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Serbie

Arrestation du dernier accusé serbe de Vukovar

Veselin Sljivancanin, le dernier membre du «trio de Vukovar» encore en fuite, a été arrêté dans la nuit de jeudi à vendredi par la police serbe, en plein centre de Belgrade, au prix de violents affrontements avec les adversaires du TPI.
De notre correspondant à Belgrade

Belgrade vient de connaître une nuit d’émeute. Dans la soirée de jeudi, la police a réussi à localiser Veselin Sljivancanin, un ancien officier de l’armée yougoslave, considéré comme le principal responsable des massacres de Vukovar. Sljivancanin avait été inculpé par le TPI en 1995, et il était en fuite depuis la chute de Slobodan Milosevic, en octobre 200. Selon certaines sources, il aurait pris le risque de revenir dans son appartement de Belgrade pour fêter son cinquantième anniversaire.

La police spéciale a dû fouiller l’immeuble durant près de dix heures et défoncer une porte blindée avant de mettre la main sur le fugitif. Dans le même temps, des heurts violents ont éclaté entre la police et près d’un millier de partisans de l'ancien officier rassemblés devant l’immeuble, dont de nombreux supporters des clubs de football belgradois. Les manifestants ont jeté des pierres sur la police et incendié des véhicules.

Au moins sept personnes ont été blessées par la police qui a utilisé des gaz lacrymogènes et des balles de caoutchouc pour repousser les partisans de Sljivancanin. C’est la première fois que les opposants au TPI tentent ainsi d’empêcher physiquement une arrestation.

Sljivancanin a été inculpé en 1995 par le TPI pour sa complicité présumée dans le massacre de 200 civils croates et non-serbes après la prise par les forces serbes de la ville croate de Vukovar, en 1991. Les deux co-accusés dans cette affaire, Mile Mrksic et le capitaine Radic, ont été respectivement livrés au TPI au printemps 2002 et 2003. Veselin Sljivancanin avait menacé de se suicider plutôt que de se laisser arrêter.

Une partie subtile

Son arrestation intervient alors que dans le gouvernement américain doit notifier au Congrès dans deux jours le degré de coopération de Belgrade avec le TPI. Si Washington présente un rapport positif, le Congrès devrait débloquer une aide d'environ 110 millions de dollars pour cette année. Depuis des mois, les USA concentraient leurs exigences sur deux suspects : Veselin Sljivancanin et l’ancien général des Serbes de Bosnie, Ratko Mladic.

Avec l’arrestation de Sljivancanin, la Serbie a quasiment rempli son contrat, et presque tous les inculpés serbes ont été remis à la juridiction internationale, à la seule exception, mais de taille, de Ratko Mladic et de Radovan Karadzic. Il y a deux jours, l’ancien chef de la Sécurité d’État, Jovica Stanisic, arrêté au lendemain de l’assassinat du Premier ministre Djindjic, le 13 mars dernier, avait déjà pris la route de La Haye.

Si Karadzic se cache probablement toujours dans les montagnes de l’est de la Bosnie et du Monténégro, le doute subsiste à propos de Ratko Mladic. La procureure générale du TPI, Carla Del Ponte, martèle qu’elle disposerait d’information prouvant que Mladic se cache bien en Serbie, ce que dément catégoriquement le gouvernement de Belgrade.

En réalité, les autorités serbes jouent une partie subtile : si elles ne sont réellement pas en mesure de localiser Ratko Mladic, elles doivent démontrer leur bonne volonté en arrêtant et en transférant d’autres inculpés de moindre poids. Mais après l’arrestation de Veselin Sljivancanin, la Serbie ne dispose plus d’autre «joker» pour faire patienter la communauté internationale qui attend toujours la livraison de Ratko Mladic.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 13/06/2003