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Grande-Bretagne

Démission du «<i>spin doctor</i>» de Blair

Alastair Campbell, l’homme qui avait fait de la fonction de directeur de la communication un poste stratégique dans le gouvernement du Premier ministre britannique Tony Blair, a présenté sa démission vendredi. Même s’il affirme qu’il envisageait déjà l’été dernier de quitter le gouvernement, son implication dans l’affaire Kelly a certainement précipité les choses.
L’annonce de la démission d’Alastair Campbell, le «spin doctor» (conseiller en communication) de Tony Blair est arrivée au lendemain de l’audition du Premier ministre par le juge Hutton dans le cadre de l’affaire Kelly. Mais à en croire le principal intéressé, sa décision de quitter les fonctions qu’il occupait auprès de Tony Blair depuis neuf ans n’est pas directement liée à sa mise en cause dans le scandale provoqué par le suicide de l’expert britannique en armement David Kelly, accusé d’avoir révélé à la chaîne de télévision BBC que le gouvernement britannique avait gonflé le danger représenté par les armements irakiens pour justifier la guerre dans ce pays. «J’avais l’intention de partir l’été dernier mais comme la question de l’Irak se développait, le Premier ministre m’a demandé de rester pour superviser les communications du gouvernement sur l’Irak, ce dont j’ai été ravi».

Il n’empêche qu’Alastair Campbell fait partie de ceux qui ont essuyé les plâtres après la disparition de David Kelly. Il a en effet été accusé de porter une grande responsabilité dans la mort de l’expert en ayant participé à jeter en pâture son nom à l’opinion publique. Une situation qui a conduit David Kelly à préférer mettre fin à ses jours que d’affronter les pressions dont il était l’objet.

Cette affaire qui a bouleversé les Britanniques a aussi accentué le débat autour du pouvoir de celui qui était surnommé «l’homme le plus puissant de Grande-Bretagne» ou «le vrai vice-Premier ministre», à cause de son influence sur les décisions de Tony Blair dont il était vraisemblablement l’un des plus proches collaborateurs. La capacité d’Alastair Campbell à faire de la communication un élément central de la stratégie gouvernementale lui a attiré les foudres de nombreux observateurs de la politique britannique qui l’accusaient de privilégier toujours et exclusivement la forme sur le fond. L’affaire Kelly semble avoir représenté dans cette polémique un point de non retour.

Un successeur plus consensuel

Alastair Campbell part tout de même la tête haute et avec les félicitations de Tony Blair qui a salué en lui «un serviteur fidèle de la cause en laquelle il croit, intrépide et d’une immense capacité» et qui a assuré qu’il restait son «ami». Le ton de la presse britannique est par contre moins élogieux. Le Daily Mail, très critique vis à vis du gouvernement décrit Alastair Campbell comme «un menteur patenté». Le Sun joue la carte d’un humour très britannique en écrivant que «Blair sans Campbell, c’est comme le poisson sans les frites». Plus sérieux le Daily Miror, dans les colonnes duquel Alastair Campbell écrivait lorsqu’il était encore journaliste, espère que le départ du conseiller de Tony Blair va donner à celui-ci «une occasion de montrer au pays qu’il a tiré les leçons des derniers mois» et de «prouver qu’il tourne le dos à son obsession du spin [manipulation de l’information]».

Reste à savoir si cette démission suffira à changer l’opinion des Britanniques. D’ores et déjà, Downing Street a annoncé que le successeur d’Alastair Campbell, l’ancien chef de la communication du Parti travailliste David Hill, qui doit prendre ses fonctions d’ici un mois, opérerait «au sein d’une nouvelle structure» que Tony Blair doit définir. Cette volonté affichée de changer de méthode va de paire avec le choix du nouveau directeur de la communication réputé beaucoup plus consensuel qu’Alastair Campbell. Le dernier sondage d’opinion publié vendredi montre qu’il y a malgré tout du travail à faire pour redorer le blason du Premier ministre puisque 59 % des personnes interrogées estiment que celui-ci n’est pas digne de confiance.



par Valérie  Gas

Article publié le 30/08/2003