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Monnaie unique européenne

La France affronte les critiques de ses pairs

Francis Mer s'est engagé à viser le retour du déficit public français sous les 3% du PIB en 2005. Sans vraiment convaincre ses partenaires. La France était arrivée en position d’accusée à la réunion de crise des ministres des finances de l’Union européenne, à Stresa en Italie, pour ses manquements aux règles du pacte de stabilité et de croissance.
En 2003, la France devrait présenter un déficit public de 4% du PIB, très supérieur à la limite de 3% posée par le pacte de stabilité et de croissance européen. Le seuil avait déjà été dépassé en 2002 et, pour 2004, le budget français ne prend pas le chemin du redressement, notamment en raison des baisses d’impôts prévues. L’Allemagne ne fait pas beaucoup mieux et son déficit public sera cette année de 3,8%, alors que, dans ce pays aussi, des réductions d’impôts ont été prises.

Mais la France est, bien plus que son voisin d’outre-Rhin, en butte aux reproches des autres pays de la zone euro et de la Commission européenne chargée de faire respecter le pacte de 1997. Le ministre néerlandais des Finances résume assez bien l’opinion générale en estimant que l’Allemagne n’a pas d’excuses pour justifier son déficit budgétaire, mais qu’au moins, ce pays «tente de respecter le pacte, alors que la France semble délibérément le violer». Le ministre autrichien des Finances renchérit encore en disant que Francis Mer, le ministre français «ajoute un certain degré de provocation», ce qui n’arrange pas le climat déjà peu favorable à la France.

De fait, les déclarations du Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, peu amènes envers ceux qui, à Bruxelles, veillent de manière jugée trop «comptable» à l’application des règles, et repoussant à 2006 le retour à un meilleur équilibre budgétaire, ont agacé nombre de pays européens. C’est pourquoi, peu avant la réunion de crise des ministre des Finances, le président de la République, Jacques Chirac, en voyage en Espagne, a assuré que la France fera tout ce qui est son pouvoir pour respecter dans les meilleurs délais le pacte de stabilité européen. Il invite cependant l’Union européenne à tenir davantage compte des aspects conjoncturels et de reconnaître la nécessité d’un soutien à l’économie dans les périodes de difficultés.

De l’huile sur le feu

Jean-Pierre Raffarin pense même déceler en Europe l’émergence d’une «pensée commune» tendant à concilier discipline budgétaire et exigence de croissance. Jusqu’à présent, seul le chancelier allemand Gerhard Schröder s’est, bien que timidement, prononcé dans ce sens. Pour l’économiste Daniel Cohen le pacte de stabilité n’a pas de sens s’il ne prend pas en compte les cycles économiques fluctuants et qu’il va nécessairement évoluer vers une clarification souhaitable. Mais pour autant, il estime que la France ne pourra guère échapper aux sanctions car, en décidant une baisse des impôts alors que les recettes fiscales sont déjà réduites par la faiblesse de la croissance, le gouvernement a jeté de l’huile sur le feu.

Le président de la Commission européenne, Romano Prodi, a demandé au Premier ministre d’instaurer une concertation entre Paris et Bruxelles afin de pour trouver une solution au problème que pose le déficit français. En dépit de cette volonté de trouver un compromis, le commissaire européen aux Affaires économiques et monétaires Pedro Solbes a réitéré vendredi à Stresa son exigence d'une réduction du déficit structurel de la France beaucoup plus importante que le chiffre de 0,5% du PIB affiché par la France. Le 3 octobre, au plus tard, la France doit présenter à ses partenaires européens les mesures destinées à ramener son déficit sous les 3% en 2004. Faute de quoi, la lettre du pacte de stabilité imposerait un système de sanctions graduées.

Le gouvernement français a intérêt à trouver rapidement un terrain d’entente avec la commission européenne sur le thème de la dette publique car le déficit budgétaire excessif n’est pas le seul dossier pendant à Bruxelles. Le commissaire européen à la concurrence, Mario Monti, menace de s’opposer à l’entrée de l’Etat français dans le capital du groupe Alstom en difficultés, car cela constituerait une aide publique à une entreprise privée. Un refus de la commission entraînerait la remise en cause du plan de sauvetage d’Alstom, avec, à la clef, l’avenir de plusieurs milliers d’emplois.



par Francine  Quentin

Article publié le 13/09/2003