Sida
Quand la recherche progresse, le virus mute
Quarante-deux millions de personnes vivant avec le VIH dans le monde attendent le vaccin contre le sida comme une délivrance. Mais pour le moment, tous les essais ont donné des résultats décevants. En attendant cette découverte miracle, les scientifiques progressent dans le domaine des traitements. Ils ont mis au point plusieurs générations de médicaments anti-sida dont l’utilisation permet de ralentir l’évolution de l’infection à VIH dans l’organisme. A l’occasion de la 2ème Conférence de l’International Aids Society (IAS), les 5 000 scientifiques réunis à Paris du 13 au 16 juillet ont fait le point sur les progrès de la recherche et les perspectives qu’ils ouvrent pour les malades.
L’annonce au début de l’année 2003 de l’échec du premier essai à grande échelle réalisé sur l’homme d’un candidat-vaccin préventif contre le sida, développé par la société américaine Vaxgen, a suscité une grosse déception. Les résultats obtenus pour protéger du virus les quelque 5 000 volontaires répartis entre les Etats-Unis, le Canada, les Pays-Bas et Porto Rico n’ont pas été concluants. Aucune réduction «statistiquement significative» de l’infection n’a été enregistrée au sein des 3130 volontaires qui avaient reçu Aidsvax par rapport à ceux qui avaient reçu le placebo.
Pour réaliser ce candidat-vaccin, l’équipe du professeur Philip Berman a décidé d’agir sur le système immunitaire des malades en suscitant la fabrication d’anticorps capables d’empêcher le VIH d’envahir les cellules. Le prototype Aidsvax n’a pas fonctionné et a fermé une porte dans la voie des anticorps neutralisants. Malgré tout, les chercheurs n’ont pas renoncé à combiner ce type de vaccin avec d’autres pour obtenir l’effet souhaité. Et une découverte récente pourrait permettre d’améliorer les résultats. Les chercheurs du Scripps Research Institute ont en effet réussi à décrypter la structure d’un anticorps présent chez des patients dont l’organisme est résistant au VIH. En partant de cette découverte, les chercheurs pourraient essayer de réaliser un antigène qui engagerait la production de l’anticorps capable de combattre le virus dans l’organisme d’un malade.
Le vaccin mobilise les chercheurs
De nombreuses autres équipes dans le monde travaillent sur les vaccins contre le sida et explorent des voies différentes. Celle du professeur Frédéric Tangy de l’Institut Pasteur a, par exemple, pour objectif d’utiliser le vaccin de la rougeole pour composer un «vaccin recombinant» en introduisant des gènes du sida dans le génome du virus atténué de la rougeole. Une autre piste consiste à tenter d’agir sur l’immunité cellulaire et de renforcer les cellules T capables de détruire les cellules infectées. Des chercheurs australiens ont aussi annoncé récemment qu’ils allaient procéder à des essais sur des êtres humains pour vérifier l’effet d’un vaccin qu’ils ont testé en laboratoire. Ce produit est fabriqué à partir de l’ADN modifiée du VIH associée au virus de la diphtérie aviaire. Les scientifiques espèrent ainsi permettre à l’organisme de reconnaître les composantes du virus du sida et susciter en même temps la production de cellules capable de le vaincre.
L’objectif est, comme l’a rappelé le professeur Lawrence Corey de l’Université de Washington lors de la conférence de l’IAS, d’obtenir «un vaccin immunogène et efficace». Pour arriver à ce résultat, les chercheurs essaient de plus en plus de combiner les effets de virus atténués (Alphavirus, Adenovirus, Poxvirus) avec, par exemple, des vaccins ADN pour amorcer ou booster le processus de lutte contre le VIH.
Mais la mise au point d’un vaccin est toujours une entreprise longue et difficile. Dans le cas du sida, elle est compliquée par un certain nombre d’obstacles spécifiques. Au premier rang des difficultés figure la principale caractéristique du virus du sida : sa capacité à muter, à devenir résistant et à défier les défenses de l’organisme. Dès que l’on croit l’avoir cerné, on découvre qu’il a encore changé. D’autre part, dans le cadre des recherches sur le sida les tests sur des modèles animaux, étapes indispensables, ne sont pas toujours performants. Enfin, l’utilisation du VIH atténué pour fabriquer un vaccin semble être une option trop dangereuse car les chercheurs craignent que celui-ci ne demeure pathogène. L’enjeu est donc non seulement de trouver un vaccin qui marche mais qui ne soit pas toxique. Et à ce niveau aussi les chercheurs ont un grand défi à relever.
Si les essais déjà réalisés permettent malgré tout d’être plus optimiste aujourd’hui quant à l’avenir de la recherche vaccinale, les principales avancées réalisées ces dernières années concernent surtout la mise au point de traitements qui ont redonné espoir aux malades. L’arrivée des trithérapies en 1996 a été de ce point de vue très importante. La combinaison de plusieurs molécules pour soigner les patients a permis de surmonter certaines résistances apparues chez des malades déjà traités à partir d’un seul antirétroviral. Une nouvelle classe de médicaments antisida, les inhibiteurs de la fusion du VIH, arrive aujourd’hui sur le marché avec le T-20 ou Fuzeon mis au point par les laboratoires Roche. Ce dernier innove car il bloque l’entrée (fusion) du virus dans la cellule immunitaire humaine alors que les inhibiteurs de la transcriptase inverse, par exemple, empêchent la réplication du virus dans les cellules.
