Corse
Les gendarmes en première ligne
Après les incidents provoqués par le transfert à Paris des deux personnes qui avaient jeté des cocktails Molotov sur la gendarmerie de Luri et les menaces dont sont victimes sur l’île les représentants de l’ordre et leurs familles, Nicolas Sarkozy, le ministre français de l’Intérieur, a tenu à réaffirmer qu’il n’était pas question de céder aux pressions des nationalistes et que les actions violentes ne resteront pas impunies.
Il aura suffi d’un contrôle routier pour que les passions se déchaînent une nouvelle fois de manière disproportionnée en Corse. Quand des gendarmes de Luri arrêtent début septembre deux jeunes gens qui circulent en voiture, les choses s’enveniment très vite et le ton monte. Les occupants du véhicule n’apprécient pas d’être contrôlés et finissent par insulter les gendarmes qui décident de déclencher des poursuites «pour outrages à agent de la force publique et rébellion». Les choses auraient pu en rester là. Mais les deux jeunes décident de se venger et organisent une opération de représailles contre la gendarmerie de Luri durant laquelle ils jettent deux cocktails Molotov dans la cour du bâtiment, au risque de blesser les gendarmes ou les membres de leurs familles qui auraient pu s’y trouver.
Très rapidement, les forces de l’ordre réagissent et interpellent sept personnes soupçonnées d’avoir participé à l’action sur mandat des magistrats antiterroristes de Paris. Parmi elles, cinq sont relâchées rapidement mais les deux principaux suspects Anthony Motta et Laurent Adjaeff sont transférés à Paris et mis en examen par le juge antiterroriste Gilbert Thiel pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, détention d’explosifs, et dégradation en bande organisée par l’effet d’une substance explosive». Des chefs d’accusation qui les rendent passibles de la cour d’assise.
A la suite de cette décision, des dizaines de personnes masquées prennent d’assaut la gendarmerie, jettent des projectiles de toutes natures et vont même jusqu’à incendier des véhicules. Devant ce déferlement de violence, près de 80 gendarmes mobiles doivent finalement être déployés pour ramener le calme et défendre leurs collègues.
«Les gendarmes doivent comprendre qu’ils ne sont pas chez eux ici»
Les nationalistes estiment que la décision d’interpeller et de transférer hors de l’île les deux jeunes est «disproportionnée» par rapport à leurs actes, que le leader de Corsica Nazione Jean-Guy Talamoni considère comme une simple «gaminerie». Un point de vue que les gendarmes de Luri ne partagent pas du tout. Eux qui ont, dès le lendemain de l’attaque de leur caserne, fait évacuer sous escorte les membres de leurs familles dont la sécurité n’était plus assurée. Des menaces très explicites avaient en effet été proférées par les nationalistes. Jean-Pierre Susini, le père de deux jeunes interpellés dans cette affaire puis relâchés, a ainsi déclaré : «Les gendarmes doivent comprendre qu’ils ne sont pas chez eux ici et qu’à dater d’aujourd’hui, nous les tolérerons sur notre commune mais nous n’accepterons plus aucune déportation. Nous sommes déterminés, nous irons jusqu’au bout». Et pourquoi pas jusqu’à s’en prendre aux familles des militaires comme l’ont laissé entendre certains cagoulés.
Face à cette violence et aux menaces qui l’accompagnent, Nicolas Sarkozy a voulu se montrer le plus ferme possible. Il a déclaré que «tous ceux qui auront un comportement contraire à ce qu’un Etat de droit exige seront interpellés». Il a même promis de nouvelles arrestations en affirmant : «Ceux qui ont commis des exactions en jetant des cocktails Molotov sont aujourd’hui en prison, ceux qui ont brûlé des voitures auront à rendre des comptes». Quant au départ des gendarmes du poste de Luri, il l’a totalement exclu.
Malgré ces déclarations, le ministre de l’Intérieur n’a pas manqué d’être critiqué par l’opposition qui a jugé la réaction du gouvernement bien tardive et a imputé les dérives violentes qui frappent actuellement la Corse à l’absence de réelle politique sur ce dossier sur lequel, il est vrai, les gouvernements successifs se cassent les dents depuis de nombreuses années. François Hollande, le premier secrétaire du Parti socialiste, a ainsi estimé que «ce qui manque aujourd’hui, ce n’est pas les forces de l’ordre… c’est que le président de la République et le Premier ministre définissent un cap, une politique et s’y tiennent».
Il est vrai que malgré tous ses effort et ses neuf voyages en Corse en un an, le ministre de l’Intérieur n’a toujours pas trouvé le moyen d’améliorer la situation sur l’île. Sa proposition de réforme institutionnelle a été rejetée par les électeurs lors du referendum du 6 juillet et depuis les choses n’ont fait qu’aller de mal en pis. D’autant que l’arrestation de l’assassin présumé du préfet Erignac, Yvan Colonna, et de certains de ses complices de cavale a revigoré les partisans de la violence. Quatre-vingt-neuf attentats ont ainsi été perpétrés en deux mois et demi.
