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 28/06/2003