Santé
Canicule : près de 15 000 morts en trois semaines
Les deux experts chargés par le ministre français de la Santé, Jean-François Mattéi, de faire le bilan de la canicule ont rendu leur rapport jeudi. Ils font état de 14 802 décès supplémentaires entre le 1er et le 20 août. De mission d’information en étude, le bilan des exceptionnelles chaleurs de l’été ne cesse de s’alourdir. Face à l’ampleur de cette catastrophe sanitaire sans précédent en France, une commission d’enquête parlementaire a été créée notamment pour «faire la lumière» sur les dysfonctionnements des systèmes d’alerte et les éventuelles responsabilités politiques.
Les Pompes funèbres ont annoncé dès le début septembre que la surmortalité du mois d’août en France était de l’ordre de 15 000 décès. Les chiffres publiés ce jeudi par les experts de l’Inserm (Institut national de la Santé et de la Recherche), Denis Hémon et Eric Jougla, rejoignent cette estimation en atteignant 14 802 morts recensés entre le 1er et le 20 août. Le précédent bilan officiel avait mentionné le chiffre de 11 435 décès dans la première quinzaine du mois d’août.
Le rapport précise d’autre part que la surmortalité a bien été «synchrone avec la période de canicule». Il apporte aussi des précisions sur la typologie des victimes et confirme que ce sont les personnes âgées de plus de 75 ans qui ont le plus subi les conséquences des fortes chaleurs. Elles représentent 70 % des décès. Les femmes (60%) ont été davantage touchées que les hommes (40 %). Et c’est en Ile-de-France et dans le Centre que la surmortalité a été la plus importante (respectivement 130 % et 100 %).
L’ampleur de la catastrophe sanitaire provoquée en France par la canicule, beaucoup plus importante que dans les autres pays européens pourtant eux aussi touchés par les fortes chaleurs, a mis au jour un ensemble de dysfonctionnements dans le système de santé français. Elle a aussi provoqué une polémique sur la capacité des responsables politiques à évaluer les situations d’urgence de ce type et à réagir pour prendre les mesures adéquates.
Des réformes structurelles coûteuses
La mission d’information parlementaire sur la canicule qui a commencé ses auditions le 26 août a d’ailleurs insisté sur plusieurs points qui vont dans ce sens. Elle a estimé que l’Institut de veille sanitaire était «hors jeu» et que la Direction générale de la santé [dont le président Lucien Abenhaïm a démissionné] ne s’était pas «mobilisée lourdement». La faible réactivité du gouvernement est aussi pointée du doigt. Le rapport de la mission insiste en effet sur «la mobilisation tardive des administrations du ministère de l’Intérieur et la communication interministérielle limitée».
En conclusion, dans une situation d’urgence de ce type, elle estime que le dispositif sanitaire et social «a fait face» mais «a été poussé à la limite de ses possibilités». Les hôpitaux ont fait leur travail tant bien que mal et ont «su répondre à la crise». Quant aux généralistes, ils n’ont pas non plus «failli à leur mission», à l’exception de «défaillances individuelles». Dans ce contexte, c’est au niveau de l’alerte et de la mobilisation des hiérarchies administratives qu’il semble y avoir eu des lacunes qui ont abouti à une sousestimation des risques et à des erreurs de communication, comme celle de Jean-François Mattéi qui est intervenu à la télévision le 11 août mais a minimisé la crise en parlant de «situation maîtrisée», au lieu d’alerter sur les risques liés à la canicule.
C’est donc pour aller plus avant dans la recherche des responsabilités, notamment au niveau politique, que la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a voté la création d’une commission d’enquête. Cette décision va dans le sens des critiques émises par plusieurs élus d’opposition membres de la mission d’information sur la canicule qui ont estimé qu’ils n’avaient pas pu aller au bout des investigations, notamment parce qu’ils n’avaient pas procédé à l’audition du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy. Cette commission d’enquête verra le jour le 7 octobre et sera composée d’une trentaine de députés qui auront six mois pour «faire la lumière» sur les circonstances et les conséquences de la crise. Mais aussi pour dresser le bilan exact des décès, établir la typologie des victimes, les facteurs co-aggravants (pollution, médicaments, isolement social…).
En attendant le rapport de la commission d’enquête, le ministre des Affaires sociales, dont le silence total pendant la crise a été largement critiqué, a annoncé le déblocage d’urgence de 40 millions d’euros pour les personnes âgées. D’autre part, la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a déjà pris en compte certaines propositions d’amendements qui suivent les recommandations faites par la mission d’information sur la canicule, dans le cadre du projet de loi sur la Santé publique. Parmi celles-i figurent la mise en place dans chaque plan régional de santé publique d’un «plan d’action relatif à l’alerte et la gestion des situations d’urgence» et la transmission directe à l’Inserm des certificats de décès par voie électronique.
