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Immigration

Pour la défense des droits des femmes immigrées en France

Mariage forcé, répudiation, polygamie, excision: le Haut conseil à l’intégration recommande au gouvernement français de prendre des mesures pour garantir le respect des droits civils des femmes immigrées.
Aujourd’hui en France, quelques 70 000 jeunes filles sont concernées par la question des mariages forcés, 35 000 seraient excisées ou menacées de l’être et même si la polygamie n’est plus autorisée en France, dans la pratique les mariages polygames conclus à l’étranger bénéficient d’une certaine reconnaissance. En mettant en avant ces chiffres (il s’agit d’estimations) le Haut conseil à l’intégration essaye d’évaluer les contours de la question qui lui a été posée à l’automne dernier par Jean-Pierre Raffarin: comment mieux faire respecter en France les droits des femmes immigrées ?

Dans l’avis qu’il vient de remettre au premier ministre français, le Haut conseil à l’intégration présidé par la philosophe Blandine Kriegel, demande au chef du gouvernement de prendre des mesures pour que les droits civils des femmes immigrées soient respectés et pour qu’en France le droit français prime toujours sur celui du pays d’origine.

Dans un contexte juridique où se heurtent les codes de la famille du pays d’origine, les conventions internationales signées par la France et les lois françaises, le premier obstacle identifié par le Haut conseil est l’ignorance de leurs droits dans laquelle sont maintenues les femmes immigrées. Par exemple, les femmes d’origine maghrébine ignorent souvent qu’elles conservent la nationalité de leur père (en plus éventuellement de la nationalité française) et qu’elles peuvent se voir imposer des décisions de justice prises dans leur pays d’origine.

Garantir l’égalité entre époux

La deuxième difficulté soulignée par les sages est d’ordre strictement juridique. Elle concerne les conventions bilatérales signées entre la France et le pays d’origine des immigrées. Certaines de ces conventions (Maroc, Algérie, Egypte, Liban, Cameroun et Mauritanie) reconnaissent ainsi le droit à la répudiation de la femme par le mari ce que le droit français ne reconnaît absolument pas. Pas plus que la polygamie qui figure également dans certaines conventions.

Le Haut conseil remarque que ces conventions avaient pour objet de renforcer les règles favorables à la garde des enfants mais qu’elles ont généré des effets pervers en autorisant l’application de textes qui sont en contradiction avec la loi française. Le Haut conseil remarque ainsi que la justice française a été amenée à se prononcer sur des cas où une femme demandait à son ex-mari de contribuer aux charges du divorce et où l’ex-époux faisait valoir qu’il avait répudié sa femme devant la justice du pays d’origine.

Dans tous les cas de figure, les sages du Haut conseil à l’intégration demandent que la loi française puisse s’appliquer sur le territoire français et estiment que la France «doit garantir l’égalité entre époux à toute personne relevant de sa juridiction».
Le Haut conseil constate que la plupart des litiges naissent à l’occasion de voyages de retour au pays (répudiation, mariage forcé, mariage polygamique) ou même en l’absence de la femme. Dans ces cas de figure, lorsque la justice française est saisie, les sages recommandent l’application de la «loi du domicile», c’est à dire la loi française en l’occurrence pour les femmes immigrées.

En ce qui concerne les mariages forcés dont le nombre serait en augmentation en France selon différentes associations entendues par les sages, le Haut conseil propose que le code civil français soit modifié de manière à permettre l’annulation d’un mariage quand le consentement a été obtenu «par la fraude, la menace ou la contrainte». En outre dans le cas où la victime est mineure, les sages demandent que l’époux puisse être poursuivi pour viol et les parents de la jeune fille pour complicité.

Ecouter également:

Le reportage de Catherine Monnet (3 juin 2003, 1’30’’).



par Philippe  Couve

Article publié le 03/07/2003