Attentats : la riposte
Soutien inattendu pour les prisonniers de Guantanamo
Une vingtaine d’anciens hauts responsables américains a saisi la Cour suprême pour que les détenus de Guantanamo bénéficient de la Convention de Genève.
«Combattants illégaux» pour les autorités américaines, retenus prisonniers sur une base américaine située hors du sol national et par conséquent dépourvus des droits inscrits dans la constitution américaine, les quelque 660 détenus de Guantanamo ont reçu ces derniers jours un renfort inattendu de certains des plus éminents notables américains.
Jeudi dernier, plus d’une vingtaine de militaires, juges et diplomates américains ont adressé un mémorandum (amicus curiae) à la Cour suprême des États-Unis, lui demandant de se saisir de la situation des prisonniers de Guantanamo. Ces derniers, capturés, pour la plupart, lors des opérations en Afghanistan en novembre 2001 et ressortissant de 42 pays, sont retenus depuis lors au secret, sans l’assistance d’un avocat, sans que les charges retenues contre eux soient connues, en dehors de la vague accusation de «terrorisme», et surtout, sans que la moindre date de procès n’ait encore été envisagée. On ne sait pas davantage quelle forme prendraient ces procès, même si tout indique qu’il s’agirait de justice militaire. On sait aussi qu’à toute fin utile, une chambre d’exécution a été construite dernièrement à proximité des cellules. Mais comme l’a résumé crûment le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, les prisonniers pourraient être retenus jusqu’à la fin de la guerre contre le terrorisme. Comme nul n’envisage la fin prochaine de celle-ci, cela revient à prononcer une condamnation à perpétuité hors de tout processus judiciaire.
Mardi dernier, un haut responsable du Comité international de la Croix Rouge (CICR), Christophe Girod, a pris l’initiative extrêmement rare pour le CICR de rendre publique son indignation devant les conditions «inacceptables» de détention de ces prisonniers. Il a notamment souligné que l’isolement de ces derniers, l’incertitude sur leur sort, et leurs interrogatoires avaient un «impact sur la situation mentale» des détenus. En dix-huit mois, 21 d’entre eux ont effectué 32 tentatives de suicide.
L’administration américaine, qui a autorisé des visites à Guantanamo d’organisations internationales, notamment le CICR (mais pas Amnesty International), a en revanche toujours refusé d’appliquer à ces «combattants illégaux» le bénéfice de la Convention de Genève, estimant que leur situation lors de leur capture, ne le leur permettait pas. Cette approche a toujours été contestée par les juristes, hormis ceux de l’administration actuellement au pouvoir à Washington.
Les valeurs américaines, principal atout diplomatique
Les familles de seize détenus ont finalement décidé de contester leur prétendu statut devant la justice américaine. C’est pourquoi on ne saurait sous-estimer l’impact de l’amicus curiae en faveur de ces seize détenus adressé à la Cour suprême par ces personnalités américaines, parmi lesquelles deux anciens sous-secrétaires d’État, un ancien sous-secrétaire à la Défense et un amiral, ancien juge de cour martiale. Jusqu’à présent, la justice fédérale a rejeté les plaintes, estimant que Guantanamo se trouvant en territoire étrangère, la base échappe aux juridictions américaines et les détenus ne peuvent invoquer la constitution des États-Unis.
Dans leur document, ces personnalités ne se contentent pas de contester cette analyse juridique. Prenant une posture patriotique qu’autorise le passé de chacun de ces anciens hauts serviteurs de l’État, les signataires soulignent que ce déni de justice cause un tort considérable à la réputation des États-Unis, élément essentiel de son influence et de sa puissance à travers le monde: à travers les années, écrivent-ils, «notre principal atout diplomatique a été les valeurs de notre nation». En renonçant aux principes qui ont fait la force des États-Unis, l’administration Bush fournit à d’autres pays «un prétexte» pour agir de même et «met en danger les soldats américains qui pourraient être capturés à l’avenir».
