Proche-Orient
Abbas met sa démission dans la balance
Le Premier ministre palestinien, mis en cause pour sa faiblesse envers Israël, a démissionné du Comité central du Fatah et annulé une réunion avec Ariel Sharon.
Les Américains sont très inquiets : leur nouvelle carte maîtresse au Proche-Orient s’appelle Mahmoud Abbas, dit Abou Mazen. Il est le Premier ministre palestinien prévu par la Feuille de route et imposé par le Quartette à un Yasser Arafat plus que réticent. Mahmoud Abbas s’est à de nombreuses reprises prononcé contre la militarisation de l’intifada, et depuis sa nomination, il s’est engagé à lutter contre le terrorisme palestinien. Mais aujourd’hui, Mahmoud Abbas se dit prêt à jeter l’éponge.
Très impopulaire dans les territoires palestiniens en raison de sa coopération avec Israël, il a été l’objet d’acerbes critiques au sein de son propre mouvement, le Fatah, pour n’avoir pas défendu avec assez de vigueur la cause des réfugiés palestiniens de la diaspora (droit au retour) et celle des prisonniers palestiniens détenus par Israël. Mardi, Mahmoud Abbas en a tiré les conséquences en annulant une réunion prévue ce mercredi avec Ariel Sharon et en démissionnant du Comité central du Fatah. Cette démission a été unanimement rejetée par cet organisme, mais la double-décision de Mahmoud Abbas place les dirigeants palestiniens et israéliens devant un choix difficile.
Abbas bluffe-t-il ? Rien n’est moins sûr. Le numéro deux du Fatah, qu’il a fondé au Koweït en 1959 avec une poignée de compagnons dont Yasser Arafat ne se laisse pas facilement intimider. Les compagnons du Premier ministre palestinien, aussi critiques soient-ils à l’encontre de la politique suivie par celui-ci, savent bien que la seule alternative à la Feuille de route dont il incarne la mise en œuvre est le retour à une répression tous azimuts de la part d’Israël avec un soutien sans réserve de l’administration Bush. Depuis près de trois ans, les Palestiniens ont payé le prix fort pour savoir exactement à quoi s’attendre.
L’ardent soutien de George Bush
Ariel Sharon n’a pas davantage intérêt à un échec immédiat de Mahmoud Abbas. Certes, bien malgré lui, il s’est engagé dans le processus de la Feuille de route à la demande pressante de George Bush. Mais d’une part, Sharon ne veut pas perdre son principal atout qui est l’amitié et le soutien du président américain, d’autre part, les dirigeants israéliens commencent à apprécier cette trêve de la violence après trois ans d’affrontements qui ont coûté cher également à Israël, non seulement en vie humaine, mais sur le plan économique. Israël est entré dans une récession et une crise sociale sans précédent depuis des décennies et l’état de guerre permanente ne présente pas que des avantages pour Ariel Sharon. C’est pourquoi, de façon tout à fait inhabituelle, le gouvernement israélien s’est bien gardé de critiquer l’annulation de la rencontre par Mahmoud Abbas
Restent les États-Unis. George Bush, contre toute attente, s’est personnellement engagé, et vigoureusement, en faveur de la mise en œuvre de la Feuille de route. Son ardent soutien à Mahmoud Abbas n’a d’égal que sa répulsion pour Yasser Arafat. Il s’est engagé publiquement et vis-à-vis de ses alliés, notamment Tony Blair, à mettre en pratique sa «vision» d’un Moyen-Orient où coexisteraient en 2005 deux États indépendants et pacifiques, Israël et la Palestine. Cette approche semble séduire une large partie de l’électorat américain, notamment juif, beaucoup plus ouvert sur le sujet que l’extrême-droite chrétienne pro-israélienne. L’intransigeance d’Israël sur certains dossiers menace de faire capoter le grand-œuvre de la présidence Bush. D’où les pressions américaines pour qu’Israël se montre plus souple sur la question des prisonniers politiques palestiniens à libérer, la reprise de l’aide financière américaine directe à l’Autorité palestinienne pour les projets à vocation sociale. L’administration Bush a également critiqué la lenteur d’Israël à évacuer les «colonies illégales» (en réalité, quelques caravanes ou bâtiments préfabriqués) comme il s’y était engagé. L’émissaire américain chargé de surveiller le processus de paix John Wolf a fait remarquer aux Israéliens qu’à ce jour, une seule de ces colonies avait véritablement été évacuée, les autres ayant été promptement remontées une fois que l’armée avait tourné les talons.
