Grande-Bretagne
L’encombrante visite de George Bush
Pas question d’annuler la visite officielle à Londres que George Bush doit effectuer à partir de mardi. Ce serait perdre la face et reconnaître une faiblesse que ni Tony Blair, ni George Bush ne sont prêts à avouer. Pourtant, doivent se dire les deux dirigeants, quel boulet que cette visite-là ! Le président américain, qui ne goûte guère les déplacements à l’étranger, a accordé comme une faveur à son meilleur allié cette démonstration d’amitié. Pourtant, il s’agit là pour Tony Blair d’un véritable cadeau empoisonné. On ne voit pas ce que ce déplacement va apporter à l’un ou à l’autre. On voit très bien en revanche ce qu’il risque de coûter au Premier ministre britannique à qui l’électorat, notamment travailliste, reproche déjà son alignement sur le président Bush.
Entre le moment où le projet a été conçu, au lendemain de la victoire anglo-américaine sur l’Irak, et aujourd’hui, que de choses ont changé ! La dégradation vertigineuse de la situation militaire en Irak s’est symétriquement accompagnée d’une montée de la défiance des opinions britannique et américaine à l’égard de leurs dirigeants, et surtout, en Grande-Bretagne, d’une hostilité massive de la population à l’égard de George Bush. Au point qu’un éditorialiste proche des néo-conservateurs américains écrivait voici quelques jours dans le Financial Times qu’à lire les articles de la presse londonienne, on serait fondé à se demander si c’est George Bush ou le dictateur nord-coréen Kim Jong-il qui est attendu dans la capitale du royaume.
Les opposants à la guerre, et, plus généralement à la politique de George Bush ainsi qu’à l’alignement de la Grande Bretagne sur les États-Unis attendent de pied ferme l’hôte de la Maison Blanche qui sera d’ailleurs, en tant qu’invité officiel de la reine Elisabeth II, logé trois jours durant à Buckingham Palace. Les problèmes de sécurité sont réels pour une telle visite, les responsables craignant une tentative d’attentat d’Al Qaïda contre le président américain. C’est pourquoi le Secret Service, chargé de la protection du chef de l’exécutif américain, a demandé à la police britannique de fermer pendant trois jours le centre de la capitale pour des raisons de sécurité.
Abattre la statue de Bush
La demande américaine s’est heurtée à un double refus : celui du maire de Londres, Ken Livingston, travailliste de gauche hostile à la guerre en Irak, ainsi qu’à celui de la Metropolitan Police qui n’envisage pas un instant de déléguer ses compétences en matière de sécurité à des agents étrangers, fussent-ils américains. Le coût estimé de cette visite (5 millions de livres sterling, soit près de 7,2 millions d’euros, selon la police londonienne) choque l’opinion britannique qui, dans son ensemble, n’en imagine aucune retombée positive.
Par ailleurs, le terrorisme n’est pas sa seule raison pour laquelle les responsables américains veulent fermer le centre de Londres durant le séjour de leur président. Ce dernier, contrairement à Tony Blair, ne va jamais à la rencontre des contestataires et préfère ignorer ses contradicteurs. Aux États-Unis, les manifestants sont soigneusement parqués à plusieurs kilomètres des lieux où George Bush est susceptible de se rendre, dans ce que la presse américaine appelle avec dérision des «zones d’expression libre». Dans la capitale londonienne, célèbre pour son Hyde Park Corner où n’importe qui, juché sur une caisse ou un tabouret, est libre de haranguer la foule sur le sujet de son choix, sérieux ou farfelu, une telle approche est tout simplement inconcevable.
Or, les opposants à la guerre entendent bien profiter du séjour de George Bush pour une spectaculaire démonstration d’hostilité. En février dernier, un million de manifestants s’étaient rassemblés à Londres. Cette fois-ci, la police en attend environ 100 000. Les organisateurs, décidés à n’épargner aucune humiliation à leur bête noire, ont même imaginé de dresser une statue en carton-pâte de George W. Bush afin de l’abattre spectaculairement comme l’ont été celles de Saddam Hussein à Bagdad.