D’ici le 2 octobre, date de l’examen du projet de loi en séance publique, d’autres amendements devraient être rédigés à partir des conclusions de la mission d’information qui a aussi préconisé de donner au «plan Blanc», qui permet de mobiliser les moyens hospitaliers en cas de crise, une base légale et contraignante, mais aussi la mise en place d’un service minimum entre les médecins libéraux, le Samu et les services d’urgence, l’obligation pour les établissements qui accueillent des personnes âgées de disposer d’une salle climatisée, d’instaurer des permanences de nuit des personnels soignants… Les membres de la mission d’information constatent aussi qu’en l’état actuel du système sanitaire et social, des reformes «structurelles» donc «coûteuses» vont être nécessaires.
Le rapport précise d’autre part que la surmortalité a bien été «synchrone avec la période de canicule». Il apporte aussi des précisions sur la typologie des victimes et confirme que ce sont les personnes âgées de plus de 75 ans qui ont le plus subi les conséquences des fortes chaleurs. Elles représentent 70 % des décès. Les femmes (60%) ont été davantage touchées que les hommes (40 %). Et c’est en Ile-de-France et dans le Centre que la surmortalité a été la plus importante (respectivement 130 % et 100 %).
L’ampleur de la catastrophe sanitaire provoquée en France par la canicule, beaucoup plus importante que dans les autres pays européens pourtant eux aussi touchés par les fortes chaleurs, a mis au jour un ensemble de dysfonctionnements dans le système de santé français. Elle a aussi provoqué une polémique sur la capacité des responsables politiques à évaluer les situations d’urgence de ce type et à réagir pour prendre les mesures adéquates.
Des réformes structurelles coûteuses
La mission d’information parlementaire sur la canicule qui a commencé ses auditions le 26 août a d’ailleurs insisté sur plusieurs points qui vont dans ce sens. Elle a estimé que l’Institut de veille sanitaire était «hors jeu» et que la Direction générale de la santé [dont le président Lucien Abenhaïm a démissionné] ne s’était pas «mobilisée lourdement». La faible réactivité du gouvernement est aussi pointée du doigt. Le rapport de la mission insiste en effet sur «la mobilisation tardive des administrations du ministère de l’Intérieur et la communication interministérielle limitée».
En conclusion, dans une situation d’urgence de ce type, elle estime que le dispositif sanitaire et social «a fait face» mais «a été poussé à la limite de ses possibilités». Les hôpitaux ont fait leur travail tant bien que mal et ont «su répondre à la crise». Quant aux généralistes, ils n’ont pas non plus «failli à leur mission», à l’exception de «défaillances individuelles». Dans ce contexte, c’est au niveau de l’alerte et de la mobilisation des hiérarchies administratives qu’il semble y avoir eu des lacunes qui ont abouti à une sousestimation des risques et à des erreurs de communication, comme celle de Jean-François Mattéi qui est intervenu à la télévision le 11 août mais a minimisé la crise en parlant de «situation maîtrisée», au lieu d’alerter sur les risques liés à la canicule.
C’est donc pour aller plus avant dans la recherche des responsabilités, notamment au niveau politique, que la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a voté la création d’une commission d’enquête. Cette décision va dans le sens des critiques émises par plusieurs élus d’opposition membres de la mission d’information sur la canicule qui ont estimé qu’ils n’avaient pas pu aller au bout des investigations, notamment parce qu’ils n’avaient pas procédé à l’audition du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy. Cette commission d’enquête verra le jour le 7 octobre et sera composée d’une trentaine de députés qui auront six mois pour «faire la lumière» sur les circonstances et les conséquences de la crise. Mais aussi pour dresser le bilan exact des décès, établir la typologie des victimes, les facteurs co-aggravants (pollution, médicaments, isolement social…).
En attendant le rapport de la commission d’enquête, le ministre des Affaires sociales, dont le silence total pendant la crise a été largement critiqué, a annoncé le déblocage d’urgence de 40 millions d’euros pour les personnes âgées. D’autre part, la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale a déjà pris en compte certaines propositions d’amendements qui suivent les recommandations faites par la mission d’information sur la canicule, dans le cadre du projet de loi sur la Santé publique. Parmi celles-i figurent la mise en place dans chaque plan régional de santé publique d’un «plan d’action relatif à l’alerte et la gestion des situations d’urgence» et la transmission directe à l’Inserm des certificats de décès par voie électronique.
D’ici le 2 octobre, date de l’examen du projet de loi en séance publique, d’autres amendements devraient être rédigés à partir des conclusions de la mission d’information qui a aussi préconisé de donner au «plan Blanc», qui permet de mobiliser les moyens hospitaliers en cas de crise, une base légale et contraignante, mais aussi la mise en place d’un service minimum entre les médecins libéraux, le Samu et les services d’urgence, l’obligation pour les établissements qui accueillent des personnes âgées de disposer d’une salle climatisée, d’instaurer des permanences de nuit des personnels soignants… Les membres de la mission d’information constatent aussi qu’en l’état actuel du système sanitaire et social, des reformes «structurelles» donc «coûteuses» vont être nécessaires.
par Valérie Gas
Article publié le 25/09/2003