Esclavage
Le palace était une prison
Une domestique philippine, Anabay Talusan, a été sauvée par les gendarmes français alors qu’elle allait être forcée d’embarquer dans l’avion privé d’une princesse saoudienne qui la ramenait vers son pays. Maltraitée, privée de passeport et de salaire, la jeune femme de 28 ans n’était ni plus ni moins qu’une esclave dans la suite de cette personnalité en voyage à Paris.
Les dorures et les lambris n’empêchent pas les histoires sordides mais parfois ils les dissimulent. Pourtant, dans un célèbre hôtel parisien, le Plaza Athénée, la discrétion de rigueur n’a pas résisté à un drame humain qui se jouait à l’intérieur d’une suite occupée par une princesse saoudienne de haut rang avec sa cohorte de domestiques. Anabay Talusan qui était au service de cette personnalité depuis environ un an et vivait dans des conditions très difficiles (corvéable 24 heures sur 24, sans salaire, privée de passeport), a tenté à l’occasion de son séjour dans cet établissement parisien de s’échapper avec trois ou quatre autres jeunes femmes qui se trouvaient dans la même situation qu’elle. Cavalcade et poursuite, elle a eu moins de chance que les autres qui ont réussi à s’évanouir dans la nature et a été rattrapée par les hommes du service de sécurité de la princesse. Mais un témoin de cette scène a compris qu’elle était retenue contre son gré et a prévenu le Comité contre l’esclavage moderne. Il a préféré garder l’anonymat mais a permis de mettre un terme au calvaire de la jeune femme en alertant cette association spécialisée.
«Nous avons déposé une plainte pour séquestration», explique Sylvie O’Dy, co-présidente du Comité contre l’esclavage moderne. De cette manière une procédure a été engagée et les gendarmes ont pu très vite intervenir avant l’embarquement de la jeune femme dans l’avion privé de la princesse qui devait décoller mercredi de l’aéroport du Bourget pour rejoindre l’Arabie saoudite. «Ils ont été formidables. Ils lui ont expliqué qu’ils étaient là pour l’aider». Le premier sentiment de la pauvre Anabay lorsqu’ils sont arrivés a, en effet, été la peur, car comme l’explique Sylvie O’Dy, «ces jeunes filles n’ont la plupart du temps même pas conscience qu’elles ont des droits». Mais elle a finalement compris et les a suivis. L’avion a ensuite décollé avec seulement une heure de retard et une passagère en moins.
«Des beaux quartiers aux HLM»
Aujourd’hui, elle est «sous le choc», «très fatiguée» par des mois de mauvais traitements et d’exploitation. Mais elle a récupéré son passeport et le comité l’a prise en charge. Il est trop tôt pour savoir ce qu’il adviendra d’elle et si elle pourra retourner dans son pays où elle a quatre enfants. En attendant, elle est logée dans un appartement du comité. Pour Sylvie O’Dy, «de plus en plus souvent les jeunes filles décident de porter plainte». Mais pour le moment, Anabay ne l’a pas fait. Elle récupère.
Cette histoire n’est pas unique. D’autres cas d’esclavage dans des hôtels de grand standing ont été signalés au comité, essentiellement sur la Côte d’Azur ou à Paris. D’ailleurs, une charte a été signée il y a deux ans entre le Comité contre l’esclavage moderne et le syndicat de l’hôtellerie pour sensibiliser les personnels à ces situations et les inciter à la vigilance. Preuve que le phénomène existe et qu’il est connu. Malgré tout, il est clair que «lorsque des gens louent trois étages d’un hôtel et dépensent des fortunes, on s’intéresse moins à la petite bonne philippine qu’aux clients». La princesse saoudienne en question ici a résidé pendant un mois au Plaza Athénée. Et pendant tout ce temps, le directeur de l’établissement affirme que «personne n’a été retenu contre son gré».
Il ne faut malgré tout pas tirer de conclusions hâtives sur les circonstances dans lesquelles des personnes vulnérables se trouvent réduites en esclavage et lier forcément cette situation à la richesse des employeurs bourreaux. En matière d’esclavage, il n’y a pas de barrière sociale. Comme l’explique Sylvie O’Dy : «L’esclavage en France va des hôtels des beaux quartiers aux HLM de banlieue» en passant par les résidences diplomatiques.
«Nous avons déposé une plainte pour séquestration», explique Sylvie O’Dy, co-présidente du Comité contre l’esclavage moderne. De cette manière une procédure a été engagée et les gendarmes ont pu très vite intervenir avant l’embarquement de la jeune femme dans l’avion privé de la princesse qui devait décoller mercredi de l’aéroport du Bourget pour rejoindre l’Arabie saoudite. «Ils ont été formidables. Ils lui ont expliqué qu’ils étaient là pour l’aider». Le premier sentiment de la pauvre Anabay lorsqu’ils sont arrivés a, en effet, été la peur, car comme l’explique Sylvie O’Dy, «ces jeunes filles n’ont la plupart du temps même pas conscience qu’elles ont des droits». Mais elle a finalement compris et les a suivis. L’avion a ensuite décollé avec seulement une heure de retard et une passagère en moins.
«Des beaux quartiers aux HLM»
Aujourd’hui, elle est «sous le choc», «très fatiguée» par des mois de mauvais traitements et d’exploitation. Mais elle a récupéré son passeport et le comité l’a prise en charge. Il est trop tôt pour savoir ce qu’il adviendra d’elle et si elle pourra retourner dans son pays où elle a quatre enfants. En attendant, elle est logée dans un appartement du comité. Pour Sylvie O’Dy, «de plus en plus souvent les jeunes filles décident de porter plainte». Mais pour le moment, Anabay ne l’a pas fait. Elle récupère.
Cette histoire n’est pas unique. D’autres cas d’esclavage dans des hôtels de grand standing ont été signalés au comité, essentiellement sur la Côte d’Azur ou à Paris. D’ailleurs, une charte a été signée il y a deux ans entre le Comité contre l’esclavage moderne et le syndicat de l’hôtellerie pour sensibiliser les personnels à ces situations et les inciter à la vigilance. Preuve que le phénomène existe et qu’il est connu. Malgré tout, il est clair que «lorsque des gens louent trois étages d’un hôtel et dépensent des fortunes, on s’intéresse moins à la petite bonne philippine qu’aux clients». La princesse saoudienne en question ici a résidé pendant un mois au Plaza Athénée. Et pendant tout ce temps, le directeur de l’établissement affirme que «personne n’a été retenu contre son gré».
Il ne faut malgré tout pas tirer de conclusions hâtives sur les circonstances dans lesquelles des personnes vulnérables se trouvent réduites en esclavage et lier forcément cette situation à la richesse des employeurs bourreaux. En matière d’esclavage, il n’y a pas de barrière sociale. Comme l’explique Sylvie O’Dy : «L’esclavage en France va des hôtels des beaux quartiers aux HLM de banlieue» en passant par les résidences diplomatiques.
par Valérie Gas
Article publié le 12/09/2003