Car pour les Américains, le plus difficile est de prendre conscience qu’au pays de leur meilleur allié, l’antiaméricanisme de l’opinion publique (ou, pour être plus exact, l’hostilité à l’encontre de la politique de George Bush) ne le cède en rien à celui des Français, les suspects habituels. Selon un sondage Populus publié récemment par le Times, 67 % des Britanniques s’opposent à sa politique alors que seuls 14 % la soutiennent.
A écouter :
Stuart Bell, Député travailliste proche de Tony Blair. Invité de Pierre Ganz, le 19/11/2003.
Les opposants à la guerre, et, plus généralement à la politique de George Bush ainsi qu’à l’alignement de la Grande Bretagne sur les États-Unis attendent de pied ferme l’hôte de la Maison Blanche qui sera d’ailleurs, en tant qu’invité officiel de la reine Elisabeth II, logé trois jours durant à Buckingham Palace. Les problèmes de sécurité sont réels pour une telle visite, les responsables craignant une tentative d’attentat d’Al Qaïda contre le président américain. C’est pourquoi le Secret Service, chargé de la protection du chef de l’exécutif américain, a demandé à la police britannique de fermer pendant trois jours le centre de la capitale pour des raisons de sécurité.
Abattre la statue de Bush
La demande américaine s’est heurtée à un double refus : celui du maire de Londres, Ken Livingston, travailliste de gauche hostile à la guerre en Irak, ainsi qu’à celui de la Metropolitan Police qui n’envisage pas un instant de déléguer ses compétences en matière de sécurité à des agents étrangers, fussent-ils américains. Le coût estimé de cette visite (5 millions de livres sterling, soit près de 7,2 millions d’euros, selon la police londonienne) choque l’opinion britannique qui, dans son ensemble, n’en imagine aucune retombée positive.
Par ailleurs, le terrorisme n’est pas sa seule raison pour laquelle les responsables américains veulent fermer le centre de Londres durant le séjour de leur président. Ce dernier, contrairement à Tony Blair, ne va jamais à la rencontre des contestataires et préfère ignorer ses contradicteurs. Aux États-Unis, les manifestants sont soigneusement parqués à plusieurs kilomètres des lieux où George Bush est susceptible de se rendre, dans ce que la presse américaine appelle avec dérision des «zones d’expression libre». Dans la capitale londonienne, célèbre pour son Hyde Park Corner où n’importe qui, juché sur une caisse ou un tabouret, est libre de haranguer la foule sur le sujet de son choix, sérieux ou farfelu, une telle approche est tout simplement inconcevable.
Or, les opposants à la guerre entendent bien profiter du séjour de George Bush pour une spectaculaire démonstration d’hostilité. En février dernier, un million de manifestants s’étaient rassemblés à Londres. Cette fois-ci, la police en attend environ 100 000. Les organisateurs, décidés à n’épargner aucune humiliation à leur bête noire, ont même imaginé de dresser une statue en carton-pâte de George W. Bush afin de l’abattre spectaculairement comme l’ont été celles de Saddam Hussein à Bagdad.
Car pour les Américains, le plus difficile est de prendre conscience qu’au pays de leur meilleur allié, l’antiaméricanisme de l’opinion publique (ou, pour être plus exact, l’hostilité à l’encontre de la politique de George Bush) ne le cède en rien à celui des Français, les suspects habituels. Selon un sondage Populus publié récemment par le Times, 67 % des Britanniques s’opposent à sa politique alors que seuls 14 % la soutiennent.
A écouter :
Stuart Bell, Député travailliste proche de Tony Blair. Invité de Pierre Ganz, le 19/11/2003.
par Olivier Da Lage
Article publié le 17/11/2003