Entreprises
Le «sauvetage» d’Alstom remis en cause
Pour le groupe français Alstom, le compte à rebours est commencé. Le gouvernement dispose de peu de temps pour proposer une alternative au plan de sauvetage repoussé par la Commission européenne. Plus de 110 000 emplois dont près de 25 000 en France sont menacés.
Dès que le gouvernement français a rendu public, début août, son plan de sauvetage du groupe d’infrastructures en énergie et transports Alstom, la Commission européenne avait émis des doutes. L’entrée de l’Etat français dans le capital de l’entreprise en difficultés, à hauteur de 30%, était-elle bien compatible avec le respect de la réglementation communautaire sur les aides d’Etat et le maintien de la concurrence ?
Désormais, la réponse est connue et la Commission européenne s’oppose à une entrée immédiate de l’Etat français dans le capital d’Alstom, ce qui constituerait une mesure irréversible. Elle donne au gouvernement français jusqu’au lundi 22 septembre pour présenter une solution financière qui préserve l’entreprise de la cessation de paiement qui la menace et satisfasse aux exigences communautaires. Les critiques de la Commission européenne portent à la fois sur le fond et la forme. Pour la forme, le commissaire européen chargé de la concurrence Mario Monti semble n’avoir guère apprécié que la France le mette devant le fait accompli en annonçant le sauvetage d’Alstom, sans notifier le contenu du plan d’urgence à la Commission européenne. Sur le fond, la Commission veut bien examiner l’éventualité d’une aide d’urgence et provisoire au groupe industriel mais pas une participation permanente aux fonds propres de l’entreprise. La France est sous menace d’«injonction», procédure assez rare, dont la commission n’a usé que par cinq fois dont déjà deux à l’égard de la France en 1991 pour des facilités de trésorerie au PMU et, en 1994, pour une aide au capital de l’informaticien Bull.
Des milliers d’emplois en jeu
Le temps est bien court, cinq jours à peine, pour remanier le plan de sauvetage concocté entre le ministère de l’Economie et des finances et les banques créancières d’Alstom. Le groupe est confronté à une dette de 5 milliards d’euros pour des fonds propres de 900 millions d’euros. Les trente-deux banques créancières, dont au premier rang, BNP-Paribas, Société générale et Crédit Agricole-Crédit Lyonnais, sur lesquelles le naufrage d’Alstom ne manquerait pas d’avoir des répercussions, avaient accepté de participer à un nouveau tour de table, mais à condition que l’Etat français cautionne l’opération en entrant dans le capital comme actionnaire de référence. Il n’est pas acquis qu’elles «suivent» et payent pour voir, dans un jeu où la garantie de la puissance publique ne figurerait plus.
C’est dire l’ampleur de la tâche du gouvernement français dont l’objectif est, avant tout, d’empêcher la disparition de l’entreprise, avec, à la clef, plus de 110 000 emplois, dont la moitié en Europe, et près de 25 000 en France. Du côté des organisations syndicales on espère que «le bon sens va l’emporter» dans une affaire où des milliers de salariés sont impliqués. De plus, remarque la CGT du groupe, et puisque qu’il s’agit pour Mario Monti de maintenir la concurrence, la disparition d’Alstom mettrait le groupe allemand Siemens en position de seul constructeur d’infrastructures lourdes en Europe.
Mais la fermeté de la Commission européenne à l’égard de la France pourrait bien avoir son origine dans les frictions qui se multiplient ces derniers temps entre Paris et Bruxelles. C’est en tout cas l’opinion de Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale qui estime que le gouvernement Raffarin «s’y est mal pris» dans cette affaire et que depuis des mois la France s’isole en Europe, «se mettant en situation délicate». Les quelques expressions malheureuses des autorités françaises envers «les bureaucrates de Bruxelles» notamment lors de la polémique sur le non-respect des déficits budgétaires n’ont probablement pas plaidé en faveur de la France. Mais, en sens inverse, le manque de prise en compte apparent par les instances communautaires d'un problème social évident, ravivent, en France, le clan de ceux qui, tel Jean-Pierre Chevènement, ex député-maire de Belfort où Alstom est implanté, déplorent le recul de l’«intérêt national».
Désormais, la réponse est connue et la Commission européenne s’oppose à une entrée immédiate de l’Etat français dans le capital d’Alstom, ce qui constituerait une mesure irréversible. Elle donne au gouvernement français jusqu’au lundi 22 septembre pour présenter une solution financière qui préserve l’entreprise de la cessation de paiement qui la menace et satisfasse aux exigences communautaires. Les critiques de la Commission européenne portent à la fois sur le fond et la forme. Pour la forme, le commissaire européen chargé de la concurrence Mario Monti semble n’avoir guère apprécié que la France le mette devant le fait accompli en annonçant le sauvetage d’Alstom, sans notifier le contenu du plan d’urgence à la Commission européenne. Sur le fond, la Commission veut bien examiner l’éventualité d’une aide d’urgence et provisoire au groupe industriel mais pas une participation permanente aux fonds propres de l’entreprise. La France est sous menace d’«injonction», procédure assez rare, dont la commission n’a usé que par cinq fois dont déjà deux à l’égard de la France en 1991 pour des facilités de trésorerie au PMU et, en 1994, pour une aide au capital de l’informaticien Bull.
Des milliers d’emplois en jeu
Le temps est bien court, cinq jours à peine, pour remanier le plan de sauvetage concocté entre le ministère de l’Economie et des finances et les banques créancières d’Alstom. Le groupe est confronté à une dette de 5 milliards d’euros pour des fonds propres de 900 millions d’euros. Les trente-deux banques créancières, dont au premier rang, BNP-Paribas, Société générale et Crédit Agricole-Crédit Lyonnais, sur lesquelles le naufrage d’Alstom ne manquerait pas d’avoir des répercussions, avaient accepté de participer à un nouveau tour de table, mais à condition que l’Etat français cautionne l’opération en entrant dans le capital comme actionnaire de référence. Il n’est pas acquis qu’elles «suivent» et payent pour voir, dans un jeu où la garantie de la puissance publique ne figurerait plus.
C’est dire l’ampleur de la tâche du gouvernement français dont l’objectif est, avant tout, d’empêcher la disparition de l’entreprise, avec, à la clef, plus de 110 000 emplois, dont la moitié en Europe, et près de 25 000 en France. Du côté des organisations syndicales on espère que «le bon sens va l’emporter» dans une affaire où des milliers de salariés sont impliqués. De plus, remarque la CGT du groupe, et puisque qu’il s’agit pour Mario Monti de maintenir la concurrence, la disparition d’Alstom mettrait le groupe allemand Siemens en position de seul constructeur d’infrastructures lourdes en Europe.
Mais la fermeté de la Commission européenne à l’égard de la France pourrait bien avoir son origine dans les frictions qui se multiplient ces derniers temps entre Paris et Bruxelles. C’est en tout cas l’opinion de Jean-Marc Ayrault, président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale qui estime que le gouvernement Raffarin «s’y est mal pris» dans cette affaire et que depuis des mois la France s’isole en Europe, «se mettant en situation délicate». Les quelques expressions malheureuses des autorités françaises envers «les bureaucrates de Bruxelles» notamment lors de la polémique sur le non-respect des déficits budgétaires n’ont probablement pas plaidé en faveur de la France. Mais, en sens inverse, le manque de prise en compte apparent par les instances communautaires d'un problème social évident, ravivent, en France, le clan de ceux qui, tel Jean-Pierre Chevènement, ex député-maire de Belfort où Alstom est implanté, déplorent le recul de l’«intérêt national».
par Francine Quentin
Article publié le 18/09/2003