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Commerce mondial

Les Etats-Unis perdent la guerre de l’acier

Les Etats-Unis vont devoir, sur injonction de l’OMC, supprimer les surtaxes aux importations d’acier appliquées depuis mars 2002. Faute de quoi, les plaignants, dont l’Union européenne, le Japon et la Corée du Sud pourront adopter, légitimement, des mesures de rétorsion. De plus, l’intérêt même des Etats-Unis devrait les conduire à se conformer à la loi du commerce mondialisé.
En mars 2002, le gouvernement Bush décidait, pour faciliter la restructuration de la sidérurgie américaine face à la surproduction mondiale, d’appliquer des droits supplémentaires de 8% à 30% sur les aciers importés. Et ce pour une durée de trois ans. Huit membres de l’Organisation mondiale du commerce portaient alors plainte devant l’organe de règlement des différents de l’organisation : Union européenne, Japon, Chine, Brésil, Nouvelle-Zélande, Norvège, Corée du Sud et Suisse. En juillet dernier l’ORD donnait raison à ce groupe de pays, frappés dans leurs exportations d’acier vers les Etats-Unis. Et, en appel, l’OMC vient de confirmer ce jugement. En droit, il ne reste donc plus aux Etats-Unis, sourcilleux lorsqu’il s’agit de faire respecter les règles de la libéralisation du commerce mondial qui les favorisent, qu’à obtempérer en levant, à mi-parcours, les mesures prises il y a dix-huit mois.

Le président Bush fait mine de traîner les pieds et la Maison Blanche a fait savoir qu’elle allait se pencher avec attention sur la décision de l’OMC. Mais, en septembre dernier, un rapport d’une commission américaine concluait au caractère contre-productif des surtaxes sur les importations d’acier. En un an elles auraient fait perdre plus de 30 millions de dollars au produit intérieur brut américain et entraîné des difficultés pour les industries consommatrices de produits sidérurgiques en augmentant le coût de leurs intrants. Seuls les producteurs américains d’acier soutiennent encore cette mesure.

De plus, le politique n’étant jamais très loin de l’économique, l’énoncé des mesures de rétorsion que l’Union européenne entend prendre dès le mois prochain, si les Etats-Unis font de la résistance, a de quoi faire réfléchir. Les Quinze se proposent de taxer une série de produits en provenance des Etats-Unis, à hauteur de 2,2milliards de dollars, comme l’OMC les y autorise, mais en visant soigneusement ceux qui, tels les agrumes, proviennent de Floride, Etat particulièrement important pour la réélection éventuelle de l’actuel président.

Un contentieux parmi d’autres

La Nouvelle-Zélande ne doute pas que les Etats-Unis se conforment au jugement de l’OMC et pour les exportateurs asiatiques le plus tôt suera le mieux. Les Sud-Coréens, premiers exportateurs d’acier vers les Etats-Unis ont vu leurs exportations vers ce pays baisser de 35% en 2002. les exportations chinoises vers les Etats-Unis ont diminué de 15% et le Japon qui y avait écoulé près de 2 millions de tonnes d’acier en 2001 est tombé à 740 000 tonnes sur les neuf premiers mois de 2003.

L’affaire de l’acier n’est qu’un nouvel épisode de la guéguerre que se livrent par OMC interposée les grandes puissances économiques et au premier chef les Etats-Unis et l’Union européenne. Un autre dossier les oppose déjà concernant les avantages fiscaux consentis aux exportateurs américains et, eux aussi, condamnés par l’OMC. L’Union européenne envisage d’imposer dès le mois de mars prochain des droits de 5% sur une liste de produits américains afin d’imposer l’abrogation de ces dispositions anti-concurrentielles. De leur côté les Etats-Unis perçoivent chaque année près de 117 millions de dollars sur des produits européens en réplique à l’interdiction en Europe du bœuf aux hormones. Enfin, l’Union européenne vient de reporter au mois de décembre sa décision sur l’autorisation d’un aliment transgénique conservant ainsi le moratoire de 1999 sur la diffusion des OGM en Europe. Ces réticences ont été contestées devant l’OMC par les Etats-Unis, le Canada et l’Argentine. L’organisation a estimé qu’en effet il s’agissait là de protectionnisme commercial. C’est cette fois l’Union européenne qui temporise au maximum.



par Francine  Quentin

Article publié le 11/11/2003