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Mondialisation

L’Europe oui, mais pas n’importe laquelle

Un large consensus semble se dégager, au Forum social européen, contre le projet de constitution de l’Union européenne. L’accord n’est cependant pas total entre ceux qui préconisent d’exiger des modifications, dans un sens plus démocratique et moins libéral, et ceux qui prônent l’arrêt du processus en cours et un nouveau départ sur d’autres bases.
Le Forum social européen s’est ouvert à Paris et dans trois villes de banlieue parisienne avec, pour thème principal, la construction d’une autre Europe que celle du libéralisme sans frein et la définition des moyens à mettre en oeuvre pour y parvenir. Dans une ambiance studieuse plusieurs centaines de personnes ont donc débattu du projet de constitution européenne élaboré par la Convention présidée par l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing et actuellement en discussion à la Conférence intergouvernementale (CIG).

Au nombre des droits citoyens auxquels les militants altermondialistes sont particulièrement attachés, il y a «le droit de dire non». Et, parmi les participants au Forum social européen, le rejet du projet de constitution européenne est quasi-général. La seule ligne de partage passe entre ceux qui veulent imposer des changements, en exerçant une pression des citoyens dans les pays de l’Union européenne, et ceux qui ne craignent pas d’appeler au refus absolu du texte, notamment lors des référendums qui pourraient avoir lieu dans les Etats membres. Sur ce point l’ancienne députée suédoise Gundrun Schyman rappelle qu’en dépit d’une campagne massive de la classe politique suédoise pour le oui à l’euro, les citoyens en ont décidé autrement en septembre dernier.

Les critiques à l’encontre du texte en discussion à la CIG fusent tous azimuts, sur le fond, sur la forme, sur les conditions de son élaboration. Mais l’objection fondamentale est celle soulignée par le syndicaliste français Pierre Khalfa (G10 Solidaires). La future constitution ne définit pas seulement l’organisation des institutions de l’Union européenne à 25 membres ou plus. Selon lui, «elle marque le triomphe de l’économie de marché et inscrit «dans le marbre» les politiques néo-libérales menées depuis 25 ans». Mentionner l’économie de marché dans le texte fondamental de l’Union européenne reviendrait à empêcher les citoyens européens d’opter, dans l’avenir, pour une autre organisation économique et sociale. D’autant que la difficulté de réviser la constitution en fait, ajoute Pierre Khalfa «une porte blindée» contre le changement. Il n’hésite plus, dès lors, à repousser le projet constitutionnel, même si cela aboutit à «ouvrir une crise» en Europe, afin de «tout remettre à plat».

La laïcité, question d’actualité

Un syndicaliste italien refuse également l’idée largement répandue chez les partisans d’une Europe libérale d’une opposition entre croissance et droits sociaux : la croissance économique impliquerait une réduction de la protection sociale et son augmentation un recul de la croissance économique. Ainsi, relèvent les altermondialistes, le rôle attribué par la future constitution à la Banque centrale européenne fait de la stabilité des prix la priorité, reléguant donc l’emploi au rang d’objectif secondaire.

Un autre article du projet de constitution est fortement dénoncé par les participants au Forum social européen. C’est l’article 51, celui qui, explique la féministe espagnole Maria José Aubet «ouvre la porte au dialogue avec les religions ce qui, surtout pour les femmes, se termine toujours très mal». La laïcité en Europe est un thème qui revient souvent, preuve que cette question n’est pas d’actualité seulement en France ou en Turquie, éventuel futur membre de l’Union européenne.

Plus généralement le «déficit démocratique» et l’absence de consultation des citoyens concernés, dans l’élaboration du projet de constitution comme dans la multiplication des délégations prévues par le projet de constitution est l’un des chevaux de bataille des altermondialistes. «Cessons de subir l’Europe, prenons-la en mains», invite Patrice Cohen-Seat de l’association Espace-Marx. Et cela consiste, dans un premier temps, à interrompre le processus constitutionnel en cours, à formuler des propositions alternatives et à les imposer par le biais du mouvement social européen.

Lire également:

FSE: les objectifs économiques des altermondialistes , la Chronique économique de Norbert Navarro du 13 novembre 2003.

Ecouter également:

L'invité du matin
Gustave Massiah, président du Crid, vice-président d'Attac au micro de Bruno Daroux (13/11/2003, 8'35")

L'invité Europe
Christophe Aguiton, responsable des questions internationales à Attac au micro de Béatrice Leveillé (13/11/2003, 3'08")



par Francine  Quentin

Article publié le 13/11/2003