France
Antisémitisme : le président s’implique
Les représentants de la communauté israélite ont favorablement réagi aux initiatives prises par les plus hautes autorités de l’Etat face à la persistance des actes antisémites perpétrés en France. Lundi, le président de la République a réuni son Premier ministre et ses ministres de l’Intérieur, de la Justice, de l’Education nationale et de l’Enseignement scolaire lors d’un conseil interministériel spécialement convoqué pour examiner la situation, deux jours après l’incendie, vraisemblablement volontaire, d’un lycée juif, à Gagny en banlieue parisienne.
Le conseil interministériel a décidé un certain nombre de mesures visant à renforcer la sécurité de la communauté juive, estimée à environ 600 000 personnes, mais également à prévenir les actes de racisme d’une manière plus générale. Tout d’abord, à la demande de Jacques Chirac, a été décidée la création d’un comité interministériel. Il se réunira tous les mois sous la présidence du chef du gouvernement. Sur le plan policier, les lieux de cultes juifs et ses établissements d’enseignement feront l’objet d’une surveillance particulière de la part des forces de l’ordre. Dans le domaine judiciaire, le ministre de la Justice doit veiller à un raccourcissement des délais de jugement des infractions «et à ce qu’il soit recouru, à chaque fois que cela sera possible, à la procédure de comparution immédiate». Un magistrat référent sera également nommé auprès de chaque procureur général pour assurer les relations avec la communauté juive et le suivi des procédures pénales. Enfin, concernant l’école, le ministre de l’Education nationale va adresser aux recteurs d’académie des directives visant à prévenir les actes de violence, menaces et propos racistes et antisémites dans les établissements. Un correspondant sera nommé dans chaque rectorat et une attention particulière sera portée au contenu des manuels scolaires.
Lors de la conférence de presse, donnée à l’occasion de la visite officielle du président sud-africain, le chef de l’Etat a condamné «solennellement au nom de la Nation tout acte d’antisémitisme et tout acte aussi qui n’est pas conforme aux exigences de la République». «Quand on s’attaque en France à un juif, il faut bien comprendre que c’est à la France tout entière qu’on s’attaque», a déclaré M. Chirac qui a réclamé «des sanctions exemplaires» pour les contrevenants. Il a également précisé avoir demandé à son ministre de l’Education nationale de «renforcer l’apprentissage de la citoyenneté dans nos écoles afin d’éduquer chaque enfant au respect de l’autre, au dialogue et à la tolérance».
L’implication personnelle du chef de l’Etat dans cette affaire a été saluée par les représentants de la communauté juive. «Le président de la République a accompli un geste fortement symbolique dans lequel il nous a dit l’essentiel : l’antisémitisme n’est pas un problème juif, c’est un problème français qui concerne toute la nation, c’est un problème de société», a déclaré le grand rabbin de France à la sortie d’une rencontre avec Jacques Chirac. «Il faut que tous nos concitoyens comprennent que les juifs ne sont pas des nouveaux-venus dans notre pays, qu’ils ont bâti la France avec passion, qu’ils l’ont aimée, qu’ils s’y sentent bien et qu’ils entendent y rester», a ajouté Joseph Sitruk. Même sentiment exprimé par le président de l’Alliance israélite universelle qui a accueilli avec satisfaction la réaction «d’une extraordinaire vigueur» de Jacques Chirac. «C’est le discours que nous attendions», a déclaré le directeur du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Haïm Musicant.
Atmosphère d’hostilité
Bien que les dernières statistiques du ministère de l’Intérieur font état d’une diminution des actes de nature antisémite, il règne en effet depuis plusieurs années en France une atmosphère d’hostilité croissante de la part notamment de certains membres de la communauté arabe, française ou immigrée, à l’égard des juifs. Cette hostilité, faite d’incivilités, de brutalités, de menaces, d’insultes et de mépris s’affiche parfois publiquement, sans complexe, et rappelle aux anciennes générations une époque, pas si lointaine, au cours de laquelle les juifs européens étaient officiellement discriminés, puis persécutés avant d’être exterminés. La situation d’aujourd’hui est certes très différente car elle s’inscrit dans un tout autre contexte. Il n’y a plus d’antisémitisme officiel, d’Etat, mais un environnement international marqué par la permanence d’un conflit israélo-palestinien caractérisé par une couverture médiatique considérable et la répétition de démonstrations de violence dans lesquelles deux légitimités s’affrontent.