Mahmoud Abbas, que l’ambassadeur américain en Israël Dan Kurtzer a présenté comme un «homme faible» semble aujourd’hui détenir l’essentiel des cartes, en raison à la fois de sa faiblesse et de sa détermination. La dissuasion du faible aux forts, en quelque sorte.
Très impopulaire dans les territoires palestiniens en raison de sa coopération avec Israël, il a été l’objet d’acerbes critiques au sein de son propre mouvement, le Fatah, pour n’avoir pas défendu avec assez de vigueur la cause des réfugiés palestiniens de la diaspora (droit au retour) et celle des prisonniers palestiniens détenus par Israël. Mardi, Mahmoud Abbas en a tiré les conséquences en annulant une réunion prévue ce mercredi avec Ariel Sharon et en démissionnant du Comité central du Fatah. Cette démission a été unanimement rejetée par cet organisme, mais la double-décision de Mahmoud Abbas place les dirigeants palestiniens et israéliens devant un choix difficile.
Abbas bluffe-t-il ? Rien n’est moins sûr. Le numéro deux du Fatah, qu’il a fondé au Koweït en 1959 avec une poignée de compagnons dont Yasser Arafat ne se laisse pas facilement intimider. Les compagnons du Premier ministre palestinien, aussi critiques soient-ils à l’encontre de la politique suivie par celui-ci, savent bien que la seule alternative à la Feuille de route dont il incarne la mise en œuvre est le retour à une répression tous azimuts de la part d’Israël avec un soutien sans réserve de l’administration Bush. Depuis près de trois ans, les Palestiniens ont payé le prix fort pour savoir exactement à quoi s’attendre.
L’ardent soutien de George Bush
Ariel Sharon n’a pas davantage intérêt à un échec immédiat de Mahmoud Abbas. Certes, bien malgré lui, il s’est engagé dans le processus de la Feuille de route à la demande pressante de George Bush. Mais d’une part, Sharon ne veut pas perdre son principal atout qui est l’amitié et le soutien du président américain, d’autre part, les dirigeants israéliens commencent à apprécier cette trêve de la violence après trois ans d’affrontements qui ont coûté cher également à Israël, non seulement en vie humaine, mais sur le plan économique. Israël est entré dans une récession et une crise sociale sans précédent depuis des décennies et l’état de guerre permanente ne présente pas que des avantages pour Ariel Sharon. C’est pourquoi, de façon tout à fait inhabituelle, le gouvernement israélien s’est bien gardé de critiquer l’annulation de la rencontre par Mahmoud Abbas
Restent les États-Unis. George Bush, contre toute attente, s’est personnellement engagé, et vigoureusement, en faveur de la mise en œuvre de la Feuille de route. Son ardent soutien à Mahmoud Abbas n’a d’égal que sa répulsion pour Yasser Arafat. Il s’est engagé publiquement et vis-à-vis de ses alliés, notamment Tony Blair, à mettre en pratique sa «vision» d’un Moyen-Orient où coexisteraient en 2005 deux États indépendants et pacifiques, Israël et la Palestine. Cette approche semble séduire une large partie de l’électorat américain, notamment juif, beaucoup plus ouvert sur le sujet que l’extrême-droite chrétienne pro-israélienne. L’intransigeance d’Israël sur certains dossiers menace de faire capoter le grand-œuvre de la présidence Bush. D’où les pressions américaines pour qu’Israël se montre plus souple sur la question des prisonniers politiques palestiniens à libérer, la reprise de l’aide financière américaine directe à l’Autorité palestinienne pour les projets à vocation sociale. L’administration Bush a également critiqué la lenteur d’Israël à évacuer les «colonies illégales» (en réalité, quelques caravanes ou bâtiments préfabriqués) comme il s’y était engagé. L’émissaire américain chargé de surveiller le processus de paix John Wolf a fait remarquer aux Israéliens qu’à ce jour, une seule de ces colonies avait véritablement été évacuée, les autres ayant été promptement remontées une fois que l’armée avait tourné les talons.
Mahmoud Abbas, que l’ambassadeur américain en Israël Dan Kurtzer a présenté comme un «homme faible» semble aujourd’hui détenir l’essentiel des cartes, en raison à la fois de sa faiblesse et de sa détermination. La dissuasion du faible aux forts, en quelque sorte.
par Olivier Da Lage
Article publié le 09/07/2003