Prompte à dénoncer le manque de patriotisme des opposants à ses méthodes de lutte contre le terrorisme, la Maison Blanche s’est jusqu’à présent bien gardée d’en faire autant à leur encontre.
Jeudi dernier, plus d’une vingtaine de militaires, juges et diplomates américains ont adressé un mémorandum (amicus curiae) à la Cour suprême des États-Unis, lui demandant de se saisir de la situation des prisonniers de Guantanamo. Ces derniers, capturés, pour la plupart, lors des opérations en Afghanistan en novembre 2001 et ressortissant de 42 pays, sont retenus depuis lors au secret, sans l’assistance d’un avocat, sans que les charges retenues contre eux soient connues, en dehors de la vague accusation de «terrorisme», et surtout, sans que la moindre date de procès n’ait encore été envisagée. On ne sait pas davantage quelle forme prendraient ces procès, même si tout indique qu’il s’agirait de justice militaire. On sait aussi qu’à toute fin utile, une chambre d’exécution a été construite dernièrement à proximité des cellules. Mais comme l’a résumé crûment le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, les prisonniers pourraient être retenus jusqu’à la fin de la guerre contre le terrorisme. Comme nul n’envisage la fin prochaine de celle-ci, cela revient à prononcer une condamnation à perpétuité hors de tout processus judiciaire.
Mardi dernier, un haut responsable du Comité international de la Croix Rouge (CICR), Christophe Girod, a pris l’initiative extrêmement rare pour le CICR de rendre publique son indignation devant les conditions «inacceptables» de détention de ces prisonniers. Il a notamment souligné que l’isolement de ces derniers, l’incertitude sur leur sort, et leurs interrogatoires avaient un «impact sur la situation mentale» des détenus. En dix-huit mois, 21 d’entre eux ont effectué 32 tentatives de suicide.
L’administration américaine, qui a autorisé des visites à Guantanamo d’organisations internationales, notamment le CICR (mais pas Amnesty International), a en revanche toujours refusé d’appliquer à ces «combattants illégaux» le bénéfice de la Convention de Genève, estimant que leur situation lors de leur capture, ne le leur permettait pas. Cette approche a toujours été contestée par les juristes, hormis ceux de l’administration actuellement au pouvoir à Washington.
Les valeurs américaines, principal atout diplomatique
Les familles de seize détenus ont finalement décidé de contester leur prétendu statut devant la justice américaine. C’est pourquoi on ne saurait sous-estimer l’impact de l’amicus curiae en faveur de ces seize détenus adressé à la Cour suprême par ces personnalités américaines, parmi lesquelles deux anciens sous-secrétaires d’État, un ancien sous-secrétaire à la Défense et un amiral, ancien juge de cour martiale. Jusqu’à présent, la justice fédérale a rejeté les plaintes, estimant que Guantanamo se trouvant en territoire étrangère, la base échappe aux juridictions américaines et les détenus ne peuvent invoquer la constitution des États-Unis.
Dans leur document, ces personnalités ne se contentent pas de contester cette analyse juridique. Prenant une posture patriotique qu’autorise le passé de chacun de ces anciens hauts serviteurs de l’État, les signataires soulignent que ce déni de justice cause un tort considérable à la réputation des États-Unis, élément essentiel de son influence et de sa puissance à travers le monde: à travers les années, écrivent-ils, «notre principal atout diplomatique a été les valeurs de notre nation». En renonçant aux principes qui ont fait la force des États-Unis, l’administration Bush fournit à d’autres pays «un prétexte» pour agir de même et «met en danger les soldats américains qui pourraient être capturés à l’avenir».
Prompte à dénoncer le manque de patriotisme des opposants à ses méthodes de lutte contre le terrorisme, la Maison Blanche s’est jusqu’à présent bien gardée d’en faire autant à leur encontre.
par Olivier Da Lage
Article publié le 11/10/2003