Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Togo

Sauver les apparences

Après l’élection présidentielle de juin dernier, où l’opposition a semblé vouloir créer une situation de blocage, force est de constater que la politique au Togo, depuis plusieurs décennies reste un éternel recommencement.
Eyadema malade, Eyadema rétabli, les rumeurs les plus folles ont couru, ces derniers mois sur l’état de santé du général président Gnassingbé Eyadema. L’opposition en mal d’inspiration et de stratégie semble désormais placer ses espoirs dans la maladie dont souffre le président pour espérer le remplacer à la tête du pays. La présidence de la république togolaise qui avait, semble-t-il, un moment cherché à cacher les indispositions du président s’est finalement ravisée en laissant clairement entendre que le président était souffrant. Les réservations d’avion et autre départ rapide ont laissé supposer des situations d’urgence qui n’ont pas manqué d’alimenter la rumeur. En effet le président a souffert d’une infection pulmonaire, à la mi-août, qui aurait pu entraîner des complications graves. Soigné en Italie, il a regagné son pays quinze jours plus tard. Sa convalescence s’est passée dans son village Pya, et le président a retrouvé ses bureaux de Lomé II, le Palais présidentiel, dans les tous premiers jours du mois de septembre.

Il n’en fallait plus pour une opposition politique en décomposition pour entretenir des rumeurs de disparition du président. Cet aveu de faiblesse est immédiatement exploité par le Rassemblement du peuple togolais (RPT) parti au pouvoir, pour consolider ses bases quelque peu chahutées lors de l’élection présidentielle de juin dernier. Le pouvoir se rendant compte que les partis qui avaient promis le chaos n’ont pu accorder leurs discours pendant cette période, où certains barons de l’ordre Eyadema ont tout de même pensé au pire, a pris la décision de mettre les bouchées doubles pour l’installation des institutions acquises à sa cause et pour meilleur contrôle du tissu électoral.

En ordre de marche vers les premières élections locales

C’est ainsi que l’Assemblée nationale a procédé dès le 15 septembre au renouvellement des membres de la commission électorale nationale indépendante (CENI). Outre Abalo Petchelebia, président de la CENI, le RPT, le parti du président aligne quatre autres membres, contre un de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), opposition dite parlementaire, et deux autres de l’opposition qualifiée d’extraparlementaire (Parti pour la démocratie et le renouveau-PDR et la Convergence patriotique panafricaine-CPP). Quelques jours plus tard la même assemblée a voté à l’unanimité une loi créant neuf nouvelles communes urbaines au Togo. Tout ce dispositif se met en place parce que le gouvernement entend honorer «les engagements du candidat Eyadema» qui avait promis lors de la campagne électorale présidentielle, la tenue «dans les meilleurs délais d’élections municipales, préfectorales et sénatoriales». Le gouvernement souhaite la tenue de ces premières élections locales au Togo avant la fin de l’année 2003.

Malgré la controverse née de la dernière élection présidentielle, validée par les observateurs de l’Organisation internationale de la francophonie, mais non reconnue par l’Union européenne dont une mission exploratoire avait été refusée par les autorités togolaises, le gouvernement poursuit inexorablement sa marche sur le chemin de ce qu’il appelle «ancrage des institutions démocratiques». Le gouvernement a dépêché, Koffi Sama, le Premier ministre à Bruxelles pour essayer de faire lever les sanctions économiques prises l’Union européenne contre le Togo pour non respect de la pluralité et de certains principes démocratiques depuis 1992. Derrière lui apparaît Gilchrist Olympio, leader de l’Union des forces nouvelles (UFC) au parlement européen et la Commission européenne pour certainement prendre le contre-pied du Premier ministre.

Ce spectacle incongru est l’image de la vie politique au Togo. Le manque de concertation entre ceux qui poursuivent le même but, le renversement du régime Eyadema, révèle bien que ce seul objectif n’est pas un programme de gouvernance crédible. Les leaders de l’opposition à travers leurs actions individuelles se tirent une balle dans le pied, pensant affaiblir l’allié et non moins adversaire dans la course au pouvoir. Sur cette scène en pagaille, les opposants résidents en Europe prônent aujourd’hui de plus en plus des méthodes fortes et recueillent de plus en plus des adeptes.





par Didier  Samson

Article publié le 02/10/2003