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Liban

Feu vert israélien pour un échange de détenus avec le Hezbollah

A l’issue d’une réunion marathon de près de huit heures, le gouvernement israélien a finalement approuvé de justesse un accord d’échange de prisonniers avec le Hezbollah libanais. Mais cet accord pourrait toutefois capoter, le cabinet Sharon refusant de se soumettre aux conditions du mouvement radical qui réclame notamment la libération de Samir Kantar, un activiste libanais responsable de la mort d’un civil, de sa fille de quatre ans et d’un policier israéliens. L’Etat hébreu n’envisage en effet pas de remettre en liberté les terroristes qui ont tué des civils israéliens.
L’accord a été négocié sous l’égide de médiateurs allemands. Il prévoit la libération de 19 Libanais et de 400 Palestiniens détenus dans les prisons de l’Etat hébreu en échange de quatre Israéliens enlevés par le Hezbollah en octobre 2000. Trois sont des soldats présumés morts par l’armée israélienne qui réclament leur dépouille. Le quatrième est un homme d’affaires, Elhanam Tanenbaum, également ancien colonel. S’il apparaît déséquilibré, l’accord qui prévoit notamment la libération de deux chefs du Hezbollah, n’en respecte pas moins le principe sacré d’Israël de rapatrier tous ses citoyens, capturés, disparus ou tués par l’ennemi, quoiqu’il lui en coûte. Ce principe a toujours prévalu dans tous les accords d’échange de prisonniers avec les voisins de l’Etat hébreu, les marchés passés étant parfois totalement déséquilibrés.

Le feu vert du gouvernement Sharon ne concerne toutefois pas Samir Kantar, un activiste libanais condamné par la justice israélienne à 542 ans de prison pour l’enlèvement, puis le meurtre en 1979 d’un civil israélien et de sa fille âgée de quatre ans et de celui d’un policier israélien dans la ville de Nahariya, dans le nord de l’Etat hébreu. Le ministre israélien de l'Habitat Effi Eytam a ainsi déclaré à l’issue du conseil des ministres que «le Premier ministre Ariel Sharon avait indiqué sans équivoque que Samir Kantar ne serait pas inclus dans l'échange».

Le Hezbollah libanais n'a pas immédiatement réagi dimanche soir à cette condition imposée par Israël à un accord négocié depuis des mois par des médiateurs allemands. Le chef du mouvement radical, Cheikh Nasrallah, avait pourtant affirmé samedi que l'échange prévu avec l'Etat hébreu devait englober tous les Libanais détenus en Israël et averti que celui-ci n'aurait pas lieu si cette clause n'était pas respectée. «Tout échange qui exclurait un des détenus libanais sera refusé et l'échange n'aura pas lieu», avait-il fermement prévenu.

Polémique autour du pilote Arad

Comme le relève le quotidien Haaretz, le Premier ministre israélien «a pris des risques politiques et mis tout son prestige et son poids dans la balance» pour obtenir le feu vert pour cet échange. Ariel Sharon a dû notamment faire face au refus et à l’intransigeance du Mossad et du Shin Beth, les services secrets et de sécurité intérieure, tous deux violemment opposés à un tel accord. Leurs dirigeants ainsi que certains ministres avançaient notamment que cet accord allait permettre à un responsable du Hezbollah, Abdel Karim Obeid , et à un chef intégriste, Moustapha Dirani, de retrouver la liberté alors que l’Etat hébreu, qui a pourtant enlevé ces deux hommes en 1989 et 1994 pour servir de monnaie d’échange pour Ron Arad, ne parvient toujours pas à obtenir des informations sur le sort de cet aviateur israélien.

Porté disparu lorsque son appareil a été abattu au Liban sud en octobre 1986, ce pilote a acquis la stature de héros national. Le fait que son cas n’ait pas été mentionné lors des négociations a provoqué de très vives critiques en Israël. La polémique est d’autant plus dure que l’homme d’affaires qui va bientôt être libéré aurait été, selon les médias israéliens, impliqué dans des «activités délictueuses». La fille de l’aviateur, qui était encore bébé lorsque son père a été capturé, a violemment pris à parti Ariel Sharon dans la presse. «J’avais quelque espoir que je le connaîtrais, après tout, mais je comprends aujourd’hui que cela ne sera pas le cas», écrit-elle en accusant le Premier ministre d’avoir abandonné son père à son «triste sort».



par Mounia  Daoudi

Article publié le 09/11/2003