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Iran

Nucléaire : Téhéran cherche à éviter les sanctions

Tout en rejetant fermement la résolution du 12 septembre de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), soutenue par les États-Unis, les pays européens, le Japon et le Canada, qui donne jusqu’à 31 octobre à l’Iran pour apporter les garanties qu’il ne cherche pas à mettre au point l’arme atomique sous couvert d’un programme nucléaire civil, Téhéran a commencé à donner des gages de bonne volonté pour éviter que le dossier du nucléaire iranien soit envoyé devant le Conseil de sécurité des Nations unies avec comme risque de possibles sanctions internationales.
De notre correspondant à Téhéran

Dans un premier geste, les Iraniens ont accepté des inspections de leurs sites au-delà de ce que prévoit leur engagement actuel. «Les experts de l'AIEA ont présenté une liste de sites et nous sommes parvenus à un accord bilatéral sur les sites à inspecter. Les inspections ont commencé conformément à cet accord», a affirmé le 6 octobre dernier le représentant de l'Iran auprès de l'AIEA, Ali Akbar Salehi. Les inspecteurs de l’AIEA, arrivés en Iran début octobre vont mener une série d’inspections, qualifiées de «décisives» par l’Agence. Ces inspections vont durer environ deux semaines.

Ali Akbar Salehi a également annoncé que l'Iran avait commencé à remettre à l'AIEA une liste de pièces importées destinées essentiellement à l'enrichissement d'uranium. «Nous allons montrer ces pièces, dont certaines sont obsolètes et n’ayant pas de garanties de norme, là où elles sont utilisées ou là où elles sont stockées».

Ainsi l’Iran paraît vouloir accéder à certaines exigences de la résolution adoptée le 12 septembre par l'AIEA. Cette résolution demande à l’Iran de signer le protocole additionnel au Traité de non-prolifération (TNP) qui permet des inspections inopinées des sites nucléaires iraniens. Elle donne aussi à l'Iran jusqu'à la fin du mois pour fournir les preuves que son programme nucléaire civil ne cache pas un programme militaire. La résolution demande par ailleurs à l’Iran «un accès illimité à tous les lieux» et «toutes autres informations et explications» que l'agence jugera nécessaires. Elle exige aussi «une déclaration complète de tous les matériaux et composants importés relatifs à l'enrichissement d'uranium et coopère avec l'Agence à l'identification de la source et de la date de réception de ces importations, ainsi que les lieux où elles ont été stockées et utilisées en Iran».

Ces derniers mois, les inspecteurs de l’AIEA ont trouvé à deux reprises des traces d’uranium hautement enrichi sur deux sites différents, ce qui a accentué les inquiétudes de l’AIEA et des Occidentaux sur l’existence possible d’un programme nucléaire. Nous ne pouvons pas laisser un pays qui prône ouvertement la destruction d’Israël posséder l’arme atomique, a récemment déclaré le Premier ministre britannique Tony Blair. Pour sa part, le président français Jacques Chirac a déclaré qu’on ne «pouvait pas laisser un régime dont on se sait pas où il va avoir l’arme atomique».

Les pressions s’accentuent

Malgré ces gestes de bonne volonté, l’Iran refuse toujours la «suspension» de son programme d’enrichissement d’uranium, comme le réclame l’AIEA. De même, on est encore dans le flou en ce qui concerne la signature du protocole additionnel. «Nous ne permettrons à personne de nous priver de notre droit à utiliser l'énergie nucléaire à des fins pacifiques et en particulier de notre droit à l'enrichissement pour fabriquer le combustible de nos centrales», a ainsi affirmé le 7 octobre le chef de la diplomatie iranienne Kamal Kharazi. Il a ajouté que Téhéran était très déterminé sur cette question mais aussi celle de la protection des secrets stratégiques et militaires iraniens. «Nous négocions actuellement avec l'AIEA pour que nos droits ne soient pas bafoués et qu'on n'attente pas au prestige de notre pays» a-t-il ajouté.

En tout cas, à l’approche de la date du 31 octobre, les pressions s’accentuent. «Nous apporterons toute la coopération nécessaire pour assurer au monde que nous ne cherchons pas à avoir l'arme atomique» a déclaré le président iranien Mohammad Khatami. Cette déclaration de bonne volonté s’ajoute à celles de plusieurs autres responsables iraniens qui ont affirmé ces derniers jours que Téhéran voulait absolument éviter que le dossier soit envoyé par l’AIEA devant le Conseil de sécurité des Nations unies.

A propos du protocole additionnel le président iranien a ajouté que l’Iran n’avait «jamais dit qu’il n’allait pas le signer (…) mais qu’il n'acceptera jamais un engagement (international) mettant en danger la sécurité nationale, les intérêts nationaux, la souveraineté et l'intégrité du pays». En fait, selon lui, l’Iran a déjà commencé à appliquer ce protocole «en grande partie» avant même de l’avoir signé. Le président iranien a également révélé que des discussions avaient lieu en ce moment au sein du pouvoir entre partisans et adversaires de la signature du protocole additionnel, mais que tout le monde s'accordait sur la nécessité de disposer de la technologie nucléaire civile et de défendre la sécurité et la souveraineté nationales.

Reste que les pays occidentaux, États-Unis en tête, ne semblent pas vouloir laisser l'Iran faire un choix à sa convenance dans les demandes de l’AIEA. «Ce qui est important pour nous, c'est que l'Iran réponde pleinement et complètement à toutes les demandes de l'AIEA», a ainsi déclaré le porte-parole du ministère américain des Affaires étrangères, Richard Boucher. Après les inspections en cours, le directeur de l’AIEA, Mohamed El Baradei devra présenter un nouveau rapport au Conseil des gouverneurs de l’Agence internationale qui se réunira le 20 novembre. On saura à ce moment là si les gestes de bonne volonté de l’Iran auront suffi à calmer les inquiétudes de la communauté internationale.



par Siavosh  Ghazi

Article publié le 09/10/2003