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Santé

La pollution a tué pendant la canicule

La polémique déclenchée en France par la surmortalité due à la canicule risque de rebondir une nouvelle fois car il semble qu’un nombre important de décès ait été provoqué par la pollution atmosphérique. Le gouvernement est de nouveau l’objet de critiques sur ce thème car les mesures d’alerte et de prévention n’auraient, selon certains, pas été suffisantes pour protéger au mieux la santé des personnes fragiles. Face à ces attaques, Roselyne Bachelot, la ministre de l’Ecologie, a expliqué qu’un décret était d’ores et déjà en préparation pour proposer des mesures destinées à mieux prévenir les effets des pics de pollution.
L’été a été chaud et… pollué. Durant la première quinzaine du mois d’août, les records de température ont été battus dans de nombreuses régions françaises. Et les pics de pollution se sont succédé. Les niveaux atteints par la pollution à l’ozone entre le 2 et le 10 août 2003 ont dépassé ceux des douze dernières années. Cette situation s’explique par la combinaison de tous les facteurs aggravants sur une période relativement longue : températures élevées, ensoleillement maximum et absence de vent. Certaines zones comme la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur et Paris ont été particulièrement touchées. On a, par exemple, atteint plus de 30 heures cumulées au-delà du seuil de 240 microgrammes par mètre cube en Ile-de-France entre le 1er et le 15 août. Le seuil d’information au-dessus duquel la population doit être mise en garde est de 180 microgrammes par mètre cube, et le seuil d’alerte à partir duquel des mesures restrictives en matière de circulation notamment sont mises en œuvre, de 360.

Dans ce contexte, il semble donc qu’une partie des 11 435 décès supplémentaires enregistrés lors de la canicule soit due aux effets de la pollution atmosphérique dont on sait qu’elle aggrave l’état de certaines catégories de personnes fragiles comme les insuffisants respiratoires et les malades cardiaques. Jean-Felix Bernard, le président du Conseil national de l’air, a déclaré à ce propos que même «s’il n’est pas possible de chiffrer avec précision l’impact de la pollution», il est vraisemblable que «des milliers de personnes sont décédées à cause d’elle». Pour preuve selon lui, «le nombre de décès par hyperthermie strictement imputable à la chaleur n’est officiellement que de 56 %». Cette analyse est partagée par le député Vert de Gironde, Noël Mamère, pour lequel ce sont «plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de personnes» qui sont mortes cet été à cause de la pollution à l’ozone.

«Même en-dessous des seuils administratifs, il y a déjà des risques de mortalité»

Dans ce contexte, les Verts dénoncent l’absence de réactivité du gouvernement pour lutter contre les effets d’une pollution persistante très nocive pour la santé. Les autorités auraient dû, selon eux, décider plus vite d’agir pour limiter la circulation et réduire les émissions polluantes des industries dans les zones critiques. En bref, appliquer le principe de précaution plutôt que de «minorer les situations». Face à ces critiques, Roselyne Bachelot, la ministre de l’Ecologie, a plaidé la bonne foi en affirmant que des mesures adéquates avaient été prises. Mais elle a aussi précisé que «le seuil d’alerte fixé à 360 microgrammes par mètre cube, et déclenchant théoriquement les mesures de réduction de la pollution, n’a pas été atteint durant cet épisode».

Et c’est bien à ce niveau que se situe une partie du débat. Les normes appliquées actuellement en matière de pollution sont-elles suffisantes pour préserver la santé ? Pour Jean-Felix Bernard, la réponse est non. «Nous savons que même en-dessous des seuils administratifs, il y a déjà des risques de mortalité». Dans ce contexte, le gouvernement français prépare un nouvel arsenal de mesures anti-pollution parmi lesquelles figure l’abaissement du seuil d’alerte pour l’ozone de 360 à 240 microgrammes par mètre cube. A partir de ce taux, la circulation des poids lourds et les émissions polluantes des industries seraient soumises à des restrictions et la vitesse des automobiles serait réduite. En ce qui concerne la circulation alternée des voitures, le seuil de 360 microgrammes par mètre cube resterait par contre en vigueur. D’autres mesures comme la mise en place d’un péage à l’entrée de Paris, à l’exemple de ce qui a été fait à Londres, sont aussi à l’étude. Roselyne Bachelot doit présenter l’ensemble de ses propositions en matière de lutte contre la pollution en conseil des ministres à la fin du mois d’octobre.



par Valérie  Gas

Article publié le 22/09/2003