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Attentats : la riposte

Le président Bush propose des tribunaux militaires

Le président américain s’est clairement prononcé pour la mise en place de tribunaux militaires pour juger les prisonniers de Guantanamo accusés d’appartenir au réseau Al-Qaïda et de complicité avec le terrorisme international.
Le président américain a personnellement désigné six prisonniers étrangers susceptibles d’être jugés. Le département à la Défense, qui publie l’information, précise que les six hommes sont aptes à être jugés par des commissions militaires. «Le président a déterminé qu’il y avait des raisons de penser que chacun de ces ennemis combattants était un membre d’Al-Qaïda ou était de quelque autre façon impliqué dans des activités terroristes dirigées contre les États-Unis», a annoncé jeudi un communiqué du Pentagone. Les six hommes comptent actuellement parmi les quelque 600 prisonniers étrangers captifs des Américains dans le cadre de la lutte contre le terrorisme sur la base cubaine de Guantanamo et qui ont été, pour l’essentiel, capturés lors d’opérations des forces de la coalition, en Afghanistan. Ils appartiennent à une quarantaine de nationalités différentes.

Selon le Pentagone, la preuve est faite que les six hommes ont suivi des entraînements dans des camps terroristes et ont pu être impliqués dans le financement du réseau d’Oussama Ben Laden, ou l’avoir protégé, et recruté des membres de son organisation. Les responsables du ministère américain la Défense ont refusé de divulguer leur identité et leur nationalité et ils indiquent qu’aucune inculpation n’a, pour l’instant, été prononcée contre eux. «Aucun chef d’accusation n’a été lancé contre l’un ou l’autre de ces détenus, (…) ils sont retenus prisonniers parce que ce sont des ennemis combattants dans un conflit armé qui se poursuit», a précisé un responsable du Pentagone.

L’Australie, dont deux ressortissants sont emprisonnés sur la base de Guantanamo, a cependant indiqué que l’une des six personnes concernées, David Hicks, était de nationalité australienne. Canberra confirme qu’aucun chef d’accusation n’a «pour le moment» été formulé contre le taliban australien. Le ministre de la Justice affirme que sont gouvernement a mené des discussions approfondies avec les autorités américaines dans le but de «s’assurer que si un Australien était susceptible de comparaître devant un tribunal militaire, le processus soit juste et transparent». Qu’il ait, en d’autres termes, accès à une défense digne de ce nom.

«Pas d’avocat, aucune visite, aucun exercice physique»

Le président des États-Unis a déclaré sa préférence pour un tribunal militaire. Mais c’est au ministère américain de la Défense, et notamment au numéro 2 du Pentagone Paul Wolfowitz, désigné comme «l’autorité responsable» par le secrétaire à la Défense Ronald Rumsfeld, qu’il revient à présent de prendre la décision finale concernant la juridiction et les chefs d’inculpation. Ce sont ces derniers qui détermineront si les accusés sont passibles de la peine de mort, toujours en vigueur aux États-Unis.

Vendredi, la Commission européenne a exhorté Washington à ne pas appliquer la peine capitale aux six étrangers. L’Union européenne fait notamment valoir que le recours aux exécutions capitales risquerait de saper le soutien apporté par la communauté internationale à la lutte contre le terrorisme. Le porte-parole de la Commission déclare notamment que «le terrorisme ne doit pas donner lieu à une violation des droits de l’homme».

La «vieille Europe», dans son acception la plus large, manifestait déjà sa préoccupation la semaine dernière. Le 26 juin, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) qualifiait d’«inacceptables» les conditions de détention tant dans les centres d’Afghanistan que dans celui de Guantanamo où «les détenus ne voient pas d’avocat, ne reçoivent aucune visite, ne font aucun exercice physique», affirme le député britannique Kevin Mac Namara. Dix-huit mois après la fin du conflit en Afghanistan et le début du transfèrement des prisonniers vers la base américaine installée à Cuba, l’APCE a adopté une résolution qualifiant les condition de détention à Guantanamo de «scandale auquel il faut mettre un terme» et dénonçant des «traitements inhumains et dégradants». Les parlementaires déplorent que «les États-Unis refusent de qualifier ces personnes de ‘prisonniers de guerre’, les considérant comme des ‘combattants illégaux’, une définition qui n’existe pas en droit international». Ils demandent à Washington de mettre «les conditions de détention en conformité avec les normes juridiques internationalement reconnues, par exemple en donnant accès au CICR (Comité internationale de la Croix Rouge) et en suivant ses recommandations».

Les informations publiées jeudi par le Pentagone semblent confirmer que l’administration américaine s’achemine vers l’organisation de procès. Au mois de mai, un procureur général et des avocats (militaires) de la défense avaient été nommés. Un responsable du Pentagone a par ailleurs indiqué qu’un immeuble du centre de détention avait été transformé en tribunal en vue d’éventuels procès. Il avait ajouté qu’à toutes fins utiles un «couloir de la mort» et une chambre d’exécution étaient en cours de construction, même si le mode de mise à mort n’avait pas encore été choisi.



par Georges  Abou

Article publié le 04/07/2003