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Liberia

Armée rouge en casques bleus

Monrovia attend ce dimanche l’arrivée de cinq policiers anglophones dûment sélectionnés et équipés de pied en cap par le ministère chinois de la Sécurité publique. Ils vont intégrer le corps de police internationale de 1 200 hommes formés par les Nations unies, avec en particulier le concours de Pékin, de Washington et de Londres. Par ailleurs, 240 soldats de l’Armée rouge sont prêts à rejoindre les casques bleus affectés au désarmement et à la stabilisation du Libéria. L’Onu table sur un effectif de 15 000 hommes d’ici février 2004 pour relayer les troupes ouest-africaines déjà sur place. Pékin a répondu présent après la rupture entre Monrovia et Taiwan effective depuis fin septembre.
En octobre, sitôt assermenté, le président par intérim Gyude Bryant a remis les pendules libériennes à l’heure pékinoise. Les relations entre les deux pays avaient été rompues en 1989 lorsque l’ex président Samuel Doe avait accepté de reconnaître Taiwan moyennant l’aide financière systématiquement octroyée dans ces conditions par le challenger de Pékin. Plus tard, dès son élection en 1997, Charles Taylor avait lui aussi succombé aux charmes de la «diplomatie du dollar» en usage à Taiwan. Ce dimanche 30 novembre, cinq officiers de police vont prendre un vol Pékin-Monrovia pour concrétiser le retour du balancier diplomatique. Ils seront les premiers policiers chinois à poser le pied en Afrique. Tous parlent anglais et quatre d’entre eux ont déjà servi la bannière onusienne à Timor Est et dans les Balkans où, respectivement, 69 et 15 de leurs pairs sont actuellement déployés.

Triés sur le volet, les policiers destinés aux opérations de l’Onu ont été entraînés dans le plus grand centre de formation asiatique du genre, à Langfang, dans la province chinoise de Hebei. La Chine, qui compte aujourd’hui parmi les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’Onu, s’était longtemps opposée aux opérations de maintien de l’ordre ou de la paix onusienne, après son entrée dans la maison de verre en 1971. En septembre1988, elle avait finalement rejoint le comité ad hoc de l’Onu et en 1992, Pékin avait pour la première fois envoyé une compagnie du génie militaire au Cambodge. L’année dernière, l’Armée de libération populaire de Chine (ALP) a envoyé 175 logisticiens et 43 membres de ses services sanitaires en République démocratique du Congo. Cette fois, c’est une compagnie des services logistiques de l’ALP qui se tient prête à répondre au feu vert de l’Onu et à embarquer pour le Libéria.

Transport de troupes

Selon l’ALP, quelque 240 soldats avaient déjà été sélectionnés dès le 30 décembre 2002 parmi plus de 700 volontaires pour une quelconque mission onusienne. Depuis le rabibochage sino-libérien, ils connaissent désormais leur probable destination. Entre temps, ils ont été soumis à un entraînement intensif en matière de tir bien sûr, mais aussi de survie en terrain hostile ou de déminage. «La compagnie sera basée près de Monrovia», explique la hiérarchie de l’ALP. Elle sera affectée au transport de troupes. «Les membres de l’équipe ont en moyenne cinq ans d’expérience comme chauffeurs, mais les plus expérimentés conduisent déjà depuis 21 ans», indique un colonel chinois chargé de superviser leur formation. «En tant que soldats de la paix, on nous demande de ne pas tirer les premiers», poursuit-il. Mais sous le casque bleu, la logistique chinoise a aussi prévu des lunettes de vision nocturne, des masques à gaz et autres gilets pare-balles. Bien sûr, les soldats de l’Armée rouge ont été également préparés à tenir un minimum de conversation en anglais, surtout les officiers qui devront aller au rapport auprès du commandement onusien.

Dans les paquetages, Pékin a pensé à mettre des systèmes de transmission par satellite, des ordinateurs portables, des lecteurs de DVD, des livres, mais aussi, assure un officier supérieur : «trois mois de champignons séchés, de vinaigre et de tous les condiments nécessaires pour que notre cantine roulante puisse leur servir de bons plats chinois». Bref, largement de quoi se faire des amis au Libéria.



par Monique  Mas

Article publié le 28/11/2003