Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Grande-Bretagne

Les conservateurs se cherchent un Tony Blair

Le leader conservateur Ian Duncan Smith a démissionné mercredi soir après un vote de défiance des militants. Les Tories cherchent le leader charismatique qui les ferait revenir au gouvernement.
Qu’il est difficile d’être le chef de l’opposition à l’ombre de l’inamovible Tony Blair ! «Je ne serai pas le premier Premier ministre conservateur du XXIè siècle», s’est exclamé Ian Duncan Smith mercredi soir après avoir été désavoué par un vote des militants du parti conservateur. Deux ans après avoir succédé à William Hague, le jeune et terne leader adoubé par Margaret Thatcher, Duncan Smith s’est à son tour usé face à Tony Blair. Ce dernier, éprouvé par les critiques internes de son parti, l’hostilité du majorité de l’opinion sur la façon dont il a entraîné dans la guerre la Grande-Bretagne, critiqué pour les contre-performances des services publics (école, hôpital, chemins de fer) n’est pourtant plus l’inoxydable Tony.

Mais la domination des travaillistes ne semble pas menacée. Si ce n’est pas Blair qui conduit son parti à la victoire pour la troisième fois en 2006, ce sera Gordon Brown, ou un autre. Les seuls à bénéficier jusqu’à présent du désamour des Britanniques pour leur ex-jeune Premier ministre sont les Libéraux-Démocrates, encore plus à gauche que Tony Blair. Jamais, depuis qu’a commencé l’érosion de la popularité du chef du gouvernement britannique, les conservateurs n’en ont véritablement profité.

Les «Tories» (ainsi surnomme-t-on les conservateurs) en ont donc tiré la conclusion qu’il leur fallait se trouver un leader plus charismatique. Ce sera le quatrième chef des conservateurs en dix ans, après John Major, William Hague et Ian Duncan Smith. Ce qui n’aide pas les conservateurs à sortir de leur blues est la profonde division qui les traverse, entre une majorité très hostile à l’entrée dans l’euro et plus généralement à la construction européenne et la minorité europhile, menée par l’ancien Premier ministre Edward Heath et aujourd’hui l’ancien ministre des Finances Kenneth Clarke. Comme sur les questions de société ou sur la guerre en Irak, Tony Blair a paru les dépasser par la droite et qu’il est exclu que les conservateurs se montrent plus «à gauche» que les travaillistes sur quelque sujet que ce soit, la malédiction de l’opposition semble marquer les tories pour l’avenir prévisible.

La tentation de la droitisation

Pourtant, à bien y songer, les conservateurs se trouvent dans la même situation que celle que connaissaient les travaillistes avant la victoire électorale de 1997. Jusqu’à la conquête du parti par Tony Blair en 1994, ces derniers paraissaient voués à ne plus jamais connaître les joies et tourments du pouvoir. Michael Foot, Neil Kinnock, John Smith s’étaient succédé sans parvenir à faire atteindre le seuil du pouvoir aux travaillistes. Tony Blair, avec cynisme et savoir-faire, avait réussi sa prise de contrôle du parti en convainquant les militants que les élections se jouaient au centre et que pour accéder au gouvernement, il fallait débarrasser le parti de son image gauchiste et la «recentrer».

Confrontés au même choix, de l’autre côté de l’échiquier politique, les conservateurs semblent tentés par la droitisation du parti Tory en se donnant pour leader l’eurosceptique Michael Howard, l’un des chefs de file de l’aile droite du parti. Cet ancien ministre de Margaret Thatcher, qui a passé treize ans au gouvernement, avait involontairement provoqué sa chute en étant l’artisan de la poll tax, l’impôt municipal tellement impopulaire qui avait fini en 1990 par faire chuter la Dame de fer en pleine crise du Koweït. Les élections pour la direction du parti auront lieu le 11 novembre.

Ecoutez Philippe Chassaigne, professeur d'histoire contemporaine (30/10/2003, 4'26")



par Olivier  Da Lage

Article publié le 30/10/2003