Dans ce contexte, contrairement aux Européens qui ressentent encore le poids de leur responsabilité dans la Shoah, les Arabes de France n’éprouvent eux aucune culpabilité à dénoncer les Israéliens et leur politique. De son côté la France veut absolument s’exonérer, après les errements de ces deux derniers siècles, des accusations d’antisémitisme. Les juifs se décrivent d’ailleurs eux-mêmes comme des «fous de la République» (Haïm Musicant) qui a fait d’eux des citoyens à part entière et éprouvent, à la perspective d’une régression, une terreur telle que, selon l’ambassadeur d’Israël en France, «beaucoup de juifs s’interrogent sur leur avenir dans ce pays». Actuellement ils seraient ainsi quelque 2 500 à émigrer en Israël chaque année.
Toutefois, en dépit de la gravité des faits et de la vive inquiétude manifestée par la communauté, nombre de juifs continuent d’estimer que la France n’est pas antisémite. Et qu’«il aurait peut être été plus sage d’attendre un peu avant de qualifier d’antisémite cet acte (l’incendie du lycée) même s’il en a les apparences», déclarent le président d’honneur du CRIF, Théo Klein.
Lors de la conférence de presse, donnée à l’occasion de la visite officielle du président sud-africain, le chef de l’Etat a condamné «solennellement au nom de la Nation tout acte d’antisémitisme et tout acte aussi qui n’est pas conforme aux exigences de la République». «Quand on s’attaque en France à un juif, il faut bien comprendre que c’est à la France tout entière qu’on s’attaque», a déclaré M. Chirac qui a réclamé «des sanctions exemplaires» pour les contrevenants. Il a également précisé avoir demandé à son ministre de l’Education nationale de «renforcer l’apprentissage de la citoyenneté dans nos écoles afin d’éduquer chaque enfant au respect de l’autre, au dialogue et à la tolérance».
L’implication personnelle du chef de l’Etat dans cette affaire a été saluée par les représentants de la communauté juive. «Le président de la République a accompli un geste fortement symbolique dans lequel il nous a dit l’essentiel : l’antisémitisme n’est pas un problème juif, c’est un problème français qui concerne toute la nation, c’est un problème de société», a déclaré le grand rabbin de France à la sortie d’une rencontre avec Jacques Chirac. «Il faut que tous nos concitoyens comprennent que les juifs ne sont pas des nouveaux-venus dans notre pays, qu’ils ont bâti la France avec passion, qu’ils l’ont aimée, qu’ils s’y sentent bien et qu’ils entendent y rester», a ajouté Joseph Sitruk. Même sentiment exprimé par le président de l’Alliance israélite universelle qui a accueilli avec satisfaction la réaction «d’une extraordinaire vigueur» de Jacques Chirac. «C’est le discours que nous attendions», a déclaré le directeur du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Haïm Musicant.
Atmosphère d’hostilité
Bien que les dernières statistiques du ministère de l’Intérieur font état d’une diminution des actes de nature antisémite, il règne en effet depuis plusieurs années en France une atmosphère d’hostilité croissante de la part notamment de certains membres de la communauté arabe, française ou immigrée, à l’égard des juifs. Cette hostilité, faite d’incivilités, de brutalités, de menaces, d’insultes et de mépris s’affiche parfois publiquement, sans complexe, et rappelle aux anciennes générations une époque, pas si lointaine, au cours de laquelle les juifs européens étaient officiellement discriminés, puis persécutés avant d’être exterminés. La situation d’aujourd’hui est certes très différente car elle s’inscrit dans un tout autre contexte. Il n’y a plus d’antisémitisme officiel, d’Etat, mais un environnement international marqué par la permanence d’un conflit israélo-palestinien caractérisé par une couverture médiatique considérable et la répétition de démonstrations de violence dans lesquelles deux légitimités s’affrontent.
Dans ce contexte, contrairement aux Européens qui ressentent encore le poids de leur responsabilité dans la Shoah, les Arabes de France n’éprouvent eux aucune culpabilité à dénoncer les Israéliens et leur politique. De son côté la France veut absolument s’exonérer, après les errements de ces deux derniers siècles, des accusations d’antisémitisme. Les juifs se décrivent d’ailleurs eux-mêmes comme des «fous de la République» (Haïm Musicant) qui a fait d’eux des citoyens à part entière et éprouvent, à la perspective d’une régression, une terreur telle que, selon l’ambassadeur d’Israël en France, «beaucoup de juifs s’interrogent sur leur avenir dans ce pays». Actuellement ils seraient ainsi quelque 2 500 à émigrer en Israël chaque année.
Toutefois, en dépit de la gravité des faits et de la vive inquiétude manifestée par la communauté, nombre de juifs continuent d’estimer que la France n’est pas antisémite. Et qu’«il aurait peut être été plus sage d’attendre un peu avant de qualifier d’antisémite cet acte (l’incendie du lycée) même s’il en a les apparences», déclarent le président d’honneur du CRIF, Théo Klein.
par Georges Abou
Article publié le 18/11/2003