Les spécialistes estiment que cette nouvelle molécule devrait permettre de soigner des patients sur lesquels les traitements disponibles n’ont plus d’effet. Mais il présente deux inconvénients : son prix exorbitant (52 euros par jour) et son mode d’administration (deux fois par jour par voie intraveineuse). Dans ces conditions, le Fuzeon risque de rester encore une fois réservé aux patients européens et américains. Car il y a peu de chance que les malades des pays du Sud en bénéficient avant longtemps.
2ème Conférence de l'International Aids Society
Pour réaliser ce candidat-vaccin, l’équipe du professeur Philip Berman a décidé d’agir sur le système immunitaire des malades en suscitant la fabrication d’anticorps capables d’empêcher le VIH d’envahir les cellules. Le prototype Aidsvax n’a pas fonctionné et a fermé une porte dans la voie des anticorps neutralisants. Malgré tout, les chercheurs n’ont pas renoncé à combiner ce type de vaccin avec d’autres pour obtenir l’effet souhaité. Et une découverte récente pourrait permettre d’améliorer les résultats. Les chercheurs du Scripps Research Institute ont en effet réussi à décrypter la structure d’un anticorps présent chez des patients dont l’organisme est résistant au VIH. En partant de cette découverte, les chercheurs pourraient essayer de réaliser un antigène qui engagerait la production de l’anticorps capable de combattre le virus dans l’organisme d’un malade.
Le vaccin mobilise les chercheurs
De nombreuses autres équipes dans le monde travaillent sur les vaccins contre le sida et explorent des voies différentes. Celle du professeur Frédéric Tangy de l’Institut Pasteur a, par exemple, pour objectif d’utiliser le vaccin de la rougeole pour composer un «vaccin recombinant» en introduisant des gènes du sida dans le génome du virus atténué de la rougeole. Une autre piste consiste à tenter d’agir sur l’immunité cellulaire et de renforcer les cellules T capables de détruire les cellules infectées. Des chercheurs australiens ont aussi annoncé récemment qu’ils allaient procéder à des essais sur des êtres humains pour vérifier l’effet d’un vaccin qu’ils ont testé en laboratoire. Ce produit est fabriqué à partir de l’ADN modifiée du VIH associée au virus de la diphtérie aviaire. Les scientifiques espèrent ainsi permettre à l’organisme de reconnaître les composantes du virus du sida et susciter en même temps la production de cellules capable de le vaincre.
L’objectif est, comme l’a rappelé le professeur Lawrence Corey de l’Université de Washington lors de la conférence de l’IAS, d’obtenir «un vaccin immunogène et efficace». Pour arriver à ce résultat, les chercheurs essaient de plus en plus de combiner les effets de virus atténués (Alphavirus, Adenovirus, Poxvirus) avec, par exemple, des vaccins ADN pour amorcer ou booster le processus de lutte contre le VIH.
Mais la mise au point d’un vaccin est toujours une entreprise longue et difficile. Dans le cas du sida, elle est compliquée par un certain nombre d’obstacles spécifiques. Au premier rang des difficultés figure la principale caractéristique du virus du sida : sa capacité à muter, à devenir résistant et à défier les défenses de l’organisme. Dès que l’on croit l’avoir cerné, on découvre qu’il a encore changé. D’autre part, dans le cadre des recherches sur le sida les tests sur des modèles animaux, étapes indispensables, ne sont pas toujours performants. Enfin, l’utilisation du VIH atténué pour fabriquer un vaccin semble être une option trop dangereuse car les chercheurs craignent que celui-ci ne demeure pathogène. L’enjeu est donc non seulement de trouver un vaccin qui marche mais qui ne soit pas toxique. Et à ce niveau aussi les chercheurs ont un grand défi à relever.
Si les essais déjà réalisés permettent malgré tout d’être plus optimiste aujourd’hui quant à l’avenir de la recherche vaccinale, les principales avancées réalisées ces dernières années concernent surtout la mise au point de traitements qui ont redonné espoir aux malades. L’arrivée des trithérapies en 1996 a été de ce point de vue très importante. La combinaison de plusieurs molécules pour soigner les patients a permis de surmonter certaines résistances apparues chez des malades déjà traités à partir d’un seul antirétroviral. Une nouvelle classe de médicaments antisida, les inhibiteurs de la fusion du VIH, arrive aujourd’hui sur le marché avec le T-20 ou Fuzeon mis au point par les laboratoires Roche. Ce dernier innove car il bloque l’entrée (fusion) du virus dans la cellule immunitaire humaine alors que les inhibiteurs de la transcriptase inverse, par exemple, empêchent la réplication du virus dans les cellules.
Les spécialistes estiment que cette nouvelle molécule devrait permettre de soigner des patients sur lesquels les traitements disponibles n’ont plus d’effet. Mais il présente deux inconvénients : son prix exorbitant (52 euros par jour) et son mode d’administration (deux fois par jour par voie intraveineuse). Dans ces conditions, le Fuzeon risque de rester encore une fois réservé aux patients européens et américains. Car il y a peu de chance que les malades des pays du Sud en bénéficient avant longtemps.
2ème Conférence de l'International Aids Society
par Valérie Gas
Article publié le 15/07/2003 Dernière mise à jour le 29/11/2005 à 15:54 TU