Dans ce contexte plus que tendu, la marge de manœuvre du gouvernement est limitée. La fermeté est inévitable, même si elle entraîne des critiques sur les méfaits du tout répressif de la part des nationalistes qui y trouvent une justification à leur radicalisation. Et les dernières déclarations de Nicolas Sarkozy semblent montrer qu’il s’engage sur ce terrain sans état d’âme. En attendant peut-être la nouvelle donne qui devrait sortir des prochaines élections territoriales au printemps 2004, à l’occasion desquelles les électeurs pourront sanctionner les responsables de cette nouvelle montée de la violence en Corse.
Très rapidement, les forces de l’ordre réagissent et interpellent sept personnes soupçonnées d’avoir participé à l’action sur mandat des magistrats antiterroristes de Paris. Parmi elles, cinq sont relâchées rapidement mais les deux principaux suspects Anthony Motta et Laurent Adjaeff sont transférés à Paris et mis en examen par le juge antiterroriste Gilbert Thiel pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste, détention d’explosifs, et dégradation en bande organisée par l’effet d’une substance explosive». Des chefs d’accusation qui les rendent passibles de la cour d’assise.
A la suite de cette décision, des dizaines de personnes masquées prennent d’assaut la gendarmerie, jettent des projectiles de toutes natures et vont même jusqu’à incendier des véhicules. Devant ce déferlement de violence, près de 80 gendarmes mobiles doivent finalement être déployés pour ramener le calme et défendre leurs collègues.
«Les gendarmes doivent comprendre qu’ils ne sont pas chez eux ici»
Les nationalistes estiment que la décision d’interpeller et de transférer hors de l’île les deux jeunes est «disproportionnée» par rapport à leurs actes, que le leader de Corsica Nazione Jean-Guy Talamoni considère comme une simple «gaminerie». Un point de vue que les gendarmes de Luri ne partagent pas du tout. Eux qui ont, dès le lendemain de l’attaque de leur caserne, fait évacuer sous escorte les membres de leurs familles dont la sécurité n’était plus assurée. Des menaces très explicites avaient en effet été proférées par les nationalistes. Jean-Pierre Susini, le père de deux jeunes interpellés dans cette affaire puis relâchés, a ainsi déclaré : «Les gendarmes doivent comprendre qu’ils ne sont pas chez eux ici et qu’à dater d’aujourd’hui, nous les tolérerons sur notre commune mais nous n’accepterons plus aucune déportation. Nous sommes déterminés, nous irons jusqu’au bout». Et pourquoi pas jusqu’à s’en prendre aux familles des militaires comme l’ont laissé entendre certains cagoulés.
Face à cette violence et aux menaces qui l’accompagnent, Nicolas Sarkozy a voulu se montrer le plus ferme possible. Il a déclaré que «tous ceux qui auront un comportement contraire à ce qu’un Etat de droit exige seront interpellés». Il a même promis de nouvelles arrestations en affirmant : «Ceux qui ont commis des exactions en jetant des cocktails Molotov sont aujourd’hui en prison, ceux qui ont brûlé des voitures auront à rendre des comptes». Quant au départ des gendarmes du poste de Luri, il l’a totalement exclu.
Malgré ces déclarations, le ministre de l’Intérieur n’a pas manqué d’être critiqué par l’opposition qui a jugé la réaction du gouvernement bien tardive et a imputé les dérives violentes qui frappent actuellement la Corse à l’absence de réelle politique sur ce dossier sur lequel, il est vrai, les gouvernements successifs se cassent les dents depuis de nombreuses années. François Hollande, le premier secrétaire du Parti socialiste, a ainsi estimé que «ce qui manque aujourd’hui, ce n’est pas les forces de l’ordre… c’est que le président de la République et le Premier ministre définissent un cap, une politique et s’y tiennent».
Il est vrai que malgré tous ses effort et ses neuf voyages en Corse en un an, le ministre de l’Intérieur n’a toujours pas trouvé le moyen d’améliorer la situation sur l’île. Sa proposition de réforme institutionnelle a été rejetée par les électeurs lors du referendum du 6 juillet et depuis les choses n’ont fait qu’aller de mal en pis. D’autant que l’arrestation de l’assassin présumé du préfet Erignac, Yvan Colonna, et de certains de ses complices de cavale a revigoré les partisans de la violence. Quatre-vingt-neuf attentats ont ainsi été perpétrés en deux mois et demi.
Dans ce contexte plus que tendu, la marge de manœuvre du gouvernement est limitée. La fermeté est inévitable, même si elle entraîne des critiques sur les méfaits du tout répressif de la part des nationalistes qui y trouvent une justification à leur radicalisation. Et les dernières déclarations de Nicolas Sarkozy semblent montrer qu’il s’engage sur ce terrain sans état d’âme. En attendant peut-être la nouvelle donne qui devrait sortir des prochaines élections territoriales au printemps 2004, à l’occasion desquelles les électeurs pourront sanctionner les responsables de cette nouvelle montée de la violence en Corse.
par Valérie Gas
Article publié le 16/09/2003