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Environnement

L’Europe est à sec

Chaleur et temps sec sont décidément les deux paramètres météorologiques incontournables de l’été en Europe. Les uns à la suite des autres, les pays sont obligés de prendre des mesures pour réduire la consommation d’eau et gérer sa distribution en fonction des besoins des agriculteurs et des industriels. Sans oublier que la sécheresse augmente le risque d’incendie.
Neuf mille hectares de forêt et de garrigue ont été détruits en 24 heures dans le département du Var, au sud de la France. Il s’agit de l’incendie le plus important depuis 15 ans dans cette région. Plus de 5 000 personnes présentes dans les zones exposées ont d’ailleurs été évacuées. Et les autorités sont sur le qui-vive pour détecter le moindre départ de feu qui dans un contexte de canicule peut rapidement prendre une ampleur incontrôlable.

Depuis les grands incendies qui ont commencé à ravager la Corse au début du mois de juillet détruisant près de 1 700 hectares de végétation, de nombreuses régions ont été touchées en France par le feu. Au Nord de Nice, par exemple, il a fallu mobiliser de gros moyens pour venir à bout d’un incendie qui a ravagé 150 hectares de pinède, il y a une dizaine de jours. Les Landes, la Gironde, le Gard, les Alpes de Haute Provence, entre autres, ont aussi dû faire face à des incendies violents.

Le même phénomène touche la plupart des pays européens. En Italie, plusieurs incendies ont ravagé la Sicile, la Sardaigne, la Calabre, la Toscane, le Lazio. Au Portugal, cinq grands incendies ont eu lieu dans les montagnes du centre et du nord du pays : plus d’un millier de pompiers ont été mobilisés pour les combattre et un berger a été victime des flammes.

Des mesures d’urgence

Il faut dire que le risque d’incendie qui resurgit traditionnellement au retour de la saison chaude, est accentué cette année par l’absence de pluie et les chaleurs très élevées auxquelles l’Europe fait face depuis plusieurs mois. Isabelle Baret de Météo France explique que «le dessèchement de la végétation est exceptionnel» pour un mois de juillet. En France, toutes les régions situées à l’Est d’une ligne Nancy-Toulouse sont en situation de déficit pluviométrique. Et certaines journées du mois de juillet ont été marquées par des records de températures : durant le week-end du 14 juillet, on a enregistré 38 degrés à Lyon et à Toulouse, 36 à Paris. Malgré de violents orages qui ont fait quatre victimes dans le Sud du pays, la pluie n’est décidément pas au rendez-vous et de toute manière, les épisodes pluvieux de ce type n’ont pas l’effet souhaité. Patrick Galois de Météo France explique ainsi que «les pluies efficaces sont celles de l’automne, de l’hiver, du printemps» car «les pluies orageuses de l’été ne s’infiltrent pas dans les sols». Elles ne peuvent donc pas compenser la baisse des nappes phréatiques observée depuis le printemps dans l’ensemble du pays.

Malgré tout, et c’est là que se situe l’une des principales différences avec la dernière grande sécheresse vécue par la France en 1976, le déficit pluviométrique a commencé plus tard. L’hiver a été bien arrosé. A tel point que l’on a même redouté à un moment de voir la Seine, la rivière qui traverse Paris, déborder. Ce n’est qu’à partir du mois de février que la pluie a commencé à manquer. En 1976, la sécheresse avait débuté plus tôt, dès le mois de décembre 1975 et elle avait duré jusqu’à la fin du mois d’août.

Dans le reste de l’Europe, la situation hydrologique est tout aussi préoccupante. En Italie, le Pô, qui traverse huit régions du pays entre les Alpes et la mer Adriatique, enregistre par endroit une baisse de niveau de plus de sept mètres. Le Tibre qui traverse Rome n’est pas en meilleure forme : son débit a chuté de 170 mètres cubes par secondes à 80. En Autriche, les autorités estiment que le mois de juin 2003 a été le plus chaud depuis le 19ème siècle. Le niveau du Danube est tellement bas que les bateaux touristiques ne peuvent plus emprunter le canal qui traverse Vienne. En Roumanie, en République tchèque, en Pologne, en Hongrie, la situation est identique.

Partout, cette sécheresse exceptionnelle a des répercussions sur les activités économiques. Au premier rang desquelles l’agriculture. En France, des mesures de restriction d’eau ont été prises dans 34 départements pour subvenir aux besoins pendant cette période critique. Malgré tout, les agriculteurs ont déjà enregistrés des pertes. Les récoltes ne sont pas bonnes. Et la question de l’indemnisation d’un secteur en crise commence à se poser très sérieusement. Le gouvernement italien a quant à lui convoqué une réunion de crise avec tous les représentants des ministères concernés pour déterminer une stratégie destinée à lutter contre les effets de la sécheresse. Dans le Nord du pays, où celle-ci est la plus sévère, les besoins de l’agriculture et de l’industrie peuvent être assurés jusqu’à la fin du mois de juillet. Au-delà, le gouvernement pourrait prononcer l’état d’urgence pour débloquer des fonds et ouvrir les bassins hydroélectriques de retenue afin d’éviter un plus grand assèchement du Pô et de ses affluents. De cette manière, l’irrigation des champs pourrait être réalisée. Mais d’ores et déjà, les agriculteurs transalpins estiment que leurs pertes s’élèvent à 5 milliards d’euros.



par Valérie  Gas

Article publié le 18/07/2003